(Ottawa) Le juge Thomas Cromwell, qui a fait des recommandations à Hockey Canada en matière de gouvernance, laisse entendre qu’il aurait aimé que la fédération sportive rende ses documents financiers accessibles sur le web, dans la foulée des allégations d’agression sexuelle qui l’ont éclaboussée.

« C’est un choix de l’organisation et c’est évident que j’ai recommandé une autre approche », a dit mardi cet ex-juge de la Cour suprême du Canada en comparaissant devant le comité du patrimoine de la Chambre des communes qui se penche sur ce dossier.

L’élu bloquiste Sébastien Lemire lui demandait alors comment il s’expliquait qu’une telle divulgation n’ait pas été faite par Hockey Canada.

Le député a aussi demandé à Me Cromwell s’il était « satisfait » du processus de nomination d’Hockey Canada pour apporter des changements à son conseil d’administration, comme annoncé lundi.

À cela, le magistrat a répondu qu’il lui manquait de l’information pour trancher.

« Je n’ai pas assez d’information pour être satisfait ou non, franchement, parce que je ne suis pas impliqué du tout dans ce processus, mais selon les reportages (dans les médias), c’est évident que le comité de nomination a essayé fortement de présenter un groupe de candidats avec des qualifications, avec l’expérience dans les différents domaines (qui sont) totalement en ligne avec mes recommandations », a-t-il répondu.

Les membres du conseil d’administration d’Hockey Canada ont démissionné en bloc en octobre à la suite du scandale découlant de leur gestion des allégations d’agressions sexuelles ciblant des membres de deux éditions d’Équipe Canada junior.

Hockey Canada a dévoilé lundi sa liste de nouveaux membres qui composeront son conseil d’administration, et leur mandat sera limité à une année seulement.

Les membres de l’organisation tiendront un scrutin samedi afin de déterminer s’ils acceptent ou non l’intégralité de la liste de nouveaux membres, qui comprend cinq femmes et quatre hommes.

Le juge Cromwell a fait un rapport sur la gouvernance d’Hockey Canada, mandat qui lui avait été confié par la fédération sportive elle-même, et a formulé une série de recommandations.

Durant son témoignage de mardi, l’auteur du rapport est revenu sur certaines de ses observations relativement à l’utilisation d’un fonds pour gérer des allégations d’agression sexuelle visant des joueurs de hockey.

« J’ai l’impression que les réclamations – en particulier dans les (cas d’) agressions sexuelles – ont augmenté considérablement dans les décennies passées et le résultat est une croissance des primes », a-t-il soutenu.

Me Cromwell a précisé qu’il n’était pas en mesure de faire des comparaisons, à ce chapitre, avec des organisations liées à d’autres sports que le hockey.

Tout au long du témoignage de l’ex-juge de la Cour suprême, les députés de tous les partis ont semblé s’entendre pour dire que le rapport du magistrat permet de conclure qu’Hockey Canada a beaucoup de travail à faire pour régler ses problèmes de gouvernance.

« (J’aimerais souligner) deux choses qui, je pense, sont critiques : l’une revient à qui est autour de la table […] et, deuxièmement, il s’agit d’avoir un cadre de politique beaucoup plus robuste qui est transparent et qui va contribuer à la cohérence de la prise de décision », a résumé Me Cromwell à ce chapitre.

Par ailleurs, il ne s’est pas avancé sur la nécessité, à ses yeux, de déclencher une commission d’enquête publique « sur la culture toxique dans les organisations sportives au Canada », tel que le réclamait une motion battue déposée par le Bloc québécois le mois dernier.

« La décision d’invoquer une commission d’enquête est une question de politique publique. Je n’ai aucune expertise dans ce domaine et aucune opinion là-dessus », a affirmé Me Cromwell.

Appelée à dire si elle est ouverte à l’idée d’une telle enquête, la ministre fédérale des Sports, Pascale St-Onge, n’a pas répondu directement à la question.

« Il y a des travaux importants qui se font présentement au Parlement, ici même, avec deux comités qui se penchent sur la question du sport sécuritaire », a-t-elle dit aux journalistes dans le foyer de la Chambre des communes.

Elle a rappelé que l’examen fait par le comité du patrimoine porte essentiellement sur les questions de gouvernances et que celui de la condition féminine entend surtout des athlètes, des victimes alléguées d’abus dans le sport et des experts « sur la question du sport sécuritaire ».

« Les deux comités vont nous faire des recommandations », a conclu Mme St-Onge.