(New York) Samuel Montembeault a toujours le sourire facile. À une position où plusieurs athlètes ont des personnalités particulières, parfois dures à cerner, le Québécois détonne par sa candeur et son côté décontracté, dans la victoire comme dans la défaite.

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Après le match de dimanche, il a démontré qu’il possédait toutefois l’attention aux détails typique de bien des hommes masqués.

Pendant sa mêlée de presse dans le vestiaire des visiteurs du Madison Square Garden, un collègue lui faisait remarquer qu’il venait de disputer deux matchs en 22 heures, et qu’il avait reçu près de 80 tirs dans ces deux matchs.

« En fait, j’ai eu 160 tirs dans ma semaine, corrige-t-il, du tac au tac. C’est du bon volume ! »

Montembeault avait alors raison, car la LNH n’avait pas encore finalisé les statistiques de la victoire de 2-1 du Canadien sur les Rangers. La ligue donnait alors 40 tirs aux Rangers, mais en a finalement enlevé un ; 159 tirs, donc. Ce n’est qu’un détail anodin, mais en cette ère des faits alternatifs, il importe de montrer l’exemple.

Bref, c’est une semaine bien remplie pour Montembeault. Il a relevé le défi avec brio, ne permettant que 9 buts sur ces 159 tirs, pour une efficacité de ,943. Il en ressort avec deux victoires et deux défaites, un résultat tout à fait correct compte tenu de l’état des forces devant lui.

Sa première victoire de la semaine, face aux Predators, n’avait pas la même saveur. Son vis-à-vis était Yaroslav Askarov, un gardien hyper prometteur, mais qui disputait son premier match dans la LNH, et les Predators n’ont pas exactement le punch offensif des New-Yorkais.

Dimanche, Montembeault était opposé à Igor Shesterkin. Le même Shesterkin qui a remporté le trophée Vézina la saison dernière. Un type assez populaire à Manhattan pour que les partisans des Rangers scandent des « I-gor, I-gor » après ses arrêts spectaculaires, de la même façon qu’ils criaient « Hen-rik, Hen-rik » à une autre époque.

Le prénom du Russe a résonné dès les premières minutes du match, mais à l’autre bout, Montembeault était tout aussi solide.

« Moi aussi, j’ai fait des arrêts au début, ça m’a aidé à me mettre dans le match, a souligné Montembeault. Donc je voulais encore plus le battre. Il est tellement calme, il est dur à battre sur des lancers directs. Il fallait le faire bouger. »

Ça s’est poursuivi ainsi toute la soirée. Pour marquer leur seul but, les Rangers ont dû bourdonner pendant une bonne minute, à six contre cinq parce qu’il y avait une pénalité à retardement. À l’autre bout, Shesterkin a bloqué deux échappées, en plus de quelques arrêts contre des joueurs – Jonathan Drouin et Evgenii Dadonov – tout simplement oubliés devant lui. Pour le déjouer, il a fallu un tir des ligues majeures de Kirby Dach, et un à bout portant de Cole Caufield.

Bref, pour ceux qui savent apprécier un bon duel de gardiens, le spectacle valait le prix.

« Moi, en tant que gardien, c’est sûr je veux qu’on score plein de buts. Mais de voir un bon spectacle de gardiens qui font des beaux arrêts, c’est le fun. J’aime mieux les matchs de 2-1 ! »

En santé cette fois

Le monde du sport est rempli d’exemples de joueurs qui ont saisi leur chance, au détriment des absents. Parlez-en au pauvre Wally Pipp, qui serait peut-être encore aujourd’hui le premier-but des Yankees si Lou Gehrig ne lui avait pas ravi son poste.

Mais encore faut-il pouvoir la saisir, cette chance. L’hiver dernier, tous les gardiens du Canadien finissaient par être sur la touche, de Carey Price à Jake Allen en passant par Andrew Hammond. Montembeault était lui aussi incommodé, mais il a joué malgré sa blessure à un poignet et a repoussé l’opération à mai. Sauf qu’il a au passage conclu la saison avec une efficacité de ,891.

« On avait tellement de gardiens blessés, j’avais ma chance. C’était dur de me préparer chaque soir. C’était une chance d’apprendre, mais ce n’était pas une saison facile, on a vécu beaucoup de montagnes russes d’émotions. Je suis content que ça se passe beaucoup mieux cette année. »

Un an plus tard, le CH doit encore se fier à outrance au gardien de Bécancour, en l’absence d’Allen, blessé. Le retour de ce dernier semble imminent, mais d’ici là, Montembeault est l’option imposée. Cayden Primeau se cherche à Laval et revient d’une blessure. Martin St-Louis a donc laissé entendre avant le match que ce n’était pas le contexte idéal pour l’envoyer dans la mêlée, même si cela signifiait une fin de semaine chargée pour le numéro 35.

