Quelles personnalités féminines inspirent les lectrices et les lecteurs de La Presse ? Vous avez été nombreux à répondre à notre appel à tous.

« C’est une femme remarquable et je pense que le monde aurait besoin de plus d’Anaïs Barbeau-Lavalette ! » C’est en ces termes que la lectrice de La Presse Marie-Pierre Lefebvre a décrit l’autrice et réalisatrice à la suite de notre appel à tous. À l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, nous avons organisé une rencontre entre elles, autour d’un café, à La Dépendance.

La Presse : Pourquoi le nom d’Anaïs te vient-il quand on te demande quelle femme t’inspire ?

Marie-Pierre Lefebvre : À la base, c’est la militante qui m’inspire beaucoup. J’ai adhéré à Mères au front parce que c’est un mouvement qui me parle. Je suis mère de deux jeunes filles, je suis inquiète de la situation climatique. […] Il y a aussi l’artiste, même si je n’ai pas tout vu et tout lu – la feuille de route est impressionnante ! Mais j’ai trouvé le film Inch’Allah vraiment touchant et beau, même s’il est dur. La série Je voudrais qu’on m’efface, ce sont des types de personnes qu’on voit moins à la télé et c’est important qu’on en parle. C’est dur et lumineux à la fois. Les romans aussi ont tellement une belle prose. Donc, c’est un peu pour l’ensemble de l’œuvre !

Anaïs Barbeau-Lavalette : C’est un peu gênant comme position ! (rires)

La Presse : Justement, as-tu conscience de l’impact de tes créations dans la vie des gens ?

ABL : J’en suis consciente. Ça ne paraît pas, mais je suis pas mal timide. Je suis une timide qui fait semblant qu’elle ne l’est pas ! Mais oui, j’ai beaucoup de témoignages, beaucoup de gens qui m’écrivent. Beaucoup de jeunes filles, dans les cégeps, les universités. J’ai l’impression qu’il y a eu un manque de modèles féminins accessibles pendant beaucoup de temps – moi, j’en ai manqué, en tout cas. […]

PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, COLLABORATION SPÉCIALE

Marie-Pierre Lefebvre et Anaïs Barbeau-Lavalette

La Presse : Qu’est-ce que ce retour vient apporter à ta création ?

ABL : Il y a des jours où je doute beaucoup de ce que je fais. Tu parlais d’activisme, Marie-Pierre, mais je suis une activiste débutante. Le gouffre d’impuissance m’a propulsée vers un besoin d’action, par survie. Mais sinon, mes outils, ce sont la plume et les images, et je questionne ça tout le temps. Les retours que je reçois, c’est de l’eau au moulin intérieur. Ça me dit que ce n’est pas vain. C’est ce qui est particulier en art. On pose des gestes artistiques, mais on ne sait pas l’empreinte que ça va laisser.

MPL : On parlait de Mères au front tantôt. As-tu des souhaits pour l’avenir du mouvement ? Pour dans cinq ans, dix ans, pour la suite ?

ABL : Je n’ai pas de souhait pour le mouvement, mais des souhaits par rapport aux répercussions que peut avoir le mouvement. Ce que j’aime de Mères au front, c’est que ça donne une démocratisation du militantisme. Tu n’as pas besoin d’être activiste, d’avoir lu tout le rapport du GIEC de 4000 pages en anglais. On a toutes un rapport au vivant. Nous, les mères, on a mis au monde et on a un désir profond, c’est de prendre soin de ceux qui sont sortis de nos entrailles. Mais le politique ne suit pas dans ce désir de protection. […] Ce dont je me suis rendu compte, c’est que tout le monde avait le goût de faire quelque chose, mais qu’il manque la petite étincelle pour que ça devienne un feu. Ç’a été ça, Mères au front. Je me suis demandé si je pouvais, moi, la partir, cette étincelle. Et on a toutes ce pouvoir-là. […]

PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, COLLABORATION SPÉCIALE

Marie-Pierre Lefebvre et Anaïs Barbeau-Lavalette

La Presse : Marie-Pierre, est-ce que le mouvement Mères au front est venu répondre à un besoin que tu avais d’agir ? Ou il a plutôt mis en lumière un danger imminent contre lequel tu as décidé d’agir ?

