Être une équipe indisciplinée est un problème. Avoir de la difficulté en désavantage numérique en est un autre. Manquer de discipline ET donner des buts à profusion à court d’un homme, ça ressemble à un gros problème. Ou à deux raisons d’éviter le banc des pénalités.

Le Canadien se retrouve dans cette très inconfortable position. Ses 172 pénalités mineures le placent au neuvième rang de la LNH cette saison (avant les matchs de vendredi soir), tout près des équipes de tête à ce chapitre. Et il arrive au 27e échelon du circuit en désavantage numérique (73,7 %).

Comme les deux problèmes ne sont pas liés par une relation de cause à effet, il faut les aborder individuellement. Le plus évident, dirons-nous, serait d’écoper de moins de punitions. Difficile, en effet, de faire pire que jeudi soir dernier contre les Panthers de la Floride, qui ont profité de huit chances en avantage numérique pour marquer quatre buts. Le CH a passé pas moins de 13 min 36 s à se défendre avec un ou deux patineurs en moins.

Ce n’est donc pas pour rien que l’entraîneur Martin St-Louis, vendredi, a appelé ses hommes à afficher « plus de contrôle ».

Il faut jouer avec émotion, mais il ne faut pas se perdre. On s’est perdus dans ce match-là. Je pense que c’est normal pour une jeune équipe, mais il faut réparer ça. On va essayer de trouver des manières pour aider le groupe à rester plus calme.

Martin St-Louis, entraîneur-chef du Canadien

Il faut aussi se méfier de la surenchère, a fait valoir Samuel Montembeault. « Quand on commence à écoper de punitions, ou que les décisions ne vont pas de notre côté, on se laisse emporter et on écope d’encore plus de punitions ou bien on fait des erreurs qui mènent à des pénalités. » Contre les Maple Leafs de Toronto et les Bruins de Boston, prochains adversaires du CH, il faudra rester loin du cachot, a-t-il ajouté.

Toutes ces minutes passées à se défendre peuvent aussi avoir un effet usant, a souligné St-Louis. Jeudi, les défenseurs Joel Edmundson et David Savard ont chacun passé presque 10 minutes à quatre (ou trois) contre cinq.

Auditions

Si l’appel au sang-froid n’est pas entendu, il restera toujours l’option de resserrer le jeu en désavantage numérique. Ici, ce n’est pas gagné.

Après son cauchemardesque voyage dans l’ouest du temps des Fêtes, le Canadien avait connu une séquence plutôt heureuse sur ce plan. En six rencontres, du 5 au 15 janvier, il a conservé un taux d’efficacité fort respectable de 82,4 %.

Le voyage à New York du week-end dernier a toutefois coûté cher. Jake Evans et Joel Armia en sont revenus blessés, et ils rateront plusieurs matchs – surtout Evans, dont l’absence est évaluée à 8 à 10 semaines. Depuis qu’ils sont tombés au combat, leur équipe a flanché 5 fois en 10 occasions (50 %).

Leur perte est lourde sur le plan qualitatif et complique la gestion de l’effectif. Evans (1er) et Armia (3e) sont parmi les attaquants réguliers les plus sollicités à court d’un homme depuis le début de la saison (en utilisation moyenne par match). Le suivant sur la liste est Sean Monahan, lui aussi blessé.

En leur absence, il sera difficile de surtaxer encore davantage Christian Dvorak, qui s’est échiné pendant presque six minutes et demie en désavantage numérique contre les Panthers. Nick Suzuki et Josh Anderson, qui étaient des employés de soutien dans ce domaine, ont déjà vu leur tâche augmenter. Mais ils ne peuvent tout faire.

On a donc déjà donné des chances à Kirby Dach, Jesse Ylönen, Michael Pezzetta et Rem Pitlick, avec des niveaux de succès variables. Dach, par exemple, n’a été sur la glace pour aucun but dans ces circonstances en presque trois minutes. Une belle découverte.

