(Berlin) Bières, musique techno à tue-tête et pique-nique improvisé : un large groupe de jeunes s’est donné rendez-vous ce mardi soir dans un parc berlinois prisé pour profiter du beau temps. L’épidémie de COVID-19 semble bien loin.

« Les boîtes de nuit sont fermées, il faut bien qu’on s’amuse », lance l’un d’eux. Tous âgés d’une vingtaine d’années, certains déguisés, ils ont répondu à une invitation spontanée sur les réseaux sociaux intitulée CoronaParty.

Plusieurs fêtes inopinées de ce type ont dû être interrompues ces derniers jours par la police allemande.

À Berlin, les policiers sont intervenus lorsqu’une centaine de jeunes sont venus fêter dans un parc, avec puissantes chaînes stéréo et alcool, la fermeture des écoles lundi après-midi. Dispersés une première fois, ils ont rejoint un autre groupe pour terminer la fête de nuit.

« S’il vous plaît, ne faites pas ça. Restez chez vous autant que possible et limitez votre vie sociale autant que possible ! », leur a lancé Lars Schaade, vice-président de l’Institut Robert-Koch, qui pilote en Allemagne la lutte contre l’épidémie.

Ce comportement est « contre-productif et risque de mettre en danger les populations à risque », a-t-il dit.

Bientôt le confinement ?

Alors que le pays met progressivement en place des mesures toujours plus contraignantes pour tenter de ralentir la propagation du virus, qui a déjà officiellement infecté près de 8200 personnes et fait au moins 12 morts, beaucoup tardent à bousculer leurs habitudes.

Même si des rues généralement animées restent clairsemées, avec le retour des beaux jours les terrasses de la capitale sont parfois bondées et les queues s’allongent, sans toujours respecter les distances de sécurité sanitaire, devant les glaciers.

Une manière de profiter une dernière fois du grand air alors que beaucoup d’Allemands craignent dans les prochains jours qu’un confinement généralisé ne soit décrété comme en Italie, France ou Espagne.

« Beaucoup ne respectent pas les règles, on ne va pas pouvoir échapper à un confinement total », estime à l’AFP Anja, 35 ans.

Avec trois amis, elle-même est pourtant venue jouer, « sans doute pour la dernière fois », au volleyball de place dans un parc de la capitale allemande.

PHOTO JOHN MACDOUGALL, AGENCE FRANCE-PRESSE

« Beaucoup ne respectent pas les règles, on ne va pas pouvoir échapper à un confinement total », estime Anja, 35 ans. Avec trois amis, elle-même est pourtant venue jouer, « sans doute pour la dernière fois », au volleyball de place dans un parc de la capitale allemande.

« On a beaucoup réfléchi avant de venir en examinant qui était susceptible de croiser qui dans son entourage », explique-t-elle, l’air grave.

Plus loin, les appareils de musculation en libre accès, métalliques, sont la plupart du temps utilisés… sans gants.

« Il semble y avoir plus de joggeurs que la normale et ils ne prennent pas soin de garder leurs distances avec les gens qui ne font que marcher », s’énerve Geoffrey Davis. Ce coureur « réfléchit à deux fois désormais » avant d’aller courir à Francfort.

Fédéralisme erratique

Pour Ole, un Berlinois de 39 ans qui accompagne sa fille sur une aire de jeux bondée, « rester enfermé dans un appartement avec un enfant est compliqué ».

« Nous n’avons plus de contacts avec mes parents ni des personnes âgées. Si je tombe malade, tant pis, mais je ne fais pas vraiment partie de la population à risque », juge-t-il.

Problème : le fédéralisme allemand ralentit les décisions coordonnées entre les 16 régions où les règles sanitaires peuvent différer l’une de l’autre.

Si toutes ont fermé les écoles et restreint les heures d’ouvertures des magasins, cafés et restaurants, certains Länder n’interdisent les rassemblements qu’à partir de 1000 personnes, d’autres à 50.

Berlin refuse la fermeture des aires de jeux, expliquant même que cette décision incombe individuellement aux douze districts de la ville.

« En Allemagne, la parole d’un médecin de campagne est plus respectée que celle d’un ministre fédéral de la Santé », a déploré le secrétaire général du groupe parlementaire social-démocrate, Carsten Schneider.

Face à ces comportements erratiques, la chancelière Angela Merkel doit s’adresser aux Allemands mercredi soir pour leur demander de respecter les consignes sanitaires.

Lundi, le président français Emmanuel Macron avait lui décrété le confinement, après que les images de Parisiens se prélassant dimanche au soleil eurent illustré une certaine légèreté de la population face à la crise.