La patience est une vertu, dit-on. Et Jeff Gorton souhaite que les observateurs, qu’ils soient journalistes, analystes ou partisans, soient vertueux. « Il faut relaxer et le laisser se développer. »

Le vice-président exécutif aux opérations hockey a livré un vibrant plaidoyer pour la patience, vendredi, en entrevue avec La Presse.

La patience dans le cas précis de Juraj Slafkovsky, le tout premier choix du repêchage de 2022. Avec 10 points en 39 matchs la saison dernière, le grand Slovaque n’a pas exactement connu l’entrée fracassante que d’autres avant lui ont eue.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Juraj Slafkovsky a été le tout premier choix du repêchage de 2022, par le Canadien de Montréal.

« C’était un joueur de 18 ans, premier choix dans un marché où tout le monde est au courant de ce qu’il fait sur la glace et à l’extérieur. Ce serait un gros ajustement pour n’importe qui, tempère Gorton. Il apprend et il s’améliore. Dans les matchs préparatoires et dans nos entraînements, on voit tous sa croissance. Mais à 18 ou 19 ans, ça n’arrive pas du jour au lendemain.

Je ne demande pas de la patience pour tout. Mais quand un joueur de 18 ans débarque à Montréal, il faut relaxer et le laisser se développer. Il peut devenir un très bon joueur dans cette ligue.

Jeff Gorton, vice-président exécutif aux opérations hockey

« Je ne veux pas le chiffrer en nombre de buts, mais c’est un attaquant de puissance qui pourra être bon en échec avant, pour marquer des buts et qui sera bon sur 200 pieds. C’est beaucoup pour les adversaires. »

L’impact des premiers choix au total est indéniable, même si on exclut l’exceptionnel Connor McDavid. En 2022, Nathan MacKinnon a mené l’Avalanche aux grands honneurs. Mais c’était neuf ans après sa sélection. L’an dernier, les Devils sont devenus une des bonnes équipes de l’Est avec l’explosion de Nico Hischier et Jack Hughes, repêchés respectivement en 2017 et 2019. Mais ils ont simplement gagné un tour éliminatoire.

Ces joueurs, cela dit, n’ont pas été dominants dès le jour 1. MacKinnon a connu trois saisons quelconques après avoir remporté le trophée Calder. Hughes a amassé 21 points en 61 rencontres à sa première saison. Hischier était un joueur d’une cinquantaine de points par saison, avant d’en empiler 80 la saison dernière.

« J’ai eu Joe Thornton à Boston, a rappelé Gorton, nous ramenant à l’époque où il s’occupait du recrutement chez les Bruins. Regarde ses statistiques à sa première année. Ce n’était pas extraordinaire. Il avait eu trois buts et quatre passes [en 55 matchs]. Plus personne n’en parle, maintenant qu’il se dirige vers le Temple de la renommée. »

Laissons-lui du temps, laissons-le respirer. N’évaluons pas chacune de ses présences, chacun de ses contacts avec la rondelle. Et ne talonnons pas Martin [St-Louis] s’il ne l’utilise pas 25 minutes par match.

Jeff Gorton

Gorton assure qu’un séjour à Laval n’est pas dans les plans pour Slafkovsky, même s’il ne faut « jamais dire jamais ».

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Juraj Slafkovsky

Il reste qu’un premier choix au total définit le règne d’un directeur général. Mais il s’agit d’un processus à long terme. On ne peut d’ailleurs toujours pas fermer les livres sur le séjour de Gorton à New York puisqu’Alexis Lafrenière, bientôt 22 ans, tente toujours de s’établir comme un attaquant de premier plan.

Engström et deux espoirs russes

Ces dernières semaines, il a été question en long et en large des nombreux espoirs de l’organisation invités au présent camp d’entraînement. On a forcément moins parlé des espoirs qui n’y sont pas.

