Le couple qui vient d'emménager dans le chalet Grand Pic, oeuvre d'Appareil architecture, vit au rythme du temps et des saisons grâce à une intégration contemporaine de la nature dans ce projet hors des sentiers battus. Visite guidée des lieux, qui respirent la quiétude et l'harmonie.

Au milieu des arbres

Lumineux, épuré et centré sur l'essentiel, le projet Grand Pic d'Appareil architecture propose une nouvelle image du chalet. Les silhouettes de ses deux bâtisses de tôle noire et de verre s'élancent vers le ciel comme les arbres de la forêt qui les abrite.

Diane et Jean-François, habitants de la Rive-Sud et parents de deux grands enfants, ont mis trois ans avant de trouver le terrain de leur futur chalet dans les Cantons-de-l'Est. Celui-ci, situé en lisière d'une forêt proche du lac Memphrémagog et de pistes de ski, compte six acres peuplées de chevreuils et autres créatures des bois.

«Nous voulions profiter pleinement de la nature, et retrouver une certaine quiétude par rapport à notre quotidien à la ville, vivre autre chose», explique Jean-François.

C'est une promenade sur le site à l'automne 2015 avec Kim Pariseau, fondatrice d'Appareil architecture, et Robert Lavoie, architecte chargé de projet, qui a nourri le travail de recherche. «Diane et Jean-François avaient vu la maison boréale, construite en 2012, dont ils appréciaient l'intégration au site forestier, explique Robert Lavoie. Une percée offrant un point de vue privilégié sur la forêt nous a donné l'idée de travailler sur la verticalité et d'exploiter la hauteur suggérée par les lieux.»

Perspectives

La firme d'architecture montréalaise a respecté le souhait des propriétaires de suivre l'«architecture» des lieux en jouant avec les proportions et le verre pour apporter une touche contemporaine à l'habitat. À l'arrivée, le chalet de 1464 pi2, construit avec un budget de 300 000 $, est un havre de paix baigné de lumière où les hôtes vivent en lien étroit avec la nature. Ce budget a pu être maintenu grâce, notamment, à une préfabrication de certains éléments en usine et à l'utilisation de tôles d'acier ondulé pour les façades. Une astuce qui a également permis de raccourcir la durée du chantier et de réduire son impact sur l'environnement.

Des ouvertures vitrées, choisies en fonction du paysage et de l'ensoleillement, forment des tableaux qui évoluent au fil de la journée et des saisons. Pour profiter du plus beau point de vue de la maison et renforcer la proximité avec la nature, une gigantesque baie vitrée a été choisie pour un des côtés du salon. Les montants verticaux noirs de celle-ci soulignent la hauteur peu commune du rez-de-chaussée (25 pi) qui a pu être conservée grâce à un étage réduit au-dessus de la cuisine. «Pour garder l'idée du chalet, nous avons préféré un dortoir à des chambres pour loger nos enfants et nos invités», explique Jean-François. «Nous y avons posé des cloisons basses pour offrir une certaine intimité», termine l'architecte. L'espace bénéficie de l'abondante lumière du rez-de-chaussée grâce à des ouvertures de la taille d'une fenêtre dans la chambre du couple et la salle de bains.

S'en tenir au minimum

Pour sa conception et sa construction, le maître-mot de ce chalet a été la simplicité. «C'est cette idée qui a guidé l'articulation des lieux, résume Robert Lavoie. Un plan rigoureux a permis de concentrer les fonctions et de dégager de l'espace de vie», poursuit-il. Dès l'entrée, en bas de l'escalier menant au dortoir, une sorte de cube de service permet ainsi de cacher l'équipement ménager et de rassembler tout le nécessaire pour des activités au grand air. Un seul revêtement, le béton poli, avec système de chauffage intégré, a par ailleurs été choisi pour le rez-de-chaussée. En plus d'offrir une chaleur uniforme, la surface emmagasine celle-ci la journée et la redistribue la nuit. Six mois après leur installation, Diane et Jean-François savourent les fins de semaine dans la maison où ils songent à s'établir une fois la retraite venue. «Nous y sommes en immersion avec la nature. Chaque changement de temps ou de saison nous fait vivre des émotions différentes», se réjouissent-ils.

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

Le salon et la salle à manger

Des idées inspirantes

Le chalet Grand Pic a été pensé pour profiter de la nature, accueillir des visiteurs et devenir peut-être une résidence principale à la retraite. Quelques astuces ont contribué à une conception qui répond à ces besoins. Les voici.

Cube de rangement

Pour rentabiliser l'espace, disposer de rangements sans encombrer l'intérieur et obtenir un effet visuel épuré, l'architecte a proposé de concentrer un maximum de choses dans un noyau de service sous la forme d'une sorte de cube en bois. On accède à celui-ci dès l'entrée, où une première ouverture sert de grand vestiaire «essentiel pour les bottes de ski», note Jean-François. Le cube permet aussi le camouflage de la salle mécanique, de la ventilation de la hotte de la cuisine et du gros électroménager, ainsi que du garde-manger.

Coin dortoir

Les propriétaires ont fait aménager une seule chambre «classique» à l'étage avec des fenêtres dans un mur donnant sur la forêt et une ouverture murale sur le salon en contrebas et la forêt en arrière-plan. Deux alcôves définies par des cloisons basses et des rideaux accueillent un lit double pour les visiteurs. Des étagères ont été intégrées dans celles-ci, ce qui permet de créer une petite bibliothèque ou de personnaliser l'espace avec une petite décoration. Un éclairage du lampiste Hamster a également été fixé à la cloison.

Mobilier intégré

Toujours dans un souci d'utiliser l'espace intelligemment, le mobilier a été intégré au chalet. Mis à part la table de la salle à manger, conçue par un artisan de la région, et le salon, celui-ci ne compte aucun meuble «extérieur». Pour conserver la simplicité de départ, Appareil architecture a prévu un rangement en merisier, le même bois que pour les murs, le couloir de l'étage ainsi que la grande baie vitrée du salon-salle à manger. Le haut de ce mobilier discret, fabriqué par l'ébéniste Niconova, peut servir de banquette pour lire devant la fenêtre.

Long îlot de cuisine

Afin de renforcer l'impression de convivialité lorsqu'ils reçoivent leur famille ou leurs amis, Diane et Jean-François ont opté pour une cuisine ouverte avec un long îlot autour duquel les invités peuvent s'installer pendant qu'ils cuisinent. «Combiner la cuisine avec la salle à manger et le salon permet aussi de retrouver une certaine intimité lorsque nous sommes deux», fait remarquer Jean-François. Le bas de l'îlot a été recouvert de lattes de peuplier peintes en blanc en rappel du mur de l'étage traité de la même façon.

Économie d'entretien

Il était hors de question pour les propriétaires de perdre du temps en travaux d'entretien lors de leurs fins de semaine pendant la vie active et lors de leur retraite ensuite. Le choix d'une façade en tôle plutôt qu'en bois rend ceux-ci superflu, du moins pendant un long moment. «En forêt, dans un milieu humide, l'utilisation de bois aurait nécessité beaucoup d'entretien», souligne l'architecte Robert Lavoie. Pareil pour le revêtement métallique du toit et la grande terrasse en cèdre côté salon qui, avec le temps, développera une patine grise.

Photo David Boily, La Presse

Un cube de bois où se concentrent plusieurs services.

La chaleur du bois

L'immersion dans la forêt a été travaillée à l'aide des formes élancées du chalet et