Ne vous fiez pas aux bancs de neige qui finissent de fondre : le printemps est bel et bien arrivé, et s’il reste encore beaucoup de bon hockey à venir dans les deux prochains mois, la saison du Canadien, elle, achève.

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Pour la troisième année de suite, c’est une fin de saison sans enjeu pour le Tricolore, ce qui ne veut pas dire qu’elle est inutile. Les deux derniers matchs, en particulier, ont rappelé à gros traits un des chantiers qui attendent le personnel d’entraîneurs du CH pendant la saison morte : la gestion de la deuxième période.

Ç’a été la pire période de l’équipe cette saison et le duel face aux Maple Leafs, samedi, l’a rappelé de la façon la plus brutale qui soit. Marque finale : 4-2 Toronto. Les six buts du match ont été inscrits en deuxième période. Sans même sortir la calculatrice, on comprend que Montréal en a encaissé quatre au cours du tiers temps maudit.

« On en parlait avant le début de la deuxième et on dirait qu’on revient toujours avec le même résultat », déplorait un Nick Suzuki un tantinet agacé, après la rencontre.

Les Maple Leafs ont balayé cette trop courte série de trois matchs contre le Canadien cette saison. Ils ont signé un gain à l’arraché de 6-5 en tirs de barrage en lever de rideau de la saison ; ils ont enchaîné avec une autre courte victoire, 3-2, au lendemain de la date limite des transactions, voilà quatre semaines.

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Auston Matthews a marqué un but dans la victoire.

Martin St-Louis a vu une autre défaite serrée. « Oui, ils gagnent. Mais je ne sens pas qu’ils nous battent. Ils trouvent des façons de gagner », a répondu l’entraîneur-chef.

Il est vrai que certaines circonstances atténuantes peuvent expliquer ce résultat. Les Montréalais étaient privés de Kaiden Guhle, défenseur no 2 du club, de même que d’Arber Xhekaj, qui offrait de la stabilité au côté de David Savard depuis deux mois. Pour les remplacer, on a fait appel au réserviste Johnathan Kovacevic, de même qu’à Justin Barron, rappelé de Laval, qui a parfois eu de la broue dans le toupet.

Sauf que ces circonstances atténuantes ne changent rien au fait que les Leafs, malgré le soubresaut du CH, n’ont guère été menacés après leurs quatre buts. Les données de Natural Stat Trick correspondent à ce qui a été observé : une domination à cinq contre cinq de Toronto aux chances de marquer en période médiane (7-2) et du jeu égal en troisième (2-2). Ils ont bel et bien battu le Canadien.

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Le tir de Nick Suzuki est arrêté par le gardien Ilya Samsonov.

Le CH a encaissé quatre buts sans réplique pour un deuxième match de suite. Jeudi, contre Tampa, c’était également en deuxième période. Les dommages du jour portent à -26 le différentiel de Montréal dans cette période (70 buts marqués, 96 buts accordés). Tout ça de la part d’une équipe qui s’en tire bien au premier engagement (63-62), comme ç’a d’ailleurs été le cas samedi.

« On a des problèmes à gérer la rondelle en fin de présence, convient St-Louis. On peut simplifier un peu notre jeu. Ça fait deux matchs de suite que ça arrive. Ce sont de bonnes équipes, et quand tu fais ce genre d’erreur, elles en profitent. »

Ça brasse

C’est aussi en deuxième période que la machine à remonter le temps nous a ramenés quelque part en 1987, quand les fiers-à-bras s’en donnaient à cœur joie.

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Jayden Struble et John Tavares se bagarrent le long de la rampe.

En plein milieu de la tempête de quatre buts des Torontois, Ryan Reaves a décidé de régler le cas de Michael Pezzetta. Ce dernier avait, à sa présence précédente, frappé David Kampf derrière le jeu, une mise en échec qui semblait venir sur le tard.

« Honnêtement, je n’ai pas vu la mise en échec parce que j’étais en train de changer, sinon j’aurais probablement agi immédiatement. Mais les gars au banc étaient assez fâchés, alors j’ai compris », a commenté Reaves.

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Ryan Reaves et Michael Pezzetta ont jeté les gants.

Reaves a eu le dessus dans le combat de boxe et en a rajouté une couche en invectivant les joueurs du CH au banc et en continuant à insulter Pezzetta au cachot. Vingt-neuf secondes plus tard, Bobby McMann faisait 4-0 Toronto.

« Tu vois la réaction sur le banc, l’énergie qu’il amène quand il se lève pour des gars comme ça. Ça change le momentum de côté », a noté Auston Matthews, lui-même surexcité au banc au terme du combat.

Sauf que les Leafs avaient déjà le vent dans le dos, et le Canadien a tout de même détenu un avantage de 2-1 après le combat. Le prétendu effet catalyseur de ces bagarres mériterait d’ailleurs d’être étudié un de ces quatre.