MPL : Ça fait longtemps que je suis habitée par ces questions. Mais souvent, on voit de jeunes étudiants qui prennent les pancartes – je suis conseillère d’orientation dans une université. Mais là, de le voir de façon différente, avec des mères, ça répondait à une impuissance avec laquelle on ne sait plus quoi faire. On a beau faire des choix individuels, à un moment donné, ça nous prend des décisions d’en haut. Ce mouvement a créé en moi un sentiment d’être moins seule avec cette peur. Je vois des jeunes qui disent qu’ils ne veulent pas d’enfant pour la planète. Il n’y a aucun jugement, je les comprends, mais quand on est rendu à dire qu’on ne veut plus donner la vie parce que la maison dans laquelle je vais déposer son nid…

ABL : Elle brûle…

MPL : Oui, voilà. Ça ne fonctionne pas.

La Presse : Tu étais donc une de celles dont Anaïs parlait, sur la ligne de départ, en attente d’une étincelle.

MPL : Oui. Ça prend des porteurs, des gens pour allumer cette étincelle. Des fois, on a besoin de ces gens-là et on ne sait pas trop comment s’y prendre.

ABL : Ça se vit à l’inverse aussi.

MPL : On s’alimente !

ABL : C’est exactement ça. Mon étincelle, toute seule, elle meurt. Quand tu parles de déconstruire des solitudes, c’est ça aussi. Je me sens seule, mais je me rends vite compte qu’on est des milliers à se sentir seules. On va mettre ça ensemble et ça va être beau en maudit. […] Il y a sûrement de grandes révolutions qui sont nées comme ça. Avec cette permission de se dire qu’on peut provoquer quelque chose de grand, ça nous appartient. C’est un mouvement intérieur, en fait.

PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, COLLABORATION SPÉCIALE

Marie-Pierre Lefebvre et Anaïs Barbeau-Lavalette

MPL : Tes œuvres et ton engagement militant mettent en relief une sensibilité aux problématiques environnementales et sociales. Comment arrives-tu à vivre avec cette sensibilité-là sans basculer dans l’abattement, le sentiment de désespoir ?

ABL : Je pense que la plus belle façon de résister, c’est par la joie. C’est la résistance heureuse. J’ai le luxe d’être chanceuse et née à la bonne place, donc la façon de résister qui me semble la plus accessible, c’est de ne pas céder au désespoir et de cueillir la lumière et la joie où ça se peut. Et il y en a beaucoup. Je pense que c’est un beau grand devoir. Mais je ne pense pas que ça peut être une obligation, le bonheur. J’en ai, des zones de tristesse, que je ne peux pas éviter. Mais j’ai été bien fabriquée par mes parents, je crois, j’ai une propension à trouver la lumière assez facilement ! Je suis chanceuse pour ça.

MPL : Pour moi, ça reste un défi. Peut-être que je l’ai moins facile – sans dire que c’est vraiment facile, c’est un choix conscient, c’est ce que j’entends de ce que tu me dis. Mais la sensibilité vient avec le défi de ne pas se laisser trop atteindre et de garder l’œil sur le beau et la lumière.

ABL : On est dans une période vraiment difficile pour ça…

MPL : Oui, c’est dur. [Anaïs doit partir pour aller au Théâtre d’Aujourd’hui, où se prépare son projet de documentaires scéniques, Pas perdus, présenté dès le 8 mars] Je me demandais : c’est qui, pour toi, les femmes inspirantes en 2022 ?

ABL : Il y en a beaucoup. En premier, ma fille. Elle a 6 ans. Elle est savoureuse dans sa liberté. Elle est tellement totale et habitée par ce qu’elle est. Je ne pense pas que ce soit que l’âge. Elle est complètement installée dans ses émotions. Quand elle est joyeuse, elle est entièrement joyeuse. Quand elle est en criss, elle est entièrement en criss. Il y a quelque chose dans son aspect total et entier qui est bien inspirant pour moi qui suis timide.

