(Québec) Laurent Dubreuil n’avait plus les jambes pour voler le spectacle, Valérie Maltais s’est chargée de le conclure en apothéose, ou presque.

La course ne passera pas à l’histoire, mais son issue, oui : neuvième d’une épreuve tactique marquée par de la confusion, un compte-tours déréglé et une chute sans gravité, mais aux conséquences importantes, la patineuse de La Baie a terminé en reine la Coupe du monde de patinage de vitesse de Québec, dimanche après-midi.

À l’étonnement de celle qui croyait avoir besoin d’une « course miracle », elle a soulevé la grande coupe argentée couronnant la gagnante du cumulatif de la saison au départ en groupe. Pas mal pour celle qui avait pensé mettre cette discipline de côté à l’issue de la dernière campagne, ponctuée de certaines tensions avec sa coéquipière Ivanie Blondin.

« Je voulais plus me concentrer sur mes distances individuelles et la poursuite par équipe, mais j’ai retrouvé un petit amour pour le mass start », a constaté la vedette du jour, après avoir célébré avec les nombreux proches venus l’encourager à l’anneau Gaétan-Boucher.

C’est quand même assez spécial de me retrouver avec ça. Il s’agit de revoir ses priorités ou la manière qu’on a de se fixer des objectifs. C’est ce que j’ai fait pour le mass start, et j’en suis très contente.

Valérie Maltais

Moins de trois heures plus tôt, Maltais avait annoncé ses couleurs en finissant quatrième au 1500 m, un sommet personnel sur la distance après sa 10e place de Salt Lake City, la semaine dernière.

Meneuse du classement général, avec une mince priorité de trois points sur Blondin, Maltais a amorcé l’épreuve de départ les jambes molles, loin d’être convaincue qu’elle saurait résister aux assauts de la Néerlandaise Irene Schouten, qui lui soufflait aussi dans le cou. En ce qui concerne Blondin, avec qui l’harmonie est revenue, il était clair que chacune viserait le titre, sans nuire à l’autre.

Au premier sprint intermédiaire, un groupe de sept coureuses non impliquées dans la lutte au général a pris la fuite, créant rapidement un écart de 300 mètres sur l’autre peloton, dans lequel personne ne semblait intéressé à tirer. Avec quatre ou cinq boucles à faire, il est devenu évident que la victoire se déciderait à l’avant et que les poursuivantes se chamailleraient pour les points restants.

Maltais s’est montrée patiente, contrairement à son tempérament, réservant son accélération à l’amorce du dernier tour. Un peu plus tôt, Blondin avait cru à tort que l’ultime boucle était lancée, déjouée par un compte-tours ajusté au rythme des meneuses… La Franco-Ontarienne a dû se relever avant de remettre les gaz, mais son élan a été coupé par la chute de deux rivales, qu’elle a évitées de justesse. Maltais était déjà partie…

PHOTO JACQUES BOISSINOT, LA PRESSE CANADIENNE

Valerie Maltais en action dimanche

Furieuse, Blondin s’est plainte de la confusion avec le compte-tours en traversant la ligne au 12e échelon. Après la cérémonie, elle a eu besoin de quelques minutes pour retrouver son calme.

« Dans les cinq derniers tours, c’était juste très bizarre, a expliqué la vice-championne mondiale et olympique de la spécialité. Ils n’arrêtaient pas de changer le nombre de tours au tableau, alors personne ne savait vraiment ce qui se passait et combien de tours on avait à faire. C’est passé de trois, à deux, encore à trois et après à un… J’ai lancé le sprint un peu tôt, j’ai hésité et une fille m’a dépassée à l’intérieur et elle est tombée. Il va falloir que je l’oublie, celle-là ! »

« On aime notre sport »

Blondin, deuxième au cumulatif, se reprochait néanmoins de ne pas avoir réagi plus tôt quand le peloton s’est scindé, voyant que les Néerlandaises laissaient filer. Maltais, elle, connaissait parfaitement la distance à parcourir, ce qui lui a permis « d’éviter le chaos » à la fin.

Il y a du monde à l’intérieur [de l’anneau] qui nous disait combien de tours il restait. Ça n’a jamais été un doute pour moi. C’était le scénario idéal. J’ai essayé de jouer le plus intelligemment possible, sachant les points à l’enjeu. Mais je devais bien me positionner et j’avais la bouche sèche ! J’étais vraiment nerveuse parce que c’était très spécial de me retrouver dans cette position [de meneuse].

Valérie Maltais

En congé au lendemain de sa médaille de bronze au 3000 m, vendredi, Maltais a pleinement goûté à l’atmosphère électrique qui régnait dans le Centre de glaces Intact Assurance dimanche. Sa partenaire au 1500 m, la Norvégienne Ragne Wiklund, lui a raconté avoir elle-même profité des applaudissements d’une extrémité à l’autre de la piste de 400 mètres.

« C’est un nouvel évènement, une première Coupe du monde en 30 ans, les gens et la communauté ont répondu aux attentes, a complimenté Maltais. Au Québec, on aime notre sport, on aime encourager nos athlètes. On n’a pas fait mentir notre réputation. »

Plus riche de 16 000 $ US en vertu de son titre au départ en groupe, Valérie Maltais tournera maintenant son attention vers les Championnats du monde de Calgary, dans moins de deux semaines, où elle aura un titre à défendre à la poursuite par équipe et maintenant deux ou trois autres épreuves où elle figurera parmi les prétendantes.