À vue de nez, on serait tenté de dire que Reaves est passé plus près d’aider son équipe en troisième période, quand il a bafoué Jayden Struble pour s’amener en zone offensive et obtenir un bon tir sur Cayden Primeau.

Reaves s’est inscrit dans la trame narrative de ce duel Montréal-Toronto, mais si les Leafs souhaitent faire un bout de chemin, leurs succès passeront davantage par le concours de leur duo dynamique d’Auston Matthews et Mitch Marner, par du jeu assuré de leur brigade défensive retravaillée le mois dernier et par des performances adéquates devant le filet. Bien plus que par l’apport d’un vétéran qui joue à peine huit minutes par match.

En hausse : Tanner Pearson

PHOTO GRAHAM HUGHES, LA PRESSE CANADIENNE

Tanner Pearson tente une percée au filet.

De retour dans la formation après six matchs passés dans les gradins, il a livré un vaillant effort et était aussi visible offensivement qu’en début de saison.

En baisse : Jayden Struble

Plusieurs risques mal calculés en zones offensive et neutre, qui ont causé des ennuis à son équipe en territoire défensif. Pas son meilleur match, même si l’implication physique y était, comme toujours.

Le chiffre du match : 14

Avec une passe sur le but de Nick Suzuki, Juraj Slafkovsky compte maintenant 14 points à ses 13 derniers matchs.

Dans le détail

« Sam ne l’avait pas »

Samuel Montembeault n’a sans doute pas connu la soirée qu’il espérait pour un match de rivalité du samedi. Après avoir reçu seulement quatre tirs en première période, le cerbère a accordé deux buts en 20 secondes au début du deuxième tiers. Le premier a été le fruit d’une déviation parfaite de Max Domi. Le deuxième est survenu quand une passe de Matthews a touché le patin de Savard avant de traverser la ligne des buts. Ce sont les deux buts suivants, aussi inscrits en moins d’une minute en deuxième période, qui lui ont coûté le reste du match : Matthew Knies a marqué sur un généreux retour, puis Bobby McMann a accepté une passe parfaite de Marner pour faire 4-0. C’est là que la soirée de travail de Montembeault a pris fin et qu’il a cédé sa place à Primeau. « Je pense que Sam ne l’avait pas », a simplement dit St-Louis après le match. David Savard s’est montré plus bavard : « C’est un jeu d’équipe. On a fait des erreurs, et d’habitude, il nous sauve. Ce soir, ça n’a pas marché. On a eu un mauvais bond sur le deuxième but. C’est plate, je sais qu’il se sent coupable, il veut performer. Mais c’est un sport d’équipe et tout le monde porte la responsabilité. » C’était la deuxième fois de la saison que Montembeault était retiré avant la fin de la rencontre.

Et de 100, encore

Les partisans présents au Centre Bell samedi soir pourront dire qu’ils ont été témoins du 64e but et du 100e point de la saison d’Auston Matthews. Il a ainsi rejoint le club des 65 joueurs à avoir réussi plus d’une saison de 100 points en carrière, et quelque chose nous dit que ce n’est pas sa dernière… Samedi matin, après l’entraînement optionnel de son équipe, Martin St-Louis n’avait pas hésité à vanter tous les talents de l’attaquant vedette. « Il est très alerte, mais il a aussi un hockey fatigant. Il joue bien défensivement. Son jeu défensif l’aide beaucoup à récupérer des rondelles et à amener son équipe en possession. Quand son équipe est en possession, il a beaucoup de touches. Ses touches sont excellentes et son patin est excellent. » St-Louis a aussi encensé les capacités d’anticipation du numéro 34, qui est le troisième attaquant de la ligue au chapitre des tirs bloqués – il en cumule 87 en 75 rencontres cette saison. « Les bons joueurs offensifs utilisent leur intelligence, ils sont capables de lire le jeu l’autre côté aussi, ils anticipent bien. Quand tu anticipes bien, tu es plus proche des lancers, tu sais que ça s’en vient, donc c’est plus facile d’avoir les pattes devant la rondelle. »

Les vedettes réparties

Avec le retour de Mitch Marner dans la formation après une absence de 12 matchs, les Maple Leafs ont pu faire preuve d’ingéniosité dans leurs trios. Les vedettes offensives Auston Matthews, William Nylander et Marner étaient séparées et jouaient chacun sur un trio différent. Samedi matin, Martin St-Louis expliquait qu’une telle façon de faire forçait son équipe à travailler « plus collectivement » défensivement. Malgré tout, les trois premiers trios des Leafs ont tous noirci la feuille de pointage, samedi soir. Matthews a terminé la soirée avec un but, tandis que Marner et Nylander ont chacun récolté une passe. Après le match, Marner a déclaré que cette façon de faire donnait « beaucoup de profondeur à l’équipe » et que, nécessairement, « ça la rend vraiment difficile à affronter ». « Nous avons trois trios qui peuvent mettre la rondelle dans le filet, qui jouent de la bonne et de la même manière, a de son côté noté Ryan Reaves. Nous avons un peu de tout dans notre alignement. »