La question posée à Gorton était la suivante : qui, parmi vos espoirs dans la NCAA et en Europe, vous emballe le plus ? Sa première réponse : Adam Engström, défenseur gaucher réclamé au 3e tour (92e au total) l’an dernier, qui évolue à Rögle, en première division suédoise. « Il a vraiment très bien joué ces deux dernières années, a dit Gorton de celui qui aura 20 ans en novembre. Sa courbe de progression est très bonne. »

Gorton dit « espérer » qu’Engström débarque en Amérique du Nord à l’automne 2024.

PHOTO JOSIE DESMARAIS, ARCHIVES LA PRESSE

Adam Engström, lors de son passage au camp de perfectionnement des espoirs du Canadien, au complexe d’entraînement de Brossard, en juillet dernier

Gorton a ensuite évoqué « les deux Russes que nous avons repêchés cette année ». Il a commencé par Yevgeni Volokhin, un gardien qui affiche un taux d’efficacité de ,927 dans la MHL, un circuit junior en Russie. « Le gardien a capté notre attention. Son pourcentage d’arrêts est excellent, il connaît un très bon départ. »

L’autre Russe, c’est Bogdan Konyushkov. Repêché à 20 ans, celui-ci, au 4e tour l’été dernier. Konyushkov évolue à Nijni Novgorod et, à 24 min 32 s par match en moyenne, il est le défenseur le plus utilisé de la KHL cette saison. « Il connaît tout un départ », s’émerveille Gorton.

Étonnamment, le VP n’a rien dit de Lane Hutson, défenseur de petite taille qui a tout fracassé à Boston University la saison dernière, et ce, même si la NCAA était explicitement évoquée dans la question.

Roy et Reinbacher

Et au camp, qui sont les espoirs qui se démarquent le plus ?

« Il y en a plusieurs. David Reinbacher a été très bon pour un jeune de 18 ans qui arrive dans ces circonstances. [Lundi] soir, il y a des moments où il a démontré beaucoup de calme. »

Gorton a ajouté que « la valeur de Joshua Roy est en hausse. Il joue du gros hockey depuis le Championnat du monde junior. Ses succès avec Connor Bedard ont été énormes pour lui ».

Gorton a ajouté une mention honorable à Justin Barron, « qui joue très bien ».

Trois gardiens ?

Jeff Gorton n’exclut pas une formation à trois gardiens pour amorcer la saison. « S’il faut le faire, on le fera, a-t-il lancé. Les gens se font des idées, mais on verra. »

Le Tricolore pourrait opter pour cette voie s’il craint de perdre Cayden Primeau au ballottage. Le gardien de 24 ans a atteint l’étape où il doit passer par le ballottage avant d’être cédé à Laval.

L’avenir de Houle

Parlant de Laval, Jean-François Houle amorce la dernière année de son contrat. Avec la quantité d’espoirs qui débarqueront à la Place Bell cette saison et l’an prochain, le poste d’entraîneur-chef du club-école deviendra névralgique. Le travail de Houle semble apprécié.

« On va en parler très prochainement, assure Gorton. Je n’ai pas d’échéancier. Chaque année, on a des employés dont il faut gérer les contrats. Ce n’est pas quelque chose dont on discute ouvertement. JF fait du très bon travail. On va lui parler bientôt, je l’espère, et régler ça. »

Un rôle de plus pour Gorton

Enfin, avec le départ de Michael Andlauer pour Ottawa, Gorton hérite d’une nouvelle responsabilité : celle de gouverneur adjoint. C’est donc dire qu’il pourra représenter le Canadien lors des réunions du bureau des gouverneurs de la LNH.

Geoff Molson porte le titre de gouverneur du Canadien, tandis que Gorton et France Margaret Bélanger sont gouverneurs adjoints.

Lisez « Des matchs importants en mars, “ un objectif ” » Lisez la chronique d'Alexandre Pratt : « Comment fonctionne le Canadien »