Après la défaite de samedi, Éric Raymond a donc parlé à Montembeault. « Pour me demander comment ça allait et si j’étais correct pour jouer aujourd’hui, détaille le gardien. Il m’a dit qu’il poussait pour que ce soit encore moi, donc je suis content que ça ait bien été. »

La fin de la saison du Canadien en sera une de développement. On parle souvent des défenseurs qui doivent faire du millage, mais ça compte aussi pour les gardiens. Particulièrement pour celui qui n’a encore que 80 matchs d’expérience dans la LNH.

En hausse 

Jordan Harris

On parle peu de lui en raison de son style effacé, mais il demeure très habile à défendre son territoire avec son bâton toujours bien placé et son coup de patin.

En baisse

 Johnathan Kovacevic

Il connaît des moments plus difficiles dernièrement. Une de ses erreurs a forcé son coéquipier Joel Armia à écoper d’une pénalité. Son temps de jeu est réduit ; il n’a joué que 13 minutes face aux Rangers, 11 la veille.

Le chiffre du match

 23

En préparant le but de Kirby Dach, Cole Caufield a mis fin à une étrange séquence de 23 matchs sans avoir obtenu de mention d’aide. Il compte maintenant 26 buts et 10 passes. Jared McCann (22 buts, 8 passes) est son rival le plus sérieux pour le Cy-Young du hockey.

Dans le détail

PHOTO ADAM HUNGER, ASSOCIATED PRESS

Kirby Dach (77)

Audition réussie pour Armia…

Trouver un compagnon de trio adéquat, qui ne s’appelle pas Kirby Dach, n’est pas évident. Si l’émission Relevez le défi était encore en ondes, Martin St-Louis pourrait très bien se présenter devant Gaston Lepage et lui soumettre ce défi. Pour la deuxième fois de la saison, et après quelques expériences infructueuses l’an dernier, c’était au tour de Joel Armia d’avoir sa chance. Le gros numéro 40 a bien joué son rôle et a permis à ses deux coéquipiers de s’illustrer. « Comme Dach, il est capable de gagner des batailles pour la rondelle. Ce ne sont pas des joueurs identiques, mais ils ont des ressemblances dans certaines catégories. Armia a joué un bon match », a estimé St-Louis.

… Et pour Dach

S’il est si important pour St-Louis de retrouver le bon complément pour Suzuki et Caufield, c’est parce qu’il a besoin de Kirby Dach au centre. Le CH ne compte plus que quatre centres en santé, et encore, c’est en calculant Jonathan Drouin, qui est davantage un ailier. Dach a lui aussi réussi sa mission. Malgré le fait qu’il affrontait souvent le dangereux Artemi Panarin, le trio de Dach a limité les dégâts. Quand Dach était sur la patinoire à 5 contre 5, le Canadien et les Rangers ont fait jeu égal aux chances de marquer à haut danger, 3-3. Et surtout, Dach était au cœur de l’action pour ces occasions, démontrant son grand talent en possession et en protection de rondelle. Excluons son but de l’équation, puisqu’il a été inscrit en avantage numérique. Il devra bien sûr connaître du succès à plus long terme avant que l’on puisse avoir la certitude qu’il peut s’illustrer au centre, mais St-Louis est curieux. « Il est calme et créatif, a analysé l’entraîneur-chef. Il couvre beaucoup de glace avec sa grandeur. On est tous intrigués. Peut-il jouer au centre dans cette ligue ? À 21 ans, je ne pense pas que personne ici n’a encore la réponse. »

Un pilier, déjà

Avant le match, Gerard Gallant disait que K’Andre Miller avait fait « des pas de géant » à partir des deux derniers mois de la dernière saison. Ça sautait aux yeux dimanche. S’il n’a pas nécessairement bien paru sur la séquence qui a mené au but de Cole Caufield, il a connu dans l’ensemble un très fort match. En troisième période, la façon dont il a rattrapé Nick Suzuki pour l’empêcher de partir en échappée, sans même passer proche d’être puni, était un bijou en soi. Miller, un choix de 1er tour en 2018, aura 23 ans la semaine prochaine et il joue déjà 22 minutes par match. Si Adam Fox retient l’attention en raison de ses prouesses offensives, Miller joue de plus en plus comme le véritable général de la défense new-yorkaise.

Ils ont dit

Après deux périodes, chaque équipe avait un but. Là, t’as 20 minutes à jouer et il n’y a pas meilleur building sur la route, avec la journée de congé demain, pour vider la tank, comme on dit, et aller chercher ce que tu veux.

Martin St-Louis

Ils ont retrouvé leur rythme depuis une demi-douzaine de matchs. C’est une longue saison, ils vont connaître des creux de vague.

Martin St-Louis

Dans les deux matchs, on a affronté d’assez bons gardiens. Certains soirs, tu devras te contenter d’un but ou deux et de bien jouer défensivement. C’est bien d’être récompensés.

Kirby Dach

Je vais toucher du bois, je n’ai jamais perdu ici. C’est le fun, on travaille vraiment fort. On était mûrs pour gagner sur la route, la dernière victoire datait d'avant Noël. On n’a pas gagné [samedi], mais on a fait un bon effort.

Samuel Montembeault