(Paipa) L’objectif est le même, mais le chemin radicalement différent. Pour battre le record de victoires d’étape sur le Tour de France cet été, Mark Cavendish innove en découvrant, légèrement à court de souffle, les Andes colombiennes et la préparation en altitude.

« Je n’arrive pas à croire qu’après toutes ces années ce soit la première fois que je viens en Colombie. Maintenant que j’y suis, je veux rester. Le seul problème est que pendant deux semaines je n’ai pas pu respirer », plaisantait la légende britannique de 38 ans avant de prendre le départ mardi du Tour de Colombie et finir troisième de la première étape.

Voir le « Cav » dans les Andes, au milieu des condors et des grimpeurs locaux affûtés comme des lames, est une vision inédite, d’autant que le profil des lieux ne correspond pas du tout à ses qualités intrinsèques.

En vérité, les organisateurs du Tour de Colombie, qui n’ont qu’à se baisser pour trouver des pics vertigineux, ont été raisonnables en dessinant un parcours pas trop abrupt, hormis la cinquième des six étapes qui propose une ascension finale de… 30 km (à 5,7 %), un cauchemar absolu pour tout sprinteur.

La difficulté est ailleurs : l’altitude, à l’image de la première étape plate, mais haut perchée, qui s’élançait mardi de Paipa, à 2502 m, pour arriver à Duitama, site des Championnats du monde en 1995, à 2490 m. Cavendish (Astana) y a été devancé au sprint par le Colombien Fernando Gaviria (Movistar) et l’Italien Davide Persico (Bingoal WB).

« Maintenant, je comprends pourquoi les coureurs colombiens se jouent de nous lorsqu’ils descendent au niveau de la mer », commente Cavendish en exagérant un peu, lui que ses pairs désignent comme le plus grand sprinteur de tous les temps du haut de ses 162 victoires professionnelles.

Pour « le missile de Man », ces hauteurs constituent une vraie découverte. « Je n’ai jamais vraiment fait d’altitude avant », explique-t-il, alors que le peloton a pris l’habitude de multiplier les camps d’entraînement en montagne.

Tant qu’à s’y mettre, il n’a pas fait les choses à moitié, puisqu’il a commencé par un stage de trois semaines en Colombie avec son nouveau poisson-pilote, le Danois Michael Morkov, et le Néerlandais Cees Bol.

« Bien sûr que je pense au Tour de France »

« On a passé une semaine incroyable à Medellín », où il a parfois bénéficié d’une escorte policière pour s’entraîner au milieu d’un trafic routier intense, « et puis on est montés ici à Paipa », souligne-t-il.

Résultat : Cavendish se sent « en forme, physiquement et mentalement », prêt à en découdre, l’œil déjà rivé sur son grand rendez-vous de l’été.

« Bien sûr que je pense en permanence au Tour de France, j’y ai pensé toute ma carrière », reconnaît-il.

Le Britannique compte à son palmarès un Monument, Milan-San Remo (2009), un titre de champion du monde (2011), 17 victoires d’étape sur le Tour d’Italie et trois sur le Tour d’Espagne. Mais le Tour de France, plus qu’aucune autre course, constitue le fil rouge de sa prodigieuse carrière ainsi que le théâtre de ses plus grands exploits.

Depuis 2021, il partage le record de victoires d’étapes (34) sur la Grande Boucle avec Eddy Merckx, le plus grand de l’histoire.

C’est pour le dépasser qu’il a repoussé sa retraite, annoncée l’an dernier avant son abandon sur chute lors de la 8e étape du Tour 2023.

« Mais ça ne veut pas dire que je prends les autres courses à la légère », prévient-il, en pointant l’essence même du sprinteur : « nous sommes évalués au nombre de nos victoires. Les places de deuxième, troisième, quatrième ou cinquième ne comptent pas. Pour moi, c’est important de gagner et d’y puiser une motivation qui me transporte jusqu’en juillet », au Tour de France.