MPL : Quelque chose d’assumé.

ABL : Exactement. Sinon, je me penchais dernièrement sur les réalisatrices de maintenant et je trouve qu’il y a vraiment des voix singulières et inspirantes qui émergent. Le cinéma au féminin est en train de bourgeonner et c’est beau. Je pense que nos voix étaient là depuis tout le temps et là, ça y est, on va faire partie de l’histoire écrite, de l’histoire en images. C’est comme si notre histoire était effacée dans la mémoire collective. Et là, ça y est, ça pousse.

Les propos de la discussion ont été édités par souci de concision.

Consultez le site de Mères au front

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  • « Ici, au Québec, une grande dame que je respecte énormément, c’est Janette Bertrand. Elle a tellement fait avancer la cause des femmes. Sa télésérie L’amour avec un grand A a révélé certains tabous et a aidé beaucoup de gens. Sa dramatique avec Pauline Martin et Pierre-Luc Brillant sur le suicide a sauvé ma vie. Je lui serai éternellement reconnaissante. » — Annie de Broeck

    PHOTO DAVID BOILY, ARCHIVES LA PRESSE

    « Ici, au Québec, une grande dame que je respecte énormément, c’est Janette Bertrand. Elle a tellement fait avancer la cause des femmes. Sa télésérie L’amour avec un grand A a révélé certains tabous et a aidé beaucoup de gens. Sa dramatique avec Pauline Martin et Pierre-Luc Brillant sur le suicide a sauvé ma vie. Je lui serai éternellement reconnaissante. » — Annie de Broeck

  • « Une personnalité féminine que je trouve inspirante est Marilou Bourdon. Son parcours et le fait d’avoir monté une entreprise qui représente si bien les valeurs de sa (et de ma) génération me fascinent. Elle a pris une facette de sa vie qui se voulait sombre pour en faire quelque chose de beau et d’inclusif. Elle est authentique, semble avoir un sens de l’humour incroyable et semble également avoir une intelligence émotionnelle magnifique […]. Elle prouve que gérer au féminin, c’est faisable et rafraîchissant. » — Valérie Mongrain

    PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, COLLABORATION SPÉCIALE, ARCHIVES LA PRESSE

    « Une personnalité féminine que je trouve inspirante est Marilou Bourdon. Son parcours et le fait d’avoir monté une entreprise qui représente si bien les valeurs de sa (et de ma) génération me fascinent. Elle a pris une facette de sa vie qui se voulait sombre pour en faire quelque chose de beau et d’inclusif. Elle est authentique, semble avoir un sens de l’humour incroyable et semble également avoir une intelligence émotionnelle magnifique […]. Elle prouve que gérer au féminin, c’est faisable et rafraîchissant. » — Valérie Mongrain

  • « Farah Alibay. Une femme qui réalise son rêve, qui continue d’être impressionnée par ce qu’elle découvre et qui respire la joie de vivre. Elle est vibrante et brillante ! » — Brigitte Leduc

    PHOTO KARENE-ISABELLE JEAN-BAPTISTE, COLLABORATION SPÉCIALE, ARCHIVES LA PRESSE

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  • « Alexandra Stréliski. Créatrice de génie, elle procure à mon cœur, ma tête et mon âme un mélange de pur bonheur et de calme qui adoucissent toutes mes pensées, et ce, peu importe mon état ou les défis auxquels je fais face. Il n’y a pas une journée qui passe sans que j’écoute quelques pièces. Il y a énormément de puissance dans toute la douceur de sa musique. […] Ça me pousse à aller puiser dans ma force intérieure pour affronter les moments difficiles. Bravo pour ta belle musique, Alexandra, et surtout, merci ! » — Émilie Arsenault

    PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

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  • « Kim Thúy. Parce qu’elle sait dire les choses avec une si belle poésie et de manière très positive. Parce qu’elle est amoureuse de notre Québec. Parce qu’elle est d’une simplicité et d’une intelligence. De par son vécu. De par son rôle de mère qu’elle semble manier avec justesse et force. Parce qu’elle est Elle. » — Lizanne Thiffault

    PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

    « Kim Thúy. Parce qu’elle sait dire les choses avec une si belle poésie et de manière très positive. Parce qu’elle est amoureuse de notre Québec. Parce qu’elle est d’une simplicité et d’une intelligence. De par son vécu. De par son rôle de mère qu’elle semble manier avec justesse et force. Parce qu’elle est Elle. » — Lizanne Thiffault

  • « Rosalie Vaillancourt. Cette femme m’inspire, car je trouve qu’elle manie à merveille la vulnérabilité et la confiance en soi. Son sourire rayonne, mais n’est jamais vide. […] Toujours prête à écorcher son public d’une vulgarité qu’on ne peut voir venir d’une si adorable jeune femme. J’adore. […] J’ai beaucoup apprécié qu’elle assume son féminisme et qu’elle prenne la parole pour dénoncer son milieu. Clairement, la maturité lui va à ravir et la maternité lui va encore mieux. Longue vie à cette merveilleuse femme qui n’a pas fini de nous épater. » — Patrick Bonin

    PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

    « Rosalie Vaillancourt. Cette femme m’inspire, car je trouve qu’elle manie à merveille la vulnérabilité et la confiance en soi. Son sourire rayonne, mais n’est jamais vide. […] Toujours prête à écorcher son public d’une vulgarité qu’on ne peut voir venir d’une si adorable jeune femme. J’adore. […] J’ai beaucoup apprécié qu’elle assume son féminisme et qu’elle prenne la parole pour dénoncer son milieu. Clairement, la maturité lui va à ravir et la maternité lui va encore mieux. Longue vie à cette merveilleuse femme qui n’a pas fini de nous épater. » — Patrick Bonin

  • « Béatrice Martin. Parce qu’elle ose faire des choix audacieux (Bravo Musique), qu’elle ose parler publiquement de sujets personnels et sensibles (dysmorphophobie corporelle, diversité sexuelle). Parce qu’elle est créative et talentueuse. […] Parce qu’elle a un si bon sens de l’humour (je pense, entre autres, à une vidéo sur sa routine beauté sur Instagram […]). Parce qu’elle affiche autant le beau côté de la maternité que le côté, disons, moins glamour. […] Et aussi parce qu’elle ne se gêne pas pour promouvoir plein d’autres femmes artistes. » — Genevieve Guindon

    PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

    « Béatrice Martin. Parce qu’elle ose faire des choix audacieux (Bravo Musique), qu’elle ose parler publiquement de sujets personnels et sensibles (dysmorphophobie corporelle, diversité sexuelle). Parce qu’elle est créative et talentueuse. […] Parce qu’elle a un si bon sens de l’humour (je pense, entre autres, à une vidéo sur sa routine beauté sur Instagram […]). Parce qu’elle affiche autant le beau côté de la maternité que le côté, disons, moins glamour. […] Et aussi parce qu’elle ne se gêne pas pour promouvoir plein d’autres femmes artistes. » — Genevieve Guindon

  • « Je suis inspirée par Gabrielle Lisa Collard. En plus d’être une autrice d’une très grande qualité, elle mène de front la lutte contre la grossophobie. Elle tente d’éduquer les gens et de leur faire voir l’injustice envers les personnes vivant dans un corps gros. Gabrielle vit sa vie comme elle l’entend, selon ses convictions, et c’est franchement très inspirant. » — Marie-Claude Royer

    PHOTO PHILIPPE BOIVIN, COLLABORATION SPÉCIALE, ARCHIVES LA PRESSE

    « Je suis inspirée par Gabrielle Lisa Collard. En plus d’être une autrice d’une très grande qualité, elle mène de front la lutte contre la grossophobie. Elle tente d’éduquer les gens et de leur faire voir l’injustice envers les personnes vivant dans un corps gros. Gabrielle vit sa vie comme elle l’entend, selon ses convictions, et c’est franchement très inspirant. » — Marie-Claude Royer

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