Après des années à faire pousser des fleurs et des légumes sur son balcon, Julie Aubé rêvait de cultiver de grands jardins, de planter des arbres et des vivaces. Elle a donc acheté une fermette à Saint-Roch-des-Aulnaies avec son conjoint en 2018. Tout juste avant que la demande pour les fermettes ne bondisse à travers le Québec.
Au moment d’écrire ces lignes, 425 fermettes étaient en vente sur Centris. Selon Miguel Verreault, courtier avec l’Équipe Paradis, une fermette est un terrain de jeu. « C’est une maison résidentielle sur un terrain où on peut faire un grand jardin, cultiver l’érable ou avoir quelques animaux de ferme, sans exploitation commerciale », dit-il.
Les dimensions ne déterminent pas s’il s’agit d’une fermette ou d’une ferme. « Je viens de vendre une propriété avec trois lacs, six jardins, 250 000 pieds carrés de terrain, des poules et des bœufs, mais comme les propriétaires sont autosuffisants, sans l’exploiter pour obtenir un profit, c’est une fermette », détaille le courtier.
De la parole aux actes
Communicatrice en alimentation de proximité, Julie Aubé a été séduite par ses visites de producteurs à la campagne. « Après une décennie à les promouvoir, j’ai eu envie de mettre la main à la terre, de goûter à un autre mode de vie, de respirer l’air pur et d’avoir accès à un plus grand horizon. Mon chum adorait ça lui aussi. »
Lorsqu’ils ont acheté une maison ancestrale avec un grand terrain et une grange, ils sont donc devenus propriétaires d’une fermette. Un produit immobilier qui est devenu deux fois plus populaire depuis la pandémie, selon M. Verreault. « L’engouement est très présent. Il y a plus de visites quand je mets une propriété en vente. »
Et les acheteurs ne sont plus les mêmes.
Maintenant, on voit beaucoup d’acheteurs des grandes villes qui sont plus agressifs dans leurs offres d’achat. Quand tu paies 2000 $ par mois pour un quatre et demie à Montréal et que tu peux avoir un terrain de 25 arpents avec un lac privé en campagne, ça se peut que tu pousses plus que des personnes déjà habituées à ça.
Miguel Verreault, courtier immobilier
Si la pandémie a convaincu plusieurs Québécois de (re)connecter avec la nature et les grands espaces, le désir d’autosuffisance et l’amour des produits bios qui poussent dans la cour ont également créé une demande pour les fermettes.
L’emplacement est roi
Ainsi, le potentiel du terrain est souvent plus important que les bâtiments. « Durant nos recherches, on se concentrait surtout sur l’emplacement de la fermette et les possibilités du terrain, dit Julie Aubé. Quand je voyais des chalets trois saisons proches des voisins, je les éliminais, car je voulais de l’espace. »
Plus le terrain de jeu est grand, plus c’est intéressant, confirme le courtier. « Les bohèmes qui veulent vivre en campagne ne s’attardent pas d’abord aux bâtiments. De toute façon, les vieilles bâtisses peuvent être rénovées par les acheteurs qui ont assez d’huile de coude pour les mettre à leur goût. Une maison, ça se modifie, mais pas un emplacement. »
En effet, la localisation prime sur la modernité de la propriété. « Si une maison rénovée se trouve directement sur le bord de la route, elle va être moins populaire que celle à laquelle on accède par un petit chemin privé, entourée de trois lacs, avec la tranquillité que ça offre », croit-il.
Miguel Verreault précise que les maisons au goût du jour ont peu la cote en campagne.
Le monde veut être plongé dans le traditionnel. Lorsque tu visites une propriété et que tu vois des poules se promener ou une maman chat avec ses bébés, ça a l’effet du parfum d’une tarte aux pommes sur les acheteurs. Ça les aide à se projeter dans cet emplacement.
Miguel Verreault, courtier immobilier
Même si les acheteurs de fermettes prévoient élever des animaux, cultiver des légumes, des herbes, des petits fruits ou des fleurs, ils s’intéressent peu à la qualité du sol. « Personne ne demande des tests de sol pour être sûr que leurs concombres poussent bien, dit le courtier. C’est un besoin du côté des fermes commerciales. »
Pas si vite !
Avant de déposer une offre d’achat sur une fermette en apparence rêvée, il est primordial de vérifier le zonage pour s’assurer que les projets sont réalisables. « Par exemple, si on veut construire un petit poulailler, ça peut être interdit si c’est trop proche de la route ou d’un voisin. Ça varie selon le zonage ou les règlements municipaux », explique Julie Aubé, qui a fait de sa fermette personnelle une microferme commerciale en 2021.
Pensez également aux fosses septiques. « Certaines vieilles maisons rurales ont des systèmes désuets », rappelle M. Verreault. Sans oublier le puits, pour s’assurer que l’eau est potable et que les capacités du puits sont suffisantes. « Un jour, nous avons été surpris de voir que notre puits était vide, explique Mme Aubé. Comme on n’a pas le budget pour en faire creuser un autre, on s’est adaptés avec des méthodes de récupération d’eau de pluie. »
Mise de fonds
Contrairement à certaines informations diffusées sur le web, vous n’avez pas besoin d’une mise de fonds plus élevée. « Une fermette, c’est une maison où on peut faire autre chose sur le terrain, comme certaines personnes installent une piscine, dit Miguel Verreault. Les mises de fonds plus élevées, c’est pour l’exploitation agricole. »
Une information confirmée par Desjardins. « C’est le même fonctionnement que les autres financements, sans particularité pour la mise de fonds, explique la porte-parole Chantal Corbeil. Desjardins finance les fermettes à des fins personnelles. Les composants commerciaux ne sont pas permis. Il doit s’agir d’un mode de vie. »
Son de cloche similaire à la Banque Nationale. « Quand un particulier achète une fermette pour ses loisirs, nous finançons la résidence principale et un maximum de cinq acres de terrain, souligne Alexandre Guay, conseiller senior. Autrement, le client sera référé à notre service aux entreprises. »
Fermettes à vendre : coup d’œil
Il y a des centaines de fermettes à vendre en ce moment au Québec. Bucoliques ou campées dans un paysage agricole, modestes ou d’envergure, voici un tour d’horizon de quelques propriétés qui ont capté notre attention.