Jacques Villeneuve n'est pas le seul à profiter du Grand Prix du Canada pour serrer des mains. Deux fois vice-champion en DTM, Bruno Spengler était de passage au circuit Gilles-Villeneuve, hier. Entre une visite dans la loge de Normand Legault et une autre chez Mercedes, le pilote québécois a réitéré son désir de décrocher un volant en Formule 1.

«C'est toujours mon rêve d'aller en F1 et je vais tout faire pour y arriver, mais je vais d'abord me concentrer sur le DTM et essayer de gagner le championnat cette année», m'a dit Spengler, assis à une terrasse au bord du bassin olympique d'aviron.

 

Il a du pain sur la planche. Avec 14 points en quatre courses cette saison, le pilote de l'écurie HWÀ Mercedes est sixième au classement, à 12 points de la tête, détenue par l'Allemand Timo Scheider (Audi).

 

«Audi a été vraiment très performant en début de saison. Ils étaient un cran au-dessus de nous, reconnaît Spengler, également devancé par deux de ses coéquipiers, l'Écossais Paul di Resta et l'Anglais Jamie Green. Mais l'équipe a bien réagi et a amélioré notre voiture rapidement. On a fait un bon pas en avant, même si Audi garde un petit avantage. Je ne me décourage pas pour autant, car il reste sept courses. Tout est encore possible.»

 

Sans être «obligatoire», gagner le championnat donnerait un coup de pouce «important» à sa tentative d'accéder au saint des saints que représente la F1, pense-t-il.

 

Ça ne nuirait pas, bien sûr. Mais dans le paddock, les journalistes qui suivent de près le DTM doutent que ce rêve se réalise un jour. Pas parce que Spengler n'est pas un bon pilote - au contraire, il est très estimé -, mais pour la simple et bonne raison que le championnat allemand des voitures de tourisme n'est pas un tremplin naturel vers la série reine du sport automobile, contrairement aux formules comme le GP2.

 

On peut bien ressasser tant qu'on veut l'exemple de Giancarlo Fisichella ou de Christijan Albers, mais leur passage en DTM remonte à plusieurs années déjà - plus d'une décennie dans le cas de Fisico. Albers, après un bref passage en fond de grille chez Minardi, Midland et Spyker, est de retour en DTM cette année, où il n'a pas encore marqué de points. (Pas plus d'ailleurs que Ralf Schumacher, qui court avec une Mercedes de l'an dernier.)

 

Le contraste ne saurait être plus évident avec le GP2, une pépinière d'où sont notamment issus Lewis Hamilton, Nico Rosberg, Heikki Kovalainen et Nelsinho Piquet.

Chacun de ces pilotes, de même que Sebastian Vettel et Robert Kubica, avaient 25 ans ou moins lorsqu'ils ont accédé à la F1. Spengler, justement, aura 25 ans en août. L'exemple de Sébastien Bourdais, qui a disputé son premier Grand Prix à l'âge «vénérable» de 29 ans, prouve que l'obsession de la F1 pour la jeunesse n'est pas absolue. Mais Bourdais, quatre fois champion en Champ Car, avait une longue expérience des monoplaces.

 

Il ne faut jamais dire jamais et rien ne dit que Spengler, qui avait entretenu des discussions avec l'écurie mort-née Prodrive, ne nous surprendra pas. Mais une longue et fructueuse carrière en DTM, une série aussi populaire en Allemagne que le NASCAR peut l'être aux États-Unis (on attend 140 000 personnes pour l'épreuve de Norisring, à la fin juin!) est sans doute un dénouement plus plausible.

 

«C'est envisageable, admet Spengler. Un gars comme Bernd Schneider (six fois champion depuis 1992) a fait une très belle carrière en DTM.» Et une carrière parfaitement honorable, serait-on tenté d'ajouter.

 

La fin pour l'Atlantique?

 

Ça sent la fin pour la Formule Atlantique. À moins qu'un acheteur se pointe, la série devra mettre la clé sous la porte en octobre, selon Anne Roy, porte-parole du championnat né en 1974. Petite soeur du Champ Car, l'Atlantique risque de payer le prix de la réunification avec l'IRL, qui a déjà sa propre filière. Ce serait un bien triste sort pour la série, qui a joué un rôle majeur dans le développement d'un nombre impressionnant de pilotes québécois, de Gilles Villeneuve à son fils Jacques, en passant par Patrick Carpentier, Alex Tagliani et Andrew Ranger.