Ils sont amoureux, mais ce sont aussi les deux chapeliers derrière la marque Fumile. Portrait de Mélodie Lavergne et d’Alex Surprenant, qui conçoivent et fabriquent des chapeaux que vous avez vus sur les têtes de Tire le coyote, Win Butler, Mariana Mazza ou des joueurs du Canadien.

C’est une journée parfaite pour rouler en voiture les vitres baissées, et la route 213 qui nous mène de Dunham à Frelighsburg nous semble encore plus bucolique que la dernière fois.

La bâtisse lumineuse qu’occupe l’atelier-boutique de la chapellerie Fumile, partagée avec la buvette Passe-Montagne, est située dans la rue principale de Freli, juste en face de la petite salle de spectacle Beat & Betterave.

À notre arrivée dans l’atelier-boutique, notre regard est immédiatement attiré par les 10 rangées de chapeaux qui s’élèvent en hauteur.

  • Les chapeaux de Fumile

    PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

    Les chapeaux de Fumile

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    Les chapeaux de Fumile

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Mélodie Lavergne et Alex Surprenant ont déjà eu pignon sur rue à Montréal, rue Atateken, pratiquement en face du restaurant Agrikol. Ils ont même vécu illégalement dans leur atelier pendant trois ans.

Win Butler, chanteur d’Arcade Fire et ancien copropriétaire d’Agrikol, a par ailleurs porté des chapeaux de Fumile. « Quel good guy », dit Mélodie Lavergne.

On pourrait en dire autant de cette dernière et de son compagnon, Alex Surprenant.

Le couple s’est connu il y a sept ans dans un bar grâce à des amis communs. Mélodie avait étudié en mode et elle menait son entreprise Sass Créations alors qu’Alex vivait une période sombre. Une blessure l’avait forcé à abandonner sa carrière de joueur de soccer professionnel, notamment pour l’Impact.

Je me cherchais et je voulais créer.

Alex Surprenant

Quand Alex – qui aimait déjà porter des chapeaux – a vu une vidéo sur YouTube du chapelier vedette avant-gardiste Nick Fouquet, ce fut une révélation « Cela m’a complètement allumé », raconte-t-il.

« On a vu qu’il y avait de la place pour innover dans ce métier traditionnel et conservateur », ajoute Mélodie.

Or, contrairement à sa douce, Alex n’avait jamais touché à une machine à coudre.

Un savoir-faire qui se perd

Alex et Mélodie se sont tournés vers la modiste et chapelière Lucie Grégoire. « Elle est très importante dans notre parcours, souligne Alex. Elle a tenu le fort de la chapellerie au Québec pendant 40 ans. »

Ce qui est difficile en chapellerie est d’investir dans tout l’équipement au départ, dont les moules. Lucie nous a permis d’expérimenter.

Mélodie Lavergne

Pour les chapeaux de fourrure, Alex et Mélodie ont aussi eu de l’aide de Bernard Zarwanitzer. Ce dernier leur a tout simplement permis de le regarder travailler dans son atelier avant sa retraite. Ce fut une grande chance pour le couple d’avoir deux mentors avec un savoir-faire qui ne s’apprend pas à l’école.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

La fabrication d’un chapeau se fait en plusieurs étapes.

« Ils ont des expertises qui se perdent, souligne Mélodie. Sur le plan manufacturier, l’art du chapeau a disparu. »

La chapellerie demeure un métier d’artisan. « Contrairement aux vêtements, il n’y a aucune machine qui fait un beau chapeau de A à Z, explique Alex. Il y a beaucoup d’étapes à la main. »

Selon Mélodie, c’est sans doute pourquoi le chapeau n’est plus porté comme accessoire de tous les jours. « C’est notre défi de le remettre dans les mœurs. »

Depuis avril 2018, Fumile vend des chapeaux prêts à porter et sur mesure. On n’achète pas un chapeau comme on achète un vêtement. Il y a un investissement financier et émotif. Les gens passent par toutes sortes d’émotions quand vient le temps de choisir le modèle, le matériel, le style de la couronne, la couleur, les ornements…

Le chapeau est très identitaire. C’est une prolongation de soi.

Mélodie Lavergne

« Notre force est de guider les gens. C’est une collaboration », expose Mélodie.

W.A.H.S.

Des clients ont développé une « saine » dépendance aux chapeaux de Fumile, lance en souriant Alex.

Sur les chapeaux de Fumile, on trouve l’acronyme W.A.H.S., pour « We All Have Scars ».

Nous avons tous nos blessures et nos histoires et il ne faut pas avoir peur d’en parler.

Alex Surprenant

Un chapeau a du vécu et il faut être fier de le porter, fait-il valoir. Surtout quand il est unique et signé Fumile.

Il faut dire que l’expérience de choisir une création ou de le faire confectionner sur mesure est vraiment plaisante depuis que Fumile est installée à Frelighsburg.

Juste avant la pandémie, Alex et Mélodie avaient participé au grand salon de la mode MAGIC à Las Vegas pour rencontrer des acheteurs internationaux.

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L’équipement date d’une autre époque.

La fermeture des frontières a complètement changé leur stratégie. « On a décidé d’aller dans l’extralocal », raconte Alex.

Mélodie et lui se sont mis à rêver de s’installer dans les Cantons-de-l’Est et ils sont tombés sur cet espace de Frelighsburg, auparavant occupé par le restaurant La cueillette. « C’était l’ancien hôtel-bar de Freli qui a ouvert en 1920 pendant la prohibition », souligne Mélodie.

L’ouverture a eu lieu le 15 mai 2021, et aujourd’hui, le couple est enchanté. Le temps s’arrête quand on va choisir un chapeau ou discuter pour en avoir un sur mesure chez Fumile. Surtout qu’on peut prendre un café ou un verre de vin nature. Et sur la mezzanine, si on a la chance d’aller visiter l’atelier, on saisit tout le côté artisanal de la chapellerie.

Alex nous montre comment il brosse et coupe le feutre, alors que Mélodie modèle de la paille à même la vapeur d’un four.

« Nous avons encore beaucoup de projets de rénovations. C’est un projet à long terme », dit Mélodie.

En attendant, Alex et elle devront répondre à la forte demande pour leurs chapeaux. Pas si fous, ces chapeliers…

Consultez le site de Fumile