Tard en troisième période, dimanche, avec les Canucks en avance 3-1, Martin St-Louis a rappelé Jake Allen au banc à la faveur d’un sixième patineur. L’heureux élu dans le rôle du sixième homme : Juraj Slafkovsky.

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Le même Slafkovsky qui, la veille, avait plutôt été cloué au banc en fin de troisième période quand le Canadien et les Bruins de Boston étaient à égalité 2-2.

La présence s’est mal terminée pour le sextuor, Brock Boeser a marqué dans un filet désert, Slafkovsky s’est donc fait coller un – 1 à sa fiche et les Canucks ont fini par triompher 5-2.

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Slafkovsky n’a pas volé cette affectation. Après une première période difficile où la rondelle semblait toujours glisser sur son bâton, il a retrouvé confiance et a conclu la soirée avec six tirs au but, et quatre autres de ses frappes ont été bloquées par des patineurs vancouvérois.

« Ça m’aide beaucoup dans mon jeu si je sais que je peux jouer à ce niveau, dans un deuxième match en 24 heures », a-t-il fait valoir après le match.

En l’envoyant dans la mêlée parmi les six patineurs en mission pour créer l’égalité, St-Louis a donné à Slafkovsky le renforcement positif que les chiffres ne lui offrent pas jusqu’ici cette saison. Après un mois, le premier choix du repêchage de 2022 ne compte qu’un but et une aide, avec un différentiel de – 6.

Le hic : dans le pays dirigé par Martin St-Louis, les touches ont cours légal. Dans ses points de presse, il parle constamment de touches. La statistique est aussi répertoriée à l’interne. La semaine dernière, avant le match contre le Lightning de Tampa Bay, un joueur nous expliquait que St-Louis avait souligné, en rencontre d’équipe, que Nikita Kucherov était premier dans la LNH pour le nombre de fois qu’un joueur touche la sacro-sainte rondelle.

Or, dans la tête de Slafkovsky, les bons vieux points comptent encore pour beaucoup. Prenez, par exemple, sa réponse quand on lui a demandé comment il gardait le moral même si la production offensive n’est pas au rendez-vous.

C’est quand les entraîneurs me disent : ‟tu n’as pas beaucoup de points, mais tu fais les bonnes choses”. Ça m’aide mentalement. Ça aide à se sentir mieux quand il te manque la chose la plus importante, les points. Les entraîneurs essaient de me soutenir et ça aide beaucoup.

Juraj Slafkovsky

St-Louis, lui, n’en démord pas. « Comparé à l’an passé, [Slafkovsky] est beaucoup plus à son aise sur la glace, il touche beaucoup plus à la rondelle, a expliqué le pilote du CH. Maintenant, la prochaine étape, c’est son efficacité avec ses touches. Mais c’est encourageant de voir le nombre de touches qu’il a. »

Autre joueur, autres mesures

Slafkovsky, rappelons-le, a 19 ans et 7 mois. L’éclosion d’un jeune qui ne s’appelle pas Connor peut cependant prendre un certain temps. À New York, par exemple, on en est à souhaiter que trois ans après son repêchage, Alexis Lafrenière soit en train de sortir de sa coquille, lui qui a inscrit dimanche ses sixième et septième buts de la saison, en 14 rencontres.

L’argument de l’âge ne peut toutefois pas être invoqué pour Josh Anderson, parce qu’à 19 ans et 126 mois, il devient fastidieux de garder le compte.

Anderson, donc, a lui aussi deux petits points en 15 matchs. Auteur d’un fort match samedi, il a encore livré un effort vaillant dimanche. « Il travaille, il patine bien et a une bonne attitude. Il provoque beaucoup de pénalités », a noté St-Louis.

Le coach cible ici une statistique pertinente. La pénalité à Tyler Myers dimanche était déjà la 14e qu’il provoquait cette saison. C’est bon pour le premier rang dans la LNH, rien de moins. Au sein d’une équipe dont l’avantage numérique est enfin productif, ce n’est pas une mince contribution.

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« Parfois, tu fais tout ce qu’il faut, mais la victoire n’est pas loyale », a avancé St-Louis, au milieu d’un chassé-croisé de réponses sur ses deux colosses ailiers en attente de résultats.

Elle ne l’a peut-être pas été dimanche à ses yeux, lui qui a jugé que le match aurait pu aller « d’un côté comme de l’autre », une opinion bien à lui.

Mais de façon globale, avec une fiche de 7-6-2 après le premier mois de la saison, la victoire n’a pas été particulièrement infidèle au CH, sachant que la majorité de ces victoires ont été enlevées à l’arraché. C’est 16 points en 15 matchs, 87 si on projette sur 82 matchs, soit une amélioration par rapport à l’an passé, mais une exclusion des séries.

Les succès ne sont donc peut-être pas loyaux à Slafkovsky et Anderson, mais on pourrait dire à l’inverse que des joueurs comme Cole Caufield et Mike Matheson ont été joliment récompensés sur le plan offensif malgré des hauts et des bas dans leur jeu.