Même s’il vient à peine d’être rappelé du Rocket de Laval, Rafaël Harvey-Pinard a été mis à contribution, jeudi. Avec 4 min 16 s, il n’a été devancé que par Dvorak et Suzuki. C’est beaucoup pour un joueur rapatrié seulement l’avant-veille et dont l’expérience dans la LNH se résumait jusque-là à cinq matchs.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

Rafaël Harvey-Pinard

L’adaptation se fait « graduellement », a expliqué le Saguenéen, vendredi. Dans les rangs juniors et dans la Ligue américaine, il a joué à profusion dans ce type de situation. Or, les systèmes de jeu ne sont pas les mêmes à Laval et à Montréal. Surtout, « le niveau d’exécution est beaucoup plus rapide dans la LNH ». « Sur les passes transversales, il faut que tu sois aux aguets. »

Harvey-Pinard s’assure donc de « poser beaucoup de questions aux entraîneurs qui s’occupent du désavantage numérique ». « Comme ça, tu sais ce que tu fais de bien ou de moins bien. Ça passe beaucoup par la communication », a-t-il précisé.

Le jeune homme, au fait, profite déjà de la bénédiction de David Savard. Le vétéran, expert en la matière, voit en son compatriote un joueur « intelligent, capable de faire de bonnes lectures ». Se démarquer en désavantage numérique « peut lui donner un peu plus de temps de glace et l’aider à rester dans la LNH », a-t-il estimé.

Le même Savard, par ailleurs, invite à la prudence dans l’analyse des statistiques récentes. Oui, le CH a donné quatre buts aux Panthers. Mais trois de ceux-ci sont survenus dans les 20 dernières secondes de la punition. « Un dégagement de plus et on était corrects », a-t-il imagé avec beaucoup de justesse.

« Ça nous a fait mal », a-t-il conclu. Avec beaucoup de justesse aussi.

En bref

But controversé, la suite

Au lendemain de la défaite aux mains des Panthers, le controversé premier but du match a continué de faire jaser dans le vestiaire du Tricolore. Sam Reinhart a ouvert la marque dans une cage abandonnée, alors que Matthew Tkachuk bloquait la voie à Samuel Montembeault. La LNH a argué que la présence de Tkachuk n’avait « eu aucun impact sur le but », manière de dire que le gardien n’aurait pas fait l’arrêt de toute façon. Montembeault a avoué avoir laissé échapper « quelques sacres » sur le coup, mais a parlé d’une « zone grise », difficile à interpréter. Il s’est surtout désolé de la suite des évènements — un autre but des Panthers a suivi dans les secondes suivantes. Martin St-Louis, lui, a dit qu’il allait « apprendre de ça », qu’il tenterait de mieux calibrer ses contestations à l’avenir. Encore faudrait-il que le règlement soit appliqué avec constance, pourrions-nous ajouter. Ce qui n’est pas acquis.

Mike Matheson mis à l’amende

Le défenseur Mike Matheson sera soulagé de 5000 $ à la suite d’une mise en échec qu’il a faite à Eric Staal, des Panthers. En première période, l’attaquant tentait de rejoindre Matheson en territoire du Canadien pour s’emparer de la rondelle. Le défenseur montréalais avait clairement l’avantage, mais a freiné pour servir un coup d’épaule à son poursuivant. Le choc, que Staal n’attendait pas, a été brutal, et le vétéran a quitté le match. Aucune punition n’a été attribuée sur la séquence, alors que le geste d’obstruction était flagrant. C’est d’ailleurs par ce motif que le département de la sécurité des joueurs de la LNH justifie l’amende.

Savard perplexe

Vu son calme naturel, il était assez surprenant de voir David Savard aussi furieux, en troisième période, d’avoir écopé d’une punition mineure pour rudesse, à laquelle s’est ajoutée une inconduite de 10 minutes. On l’a vu claquer la porte du banc des pénalités après avoir argumenté avec l’arbitre. À ses doléances, l’arbitre n’a pas vraiment offert « de bonne réponse », a-t-il raconté vendredi, visiblement prudent dans ses déclarations. « J’ai encore de la misère à comprendre pourquoi j’ai eu un 10-minutes, je ne trouvais pas la réponse [de l’arbitre] très valable. Mais c’est tel que tel. Il y a eu beaucoup de frustration dans ce match, après ce qui est arrivé en deuxième période. C’est à moi de montrer l’exemple. »