Dans les dernières années, de nombreuses familles ont adopté la parentalité positive et bienveillante. À cela, la psychoéducatrice Mélanie Bilodeau propose la parentalité sécurisante pour accompagner les enfants. Survol en quatre questions.

Pourquoi proposer un nouveau modèle de parentalité ?

Spécialisée en périnatalité et en petite enfance, Mélanie Bilodeau a créé, dans les dernières années, plus de 80 vidéos sur la parentalité positive. « Je suis proparentalité bienveillante, c’est sûr. Ça fait des années que c’est ce que je propose », indique, en entrevue téléphonique, la psychoéducatrice qui vient de faire paraître son deuxième livre, Soyez l’expert de votre tout-petit. Chez des parents qui ont tenté d’appliquer cette approche, elle a toutefois remarqué une certaine culpabilité. « J’ai rencontré beaucoup de parents qui disaient : ‟Il me semble que je n’y arrive pas. Ce modèle-là n’est pas pour moi. Je ne suis pas capable d’être un parent 100 % bienveillant. Je pogne les nerfs. Je suis impatient. Je suis irritable” », relate-t-elle. Sa conclusion ? « Il y a beaucoup de mauvaises interprétations de ce qu’est la parentalité bienveillante. » Elle poursuit : « Je me suis beaucoup questionnée comme professionnelle à savoir qu’est-ce que je pouvais proposer aux parents pour que ce soit plus clair, pour leur enlever un peu de pression, tout en répondant de façon adéquate aux besoins de l’enfant. » En s’appuyant sur les dernières recherches dans le domaine, elle a développé le modèle de la parentalité sécurisante.

PHOTO FOURNIE PAR MÉLANIE BILODEAU

Mélanie Bilodeau, psychoéducatrice

Qu’est-ce qu’un parent sécurisant ?

Mélanie Bilodeau souhaite d’abord mettre une chose au clair : non, les mères et les pères n’ont pas besoin d’être parfaitement bienveillants pour que leur bambin se développe sainement. Il peut arriver à tous les parents de lever le ton, de perdre patience ou de ne pas être à l’écoute de ce que ressent leur tout-petit. « L’important, ce n’est pas d’être 100 % bienveillant tout le temps. C’est impossible ! L’idée, c’est d’être sécurisant », croit-elle. « Ce qu’on veut, c’est que l’enfant développe un attachement sécurisant qui le poussera ensuite à se faire confiance et à faire confiance au monde », poursuit la psychoéducatrice, qui a également parlé de ce lien d’attachement dans son best-seller Soyez l’expert de votre bébé. Comment y arriver ? Dans son livre consacré aux tout-petits, Mélanie Bilodeau présente 11 leviers sur lesquels les parents peuvent s’appuyer pour mieux accompagner leur enfant dans son développement. « Éduquer plutôt que discipliner », « bâtir une alliance coparentale » et « sécuriser sans surprotéger » en sont trois exemples. Cette approche n’est pas une « recette toute faite », prévient-elle toutefois dans les premières pages de l’ouvrage, dans lequel elle invite aussi les parents à suivre leur instinct.

Quel élément les parents d’ici doivent-ils améliorer pour être davantage sécurisants ?

Lorsqu’on lui demande lequel des 11 leviers est généralement le plus négligé par les parents québécois, Mélanie Bilodeau hésite. À ses yeux, un élément les empêche à la fois de « décoder le besoin derrière le comportement » de leur enfant et d’« accueillir [s]es émotions » : l’adultomorphisme, soit le fait « de définir l’enfant, de l’interpréter et de le percevoir comme étant un mini-adulte ». « On lui prête des intentions d’adulte, alors qu’il n’a pas la maturation cérébrale pour réagir et réfléchir comme un adulte. Je trouve que c’est beaucoup ça l’enjeu de notre société présentement », explique-t-elle. Un exemple tiré du livre ? Un bambin qui ne veut pas goûter à ce qu’il a dans son assiette n’est pas capricieux. Il n’a peut-être pas faim ou ne reconnaît pas l’aliment qu’on lui sert. « Dire qu’un enfant fait des caprices, qu’il nous manipule, qu’il ne faut pas céder à son chantage, tout ça, ce sont des interprétations d’adultes. L’enfant, ce n’est pas ça, son intention. Jamais. Il est beaucoup trop petit pour ça. »

Qu’est-ce qu’un parent porte-avion ?

On connaît bien la notion de parent-hélicoptère qui surprotège son enfant, mais qu’en est-il du parent porte-avion, analogie inventée par la pédopsychiatre française Nicole Guédeney et reprise par Mélanie Bilodeau dans son livre pour illustrer l’un des leviers de la parentalité sécurisante ? « Le porte-avion est disponible pour que les avions puissent se déposer à tout moment. L’avion va se promener dans un périmètre où il est certain d’avoir accès au porte-avion pour pouvoir avoir des ravitaillements, aller chercher de l’essence, pour ensuite mieux explorer. […] C’est la même chose pour les enfants », explique la psychoéducatrice. « Si je me fais mal, est-ce que mon parent va être là pour me consoler ? Pour guérir mon petit bobo ? Pour me faire un câlin ? », donne-t-elle en exemple. En se montrant « disponible, accessible et sensible pour son enfant », le parent nourrit un lien d’attachement sécurisant avec lui. « C’est ça qui va permettre à l’enfant d’avoir des relations qui vont être saines dans la vie », soutient Mélanie Bilodeau.

Soyez l’expert de votre
tout-petit

Soyez l’expert de votre
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Éditions Midi Trente

237 pages