Est-ce néfaste de prendre une méthode de contraception qui supprime les règles, comme la pilule en continu, le stérilet Mirena ou le Depo-Provera? N'est-il pas sain d'évacuer chaque mois du sang menstruel? La Dre Laurence Simard-Émond, obstétricienne-gynécologue au CHUM, entend «très souvent» la question de la bouche de ses patientes.

«À mon avis, il existe une croyance populaire qui dit que de saigner, c'est bon et que ça permet d'excréter des substances qui pourraient être toxiques ou nocives, dit la Dre Simard-Émond, également professeure adjointe de clinique au département d'obstétrique gynécologie de l'Université de Montréal. Mais il n'y a pas de preuves scientifiques que d'être menstruée soit bon pour l'organisme.»

Lors du cycle menstruel, l'endomètre - la paroi interne de l'utérus - s'épaissit en vue de l'implantation d'un embryon. S'il n'y a pas d'implantation (ce qui est bien souvent le cas!), le taux d'hormones chute et l'endomètre se défait: ce sont les menstruations.

Ce qui est néfaste, explique la Dre Simard-Émond, c'est quand l'endomètre s'épaissit de façon incontrôlée, sans se défaire, par exemple chez certaines patientes avec des menstruations peu fréquentes. Mais ce n'est pas du tout ce qui se produit avec les méthodes de contraception qui suppriment les règles: les hormones que contiennent ces dernières empêchent l'épaississement de l'endomètre.

«Quand on utilise la pilule en continu, par exemple, on n'aura pas de menstruation, mais ce n'est pas parce que l'endomètre est très épais: c'est parce qu'il est toujours très fin», explique la Dre Simard-Émond. Et c'est la même chose avec le Depo-Provera et avec le stérilet Mirena.» Et pas besoin de renouveler cet endomètre de temps à autre? «Non, répond-elle. Il y a juste les cellules de base qui vont être là. Ce n'est pas comme s'il restait du vieil endomètre...»

Lorsqu'on prend la pilule de façon cyclique, des saignements surviennent lors de la semaine d'arrêt (les sept jours durant lesquels on prend un comprimé de sucre). Ces saignements, provoqués eux aussi par une chute d'hormones, ne sont pas liés à la présence d'un cycle menstruel, explique Laurence Simard-Émond.

«Pour des raisons d'acceptabilité sociale et religieuse, les gens qui ont mis la pilule contraceptive en marché ont fait en sorte que les femmes continuent d'avoir des menstruations chaque mois, mais ce sont des menstruations qui sont complètement factices, poursuit-elle. Le cycle naturel est complètement supprimé et il est remplacé par le cycle des hormones qu'on prend par la bouche.»

N'empêche, des femmes préfèrent prendre la pilule de façon cyclique, et non en continu, parce qu'elles ne sont pas gênées par les saignements ou encore parce qu'elles ont ainsi la confirmation, chaque mois, qu'elles ne sont pas enceintes. Et ce sont de bonnes raisons, souligne la Dre Simard-Émond. Mais pour celles qui sont tentées par une méthode de contraception qui supprime les règles et qui craignent que ce soit néfaste pour elles, la Dre Simard-Émond leur sert un dernier argument, pas très scientifique, convient-elle, mais tout de même convaincant: il y a quelques décennies à peine, les femmes en âge de procréer étaient enceintes ou allaitaient sur une base régulière. Et elles n'avaient pas leurs règles le plus clair du temps...

Motif de consultation

Quand l'absence de règles chez une femme en âge de procréer n'est pas liée à une méthode de contraception, il y a lieu de consulter son médecin. «Ça peut être dû à toutes sortes de facteurs, explique la Dre Laurence Simard-Émond. Chez certaines femmes, l'absence de règles est liée à un épaississement pathologique de l'endomètre et c'est un facteur de risque pour le cancer de l'endomètre. D'ailleurs, dans les traitements de cette pathologie, il y a la pilule en continu, le stérilet Mirena et le Depo-Provera...»