La victoire n’est peut-être pas « loyale » lorsque l’on s’attarde aux cas individuels, mais dans l’ensemble, le Tricolore est relativement fidèle à ce que dit sa fiche. Bill Parcells n’a-t-il pas dit que « vous êtes ce que votre fiche dit que vous êtes » ?

En hausse

Jordan Harris

Sa présence était incertaine, 24 heures après qu’il a quitté le match en deuxième période. Il a répondu en livrant 20 minutes de jeu sobre, mais dénué d’erreurs majeures.

En baisse 

Tanner Pearson

Il s’est fait remarquer dès le départ avec un tir sur le poteau si convaincant que la sirène de but est partie. On l’a ensuite bien peu vu et il a écopé d’une pénalité en zone neutre. Pas la performance attendue face à son ancien club.

Le chiffre du match

 10

Discrètement, le défenseur Filip Hronek a obtenu un point dans un 10e match de suite. Les Canucks ne doivent certainement pas regretter son acquisition en voyant ses 16 points en 15 sorties.

Dans le détail

Pas de souci pour Casey DeSmith

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Casey DeSmith et Conor Garland

Casey DeSmith n’a fait que passer au sein de l’organisation du Canadien. Il a eu le temps de participer au tournoi de golf de l’équipe, mais est passé aux Canucks deux jours avant l’ouverture du camp d’entraînement pour éviter un ménage à quatre gardiens. Il est non seulement reparti avec une victoire, mais aussi avec un chandail du Canadien au numéro 29 de Ken Dryden, remis gracieusement par l’organisation montréalaise. « J’ai grandi [au New Hampshire] en admirant le Canadien, et Ken Dryden était mon idole, alors même s’il ne s’agit pas de mon ancienne équipe comme telle, chaque match contre elle au Centre Bell est spécial. En plus, j’ai rencontré Carey Price au tournoi de golf », a confié le sympathique gardien de 31 ans après la rencontre. On ne se bousculait pas aux portes pour l’obtenir, après qu’il a été largué par les Penguins de Pittsburgh pour alléger la masse salariale de l’équipe à la suite d’une saison misérable, mais son ancien DG à Pittsburgh et aujourd’hui président des Canucks, Jim Rutherford, l’avait connu lors d’années plus concluantes, et il s’est libéré d’une patate chaude lui aussi en envoyant Tanner Pearson au Canadien. Sans être fumant, DeSmith a bloqué 32 tirs et porté sa fiche à 4-0-1 avec une moyenne de 2,48 et un taux d’arrêts de ,923. « Je n’ai pas aimé le dernier but, de Xhekaj, mais je me sentais bien. Et les gars marquent les gros buts devant moi. »

Conor Garland peut encore produire

Avec le rachat de contrat du défenseur Oliver Ekman-Larsson l’été dernier, Conor Garland constitue le dernier vestige d’une affreuse transaction ayant coûté aux Canucks un 9e choix au total en 2021 et un choix de deuxième tour en 2022. Il serait déjà parti si Vancouver avait trouvé preneur, mais qui veut d’un attaquant plutôt unidimensionnel payé 4,9 millions par saison jusqu’en 2026 ? Après une saison de 46 points, dont 17 buts, Garland est ballotté entre le troisième et le quatrième trio, et il avait seulement 3 points en 14 matchs à sa fiche avant le match de dimanche au Centre Bell, mais il a marqué un joli but en début de deuxième en faisant dévier une passe de J. T. Miller et préparé celui de Dakota Joshua, le troisième des Canucks. Il a été nommé première étoile de la rencontre dans l’indifférence générale. « Je sais que vous regardez beaucoup les points, mais je suis satisfait de mon jeu depuis le début de la saison, s’est défendu l’athlète de 27 ans. Je m’adapte à mon rôle, selon ce que l’on me demande, et on a plusieurs joueurs capables de produire. »

Noah Juulsen s’accroche à la LNH

Le premier choix du Canadien en 2015, le défenseur droitier Noah Juulsen, a jadis été considéré comme un espoir de premier plan à Montréal, jusqu’à ce que de sérieuses blessures au visage, résultats de deux rondelles reçues coup sur coup de plein fouet, viennent faire dérailler sa carrière. Juulsen, 26 ans, s’est retrouvé à Vancouver il y a trois ans et a surtout joué dans la Ligue américaine, mais il s’accroche à un poste de septième défenseur cette année chez les Canucks. Il disputait dimanche son quatrième match de la saison seulement, ayant passé les autres sur la tribune de la presse. Avec la blessure subie par Carson Soucy, victime d’un tir de Juraj Slafkovsky, Juulsen a réussi à jouer 14 min 15 s, mais on l’a peu remarqué, si ce n’est pour sa pénalité pour bâton élevé à l’endroit de Nick Suzuki en troisième période.

Mathias Brunet, La Presse