Très nombreux en raison du temps pluvieux des derniers mois, les champignons sauvages ont connu une grande popularité cet été. Si cette prolifération a fait le bonheur d'une foule de mycologues amateurs, plusieurs d'entre eux ont toutefois été gravement intoxiqués après avoir mangé des espèces dangereuses. Certains ont même été sauvés in extremis.

Une douzaine de cas ont été portés à l'attention de La Presse, mais ce n'est là que la pointe de l'iceberg, estiment les experts en mycologie, les intoxications par les champignons sauvages n'étant jamais rapportées systématiquement. On indique même le cas d'un chien intoxiqué après avoir avalé des amanites tue-mouche.

En juin dernier, trois membres d'une même famille se sont retrouvés à l'hôpital Anna-Laberge, à Châteauguay, après avoir mangé des amanites blanc ocré, une espèce rare dont on ignorait jusqu'ici la comestibilité. Deux des patients ont sombré dans le coma durant deux jours et on a craint pour la vie de l'un d'eux.

À Québec, il y a quelques semaines, une dame âgée a été hospitalisée après avoir consommé un plat d'amanites bisporigères, une espèce mortelle, mais on n'a pu établir si la gravité de l'intoxication était uniquement attribuable au champignon.

En Estrie, l'Agence de la santé et des services sociaux a cru bon de diffuser un communiqué, il y a un mois, pour inciter le public à la plus grande prudence à la suite de sept cas d'empoisonnement dans les deux premières semaines d'août. Hier, l'Agence n'a pu indiquer cependant quels champignons étaient en cause «parce que ce n'est pas son rôle», a fait valoir son porte-parole.

Au Centre anti-poison du Québec, on n'a pas compilé jusqu'à maintenant le nombre de cas qui ont été rapportés. Toutefois, le directeur de l'organisme, le Dr René Blais, précise que les demandes d'information sur la toxicité des champignons sauvages ont été particulièrement nombreuses cette année. Habituellement, le centre répond à environ 500 requêtes par année en cette matière.

Quant aux cas d'intoxication, il est impossible d'en déterminer le nombre, mais il pourrait dépasser la centaine annuellement.

Rares mais mortels

Si les espèces toxiques sont plutôt rares parmi les champignons sauvages qui poussent en territoire québécois, quelques-unes sont néanmoins mortelles, alors que plusieurs autres peuvent provoquer des problèmes gastriques graves, notamment parmi les amanites.

D'ailleurs, le Québec compte au moins un décès attribuable à la consommation de champignons sauvages, un amateur néophyte d'une soixantaine d'années mort en septembre 2004, six jours après avoir consommé un plat d'amanites vireuses, un champignon blanc assez répandu, rappelle pour sa part, Raymond Archambault, président du Cercle de mycologues de Montréal, un des plus importants en Amérique du Nord. «L'intérêt pour les champignons a pris de l'ampleur ces dernières années, surtout quand les récoltes sont abondantes comme ce fut le cas cet été. La cueillette commerciale amène aussi les gens à s'y intéresser. Cet engouement est d'ailleurs très perceptible car cette année, par exemple, les cours d'initiation que nous offrons ont affiché complet beaucoup plus tôt que dans le passé», dit-il.

Avant de consommer des champignons sauvages, il faut toujours s'assurer de leur identité à l'aide de volumes québécois ou nord-américains, jamais européens, insiste l'expert. M. Archambault conseille aussi la prudence en ce qui concerne les espèces vendues dans les marchés publics. Tout néophyte devrait en outre consulter un expert. Par ailleurs, la consommation d'une nouvelle espèce devrait toujours être modérée, fait-il aussi valoir. Signalons que le Cercle tient une grande exposition dimanche au Jardin botanique de Montréal où les amateurs sont invités à faire identifier leurs cueillettes.

Pour en savoir plus: www.mycomontreal.qc.ca