Tout gardien avec un bon niveau de concentration va toujours donner des coups de bâton sur la patinoire pour signaler à ses coéquipiers qu’un joueur adverse s’apprête à sortir du banc des pénalités.

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Jeremy Swayman l’a fait samedi, à mesure qu’approchait la marque de 11 min 41 s au cadran en troisième période. À ce moment, ce n’était pas un, mais deux joueurs du Canadien qui sortaient simultanément du cachot. Sauf que le gardien des Bruins aurait très bien pu ménager son bâton. Le crescendo de la foule du Centre Bell a débouché sur un rugissement assourdissant quand Brendan Gallagher et Alex Newhook ont été libérés.

« C’était bruyant ce soir, a noté le défenseur Kaiden Guhle, auteur du but gagnant dans une spectaculaire victoire de 3-2 du Canadien contre les Bruins en prolongation. Ça applaudissait même quand eux marquaient, et ça allume un certain feu en toi quand tu vois que des partisans de l’autre équipe sont là. Ça te donne le goût de revenir plus fort à la prochaine présence. Ça ressemblait à un match des séries. »

Cette expérience n’est pas banale. Guhle est un des neuf joueurs du CH en uniforme dans ce match qui se sont établis en permanence dans la LNH après le parcours de l’équipe en finale de la Coupe Stanley en 2021. Ces joueurs comme Guhle, Juraj Slafkovsky, Arber Xhekaj et Justin Barron ont donc surtout connu une équipe moribonde, qui était écartée de la course aux séries avant même que la saison commence.

Des expériences comme celle de samedi, ils n’en ont pas vécu beaucoup dans la LNH.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

Brendan Gallagher (11)

« Quand on affronte Boston, c’est une des meilleures ambiances de la LNH, a noté le capitaine de l’équipe Nick Suzuki. Les deux équipes ont tout donné. C’est toute une rivalité. Ces dernières années, on jouait souvent sans enjeu au classement. C’est bien de disputer des matchs avec enjeu. »

Le rôle des vétérans

Dans le cadre du processus très assumé de reconstruction, Martin St-Louis a forcément hérité d’un mandat très clair de développement des joueurs. Doit-on rappeler que la saison dernière, huit joueurs recrues ont disputé au moins 30 matchs avec le Tricolore ?

Cela dit, le concept très large de développement ne se résume pas à simplement pousser les jeunes dans la fosse aux lions et les laisser apprendre de leurs erreurs. Slafkovsky, le bébé du groupe, n’a pas posé le pied sur la patinoire durant les huit dernières minutes de la rencontre.

St-Louis s’est mis à jongler avec ses trios en fin de match. Il envoyait souvent deux centres dans la mêlée, un gaucher et un droitier, parfois même lorsque les changements se faisaient pendant le jeu, simplement pour s’assurer d’avoir un centre apte à prendre une mise en jeu en zone défensive d’un côté ou l’autre de la surface.

Il reste trois ou quatre minutes, tu es en position de gagner. Quand tu es dans cette position, le développement ne fait pas partie de ça. Gagner, ça fait aussi partie du développement.

Martin St-Louis

Et si les jeunes ont pu remporter ce match, vivre cette expérience de battre les Bruins dans un duel relevé, à un moment de l’année où le classement compte encore, c’est parce que des vétérans ont montré le chemin à suivre. Sean Monahan, même sans obtenir de points, était de nouveau de tous les combats. Si Suzuki a pu marquer en troisième période, c’est parce que le numéro 91 s’est stationné devant Swayman.

Brendan Gallagher, dont le contrat a été racheté par des milliers de DG à la maison, a poursuivi son fort début de saison en livrant une performance comme il le faisait à 27 ans. Il a marqué dans sa position fétiche : à plat ventre près de la peinture bleue. Et il a fait perdre les pédales au gardien adverse, une autre de ses spécialités.

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Juraj Slafkovsky (20) et Hampus Lindholm (27)

« Depuis le début de la saison, Gally se ressemble beaucoup, a estimé St-Louis. Le succès qu’il a sur la feuille de pointage, je suis content. Mais tout ce qu’il apporte qui n’est pas sur la feuille, c’est encore plus important. »

Et comment ne pas penser à l’effet de David Savard, actuellement blessé, sur Guhle et Johnathan Kovacevic, qui se jetaient devant les tirs des Bruins comme si leur vie en dépendait ?

« Ça fait encore plus mal quand la rondelle passe à côté de toi », a assuré Guhle.

En ce samedi soir, les tirs bloqués ont mené à la victoire. Et la victoire, à la bonne humeur. « Guhle adore se jeter devant des tirs, juste pour me montrer ses ecchymoses le lendemain ! », a blagué Juraj Slafkovsky.

Comme ambiance de développement, ça bat certainement un vestiaire silencieux après une défaite.

En hausse : Josh Anderson

Ça ne veut juste pas rentrer pour lui. Mais il a obtenu des chances, a aidé son club à contrôler la rondelle en avantage numérique. Et il aurait très bien pu obtenir une passe sur le but vainqueur.

En baisse : Mike Matheson

En multipliant les cafouillages et mauvaises décisions, il a vite fait oublier sa performance de trois points de jeudi.

Le chiffre du match : 1467

C’est le nombre de jours qui s’étaient écoulés depuis la dernière victoire du Canadien contre les Bruins. C’était le 5 novembre 2019. Brendan Gallagher, Nick Suzuki et Joel Armia (laissé de côté samedi) sont les seuls survivants de cette époque.

Dans le détail

Harris blessé

Le Canadien a terminé la rencontre avec cinq défenseurs puisque Jordan Harris a quitté le match en fin de deuxième période et n’est pas revenu au jeu. Après le match, le Tricolore a annoncé qu’il souffrait d’une blessure au haut du corps. Aucun autre détail n’est connu. À sa dernière présence, avec six minutes à jouer en deuxième période, il s’est vu attribuer une mise en échec sur Trent Frederic. Le CH ne comptait que six défenseurs dans son effectif, avec deux attaquants et un gardien comme surnuméraire. Or, le Rocket est à Winnipeg pour y affronter le Moose dimanche et lundi. Si Harris doit rater le match de dimanche, le joueur rappelé devra donc vraisemblablement prendre un vol de trois heures pour rentrer à Montréal, avant d’affronter les Canucks.

Pastrnak actif !

David Pastrnak est un des tireurs les plus habiles de la LNH et il comprend visiblement son rôle. L’ailier vedette des Bruins a tenté 19 tirs (!) vers Samuel Montembeault. Le gardien du Canadien en a bloqué six, trois ont raté la cible (dont un sur le poteau) et les patineurs de Montréal en ont bloqué 10. À lui seul, Kaiden Guhle s’est jeté devant quatre frappes du Tchèque. Il a conclu son match avec une passe sur le but de Brad Marchand, mais c’était lui qui était au banc des pénalités quand le Tricolore s’est inscrit au pointage en début de troisième période…

Des pénalités en zone offensive

À ce sujet, Pastrnak a été puni pour un bâton élevé, un geste qu’il a commis en zone offensive. On a parlé en long et en large de la fameuse culture des Bruins samedi matin, mais il reste que cette équipe de vétérans n’est pas exempte de mauvais plis. Ainsi, ces pénalités en zone adverse, qui ont tant fait mal au Canadien en début de saison, sont venues hanter les Bruins cette fois. Pastrnak et le nouveau capitaine Brad Marchand ont donc tous les deux été chassés sur des séquences qui se déroulaient à 150 pieds de leur filet. Comme quoi ça arrive même aux meilleurs.