(San Jose, Californie) Combien de fois avons-nous vu un marqueur afficher des signes de nervosité lorsqu’une disette s’étire ? Des jeux précipités, des décisions malheureuses, des tirs au potentiel de succès quasi nul…

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Denis Gurianov aurait eu toutes les raisons de ressembler au joueur décrit au paragraphe précédent. À sa première audition avec le Canadien, ça n’a pas été le cas. Bien qu’il ne se soit pas inscrit au pointage dans la victoire de 3-1 de sa nouvelle équipe contre les Sharks de San Jose, il a été l’attaquant le plus dangereux de son camp.

Et avec six tirs cadrés et un peu plus de 17 minutes passées sur la glace, il a établi deux sommets individuels pour lui cette saison.

Seulement en deuxième période, il aurait certainement pu marquer trois buts. Il s’est fait voler par le gardien Kaapo Kahkonen après avoir débordé Erik Karlsson, et encore quelques instants plus tard après une belle passe de Nick Suzuki. Puis Kaiden Guhle lui a servi une savante passe transversale, mais son tir sur réception a raté le filet.

Dans toutes situations, il n’avait certainement pas l’apparence d’un joueur qui n’a pas été crédité d’un but depuis le 10 décembre.

« C’est quand même un nouveau départ pour lui, a rappelé l’entraîneur-chef Martin St-Louis. Habituellement, tu es excité, enthousiaste, et tu apportes de l’émotion. On a vu ça, ce soir. Je pense qu’il est content de son match, et ça, c’est bon pour un départ dans une nouvelle équipe. »

Gurianov, en effet, a semblé fort satisfait de cette première sortie dans l’uniforme bleu blanc et rouge. Il a souligné « l’accueil chaleureux » que lui ont réservé ses coéquipiers et vanté le bon « IQ du hockey » de Nick Suzuki, son joueur de centre attitré. Les deux, d’ailleurs, ont semblé de plus en plus à l’aise ensemble à mesure que le match avançait. Leur complicité (ou non) avec Mike Hoffman fera (ou non) l’objet d’un autre texte.

Jake Allen n’était pas du tout surpris de voir la grande forme affichée par Gurianov. Pour l’avoir vu à l’œuvre quelques fois lorsqu’il évoluait pour les Blues de St-Louis, il peut témoigner que le Russe est « tout un joueur », et ce, en dépit de son piètre rendement offensif cette saison. « Quand on jouait contre lui, il était une menace sur la glace, a souligné Allen. Présentement, il se remet en marche, dans un nouvel environnement. Vu la manière dont Martin [St-Louis] aborde notre jeu, il va connaître du succès. Il a tout le talent du monde, il peut voler sur la glace. »

Allen a en outre raconté avoir été victime de « quelques beaux buts » de Gurianov par le passé. Vérification faite, l’ailier a déjoué une seule fois son nouveau coéquipier. Mais il s’agissait, en effet, d’un bel effort individuel.

Voyez la séquence

St-Louis, en outre, s’est réjoui d’avoir vu à l’œuvre un joueur qui ne s’est pas gêné pour foncer au filet, qui a démontré « de bonnes habitudes sans la rondelle » et qui, par le fait même, « n’est pas unidimensionnel ». « C’est emballant pour un coach », a-t-il ajouté.

On saura bien vite si Gurianov pourra reproduire avec constance l’échantillon de mardi soir. Dans tous les cas, l’expérience s’est amorcée du bon pied.

Guhle, comme si de rien n’était

Bien que Kaiden Guhle ait dit avoir eu besoin de quelques présences pour chasser la rouille, ça n’a pas trop paru sur la patinoire.

Lui non plus n’a pas montré les signes qu’on aurait pu anticiper d’un joueur dans sa situation, celle d’un défenseur qui n’a pas joué depuis deux mois. « Il a un peu couru après son souffle, mais c’est normal », a fait remarquer Allen en riant.

Il s’attend à voir le jeune défenseur, « un cheval, un gars naturellement doué », retrouver son rythme en un rien de temps. Il prédit même qu’il sera « à 100 % » d’ici la fin de la semaine.

Guhle, lui, a parlé d’un match « amusant à disputer », au cours duquel il a marqué le but égalisateur en troisième période. Il a déjoué Kahkonen d’un puissant tir frappé décoché en fonçant en zone adverse, en support aux attaquants.

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Kaiden Guhle a célébré avec David Savard après avoir marqué le but égalisateur en troisième période.

Plus tôt dans la journée, il avait expliqué avoir vu le jeu pratiqué par son équipe évoluer pendant sa convalescence qui l’a obligé à regarder bon nombre de matchs du haut de la passerelle. Au cours des dernières semaines, on a justement vu la contribution offensive des défenseurs augmenter radicalement. « Tout le monde est davantage sur la même longueur d’onde, a-t-il constaté. C’est ce qu’on veut au sein d’une bonne équipe. »

Le Canadien n’est peut-être pas rendu au stade d’être considéré comme « une bonne équipe », mais mine de rien, il vient de remporter trois victoires à ses quatre derniers matchs, et six victoires à ses neuf derniers.

Ce n’est pas une bonne nouvelle pour les obsédés de l’autosabottage (tanking), qui rêvent à une infinité de défaites pour terminer au dernier rang du classement général. Mais si les expériences positives s’accumulent, comme celle de Gurianov, de Guhle, mais aussi de Justin Barron et de Jordan Harris, entre autres, ce n’est sans doute pas du temps perdu non plus.

