L’été dernier, un couple s’est lancé dans la construction d’une maison dite « passive », c’est-à-dire à la consommation énergétique très faible. Depuis les premiers croquis jusqu’à la remise des clés, nous avons suivi en trois étapes son projet mené à Ham-Sud, en Estrie. Dans ce troisième et ultime chapitre, tour du propriétaire en compagnie de Nathalie et Philippe, qui ont commencé à résider dans leur maison, en attente des finitions.

Certes, il y a eu des retards, des coûts et des défis imprévus. Le revêtement, qui présentait des irrégularités, sera installé un peu plus tard, et la salle de bains est encore en chantier. Mais quel bonheur pour Nathalie Larouche et Philippe Candelier d’investir leur demeure finalement sortie de terre, en tant que nouvelle pierre d’un écovillage jouxtant le mont Ham.

« Ça ne finit plus de finir, l’un des chefs de chantier nous avait prévenus que ce serait un marathon, il avait raison ! », souffle le couple, qui avait revendu sa maison de Longueuil à la fin d’août et trouvé refuge dans sa roulotte en attendant que sa nouvelle propriété soit habitable.

Début octobre, les propriétaires ont enfin pu se glisser sous un toit tout neuf, guettant le moment de vérité : cette maison passive est-elle vraiment performante côté écoénergétique ? « Elle est super confortable. Nous avons eu des nuits à 0 °C, et la température intérieure est passée de 22 à 21 °C le matin, sans chauffage. On s’est aussi absentés deux jours, la maison a perdu seulement 2 °C », relèvent-ils.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Philippe relève en continu la température intérieure grâce à une application. Conclusion : la maison reste confortable, y compris sans chauffage ou en l’absence de ses occupants.

Les divers éléments octroyant le statut de maison passive sont donc efficaces, à savoir une abondante fenestration côté sud, une isolation très musclée farcie d’une couche de cellulose, des membranes respirantes, du triple vitrage et une étanchéisation maximale, entre autres.

On pourrait la chauffer avec un simple sèche-cheveux. Un quart de son volume d’air se renouvelle par heure, ce qui est beaucoup plus performant par rapport à la norme Novoclimat. Le professionnel qui est venu faire les tests d’étanchéité pensait que sa machine était brisée !

Philippe Candelier, copropriétaire

Au pire du pire, une thermopompe et quelques radiateurs (qui risquent de prendre la poussière) ont été installés. Pour l’entièreté de la maison, le couple prévoit une facture d’électricité mensuelle moyenne de 50 $.

Mais en été, la demeure ne risque-t-elle pas de se transformer en fournaise géante ? D’après les calculs des propriétaires, la chaleur ne pouvant y entrer, le soleil, plus haut perché, étant moins pénétrant par la fenestration, les lieux devraient garder leur fraîcheur. « S’il fait 30 °C dehors, cela devrait monter de 1 °C à l’intérieur… à condition de ne pas ouvrir les fenêtres », prévoient-ils.

Maison passive, proprios actifs

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Philippe Candelier et Nathalie Larouche ont commencé à habiter dans leur maison passive à Ham-Sud, laquelle est pratiquement terminée.

Au moment de notre passage, à la fin octobre, les salles de vie étaient quasiment terminées, ainsi que les chambres. Outre le revêtement extérieur et l’installation de la douche, il restait à poser des plinthes, de l’ardoise locale et de la céramique, entre autres. Encore un peu de travail pour les ouvriers et les occupants, puisque ces derniers ont participé à la construction, s’attelant par exemple aux travaux d’étanchéisation ou à la fixation d’un plafond en pin blanc.

Malgré tout, l’atmosphère des lieux a commencé à se forger, grâce au très beau coup d’œil sur le mont Ham, au plafond cathédrale de la chambre principale et aux meubles placés (on note un chaleureux comptoir de cuisine en noyer).

On a prévu un espace de rangement en haut de la chambre, on pourra aussi y aménager une mezzanine pour que notre petit-fils puisse y dormir quand il aura l’âge.

Nathalie Larouche, copropriétaire

Dans l’autre chambre, un lit mural rabattable permettra d’optimiser l’espace légèrement plus restreint de la pièce. À l’extérieur, quand le nivellement sera terminé, un gazebo devrait pousser sur leur terrain, qui s’étend sur 5000 m⁠2 (53 820 pi⁠2). Une borne de recharge pour un véhicule électrique a aussi été prévue.

Quant à leur nouveau quartier, un écovillage baptisé « Au pied du mont Ham », il les a agréablement surpris, grâce à de bonnes relations avec le voisinage et à la mise à disposition d’une maison commune louable pour un évènement ou pour loger des invités. Ils ont aussi reçu la visite de propriétaires implantés non loin de chez eux, inspirés par le concept de maison passive et désireux de savoir comment s’y prendre… sans nécessairement pousser les aménagements écoénergétiques aussi loin. « On leur a conseillé de prioriser l’étanchéité de la maison, qui est un facteur crucial », rapporte Nathalie.

Viser le siècle

Et le budget ? Les imprévus et décisions prises en cours de route ont pas mal fait déborder les colonnes Excel. Sur un projet calibré au départ à quelque 300 000 $ avant la pandémie, la barre oscille autour de 500 000 $.

Malgré tout, Nathalie et Philippe s’avouent très satisfaits de leur nouveau foyer. Et si c’était à refaire, ils se relanceraient dans le même projet, avec de simples ajustements, notamment en matière de coordination des différents travaux, pour éviter certains couacs.

De toute façon, les propriétaires sont très transparents sur un point : ce n’est pas avec des visées de rentabilité qu’ils se sont lancés dans l’aventure du passif-solaire, mais davantage pour ses vertus de durabilité et sa valeur environnementale à long terme.

« C’est une maison qui durera 100 ans avant de commencer à se dégrader, alors que la plupart des constructions commencent à devenir des passoires au bout de 40 à 50 ans », estime Philippe. Ils ne seront plus là pour le vérifier, disent-ils en riant, mais n’est-ce pas là un bel exemple de transmission aux générations futures ?

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Qu'est-ce qu'une maison passive ?

Selon l’organisme Écohabitation, c’est une résidence utilisant peu d’énergie pour demeurer confortable à longueur d’année. C’est son orientation et sa structure maximisant le rayonnement solaire ainsi que son isolation thermique et son étanchéité qui lui permettent de réduire ses besoins en chauffage de manière significative, même en hiver. Le concept de maison passive reste variable d’un projet à l’autre.