En hausse

Rem Pitlick

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Rem Pitlick

Il a joué avec un rare aplomb. Son explosion sur le but d’Ylönen tirait l’admiration, et il a presque provoqué une autre échappée en fin de parcours.

En baisse

Johnathan Kovacevic

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Johnathan Kovacevic (26)

Brouillon et maladroit toute la soirée. Les Sharks lui ont surtout opposé leurs deux premiers trios, et ça les a bien servis.

Le chiffre du match

27

Avec trois tirs bloqués, Rafaël Harvey-Pinard en compte désormais 27 cette saison, et ce, en 16 rencontres. C’est, de loin, le rythme le plus élevé chez les attaquants du club.

Dans le détail

Allen tout feu tout flamme

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Jake Allen (34) a réalisé 38 arrêts dans le match de mardi soir à San Jose.

Longtemps, en première moitié de saison, Jake Allen a cherché ses repères. Force est de constater qu’il les a trouvés. Avec ses 38 arrêts réalisés à San Jose, le gardien présente désormais une fiche de quatre victoires contre un seul revers depuis la longue pause de l’équipe au début du mois de février. Pendant cette séquence, sa moyenne de buts alloués s’est établie à 2,00 et son pourcentage d’arrêts, à,937. À propos de sa performance de mardi soir, Allen a simplement dit qu’il faisait « son travail ». « Il y avait beaucoup d’allers-retours en deuxième période, les deux équipes ont obtenu des chances et c’est devenu une bataille de gardiens, a-t-il dit après la rencontre. [Malgré le déficit de 1-0], on est restés dans le match et on a trouvé le moyen de finir le travail. C’était un bel effort de groupe. » Martin St-Louis a été plus direct et indiqué qu’Allen avait été « une grosse raison pour laquelle on a gagné ».

L’autre nouveau départ de Johnsson

À ses débuts chez les Maple Leafs de Toronto, Andreas Johnsson était promis à un bel avenir. Ce rapide ailier avait été dominant dans la Ligue américaine et avait inscrit 20 buts à sa première saison complète dans la LNH. La suite des choses, toutefois, a été moins rose. Devenu l’attaquant en trop à Toronto, il a été échangé aux Devils du New Jersey, équipe avec laquelle, après un départ lent, il a bien rebondi la saison dernière en inscrivant 35 points en 71 matchs. Or, les Devils ont rénové la maison en entier, et là aussi il a perdu son poste. Il a donc passé l’écrasante majorité de la présente campagne dans la Ligue américaine. Il a été rappelé le temps de deux rencontres et a été employé moins de 10 minutes… au total. Arrivé à San Jose par le truchement de l’échange monstre impliquant Timo Meier, un autre nouveau départ s’offre à lui. À son premier « vrai » match dans la LNH depuis des lustres, dans un club faible il est vrai, il a semblé à sa place à la gauche de Tomas Hertl, passant 16 min 33 s sur la glace et obtenant trois tirs au but.

Devant des gradins vides

Si la vie vous fait passer par San Jose et que vous cherchez une activité au bas prix, faites-vous le cadeau d’un match des Sharks. Quelques minutes avant le début de la rencontre de mardi, des billets se détaillaient à moins de 20 $. Et vous n’aurez pas à vous bagarrer pour mettre la main sur ces entrées, visiblement peu en demande. Contre le Tricolore, on a annoncé une assistance de 11 424 personnes, dans un aréna qui peut en contenir plus de 17 500. Juste là, on comprendrait que les gradins étaient clairsemés. Or, la réalité, c’est qu’il y avait sans doute encore moins de monde que ça. Quelques-unes des sections supérieures étaient quasi vides. Plus bas, des rangées complètes étaient désertes. Le sujet ne rajeunit pas, puisqu’on avait soulevé la même chose lors du dernier passage du CH à San Jose, en octobre 2021. Néanmoins, à ce point-ci, c’est tristement spectaculaire, surtout dans un marché qui a déjà été reconnu comme l’un des plus passionnés de la LNH.

Ils ont dit

C’était cool de marquer, évidemment, malgré que c’était un but bizarre. Je suis content de contribuer quand l’équipe gagne.

Kaiden Guhle

[Jake Allen] a été surréel, il a été bon toute la saison. Il est une raison importante pour laquelle on a gagné ce soir.

Jesse Ylönen

On aurait pu être frustrés après les deux premières périodes, ç’aurait pu mal tourner, mais notre groupe a gardé le bon état d’esprit. On a joué de manière responsable en troisième période. On a eu quelques bonnes chances et on a capitalisé. Ensuite, on leur a fermé la porte.

Jake Allen

Les deux premières périodes ne m’ont pas dérangé, mais on laissait beaucoup [de chances] sur la table. On n’éxécutait pas bien. On avait besoin d’une meilleure troisième période, et on l’a eue. Les gars n’ont pas triché. Ils ont fait confiance à notre style de jeu.

Martin St-Louis

On a beaucoup de plaisir en ce moment. Les gars s’amusent, ils sont engagés, ils jouent les uns pour les autres. Ils s’encouragent malgré les erreurs. L’ambiance est très bonne, et c’est ce qu’on veut construire.

Martin St-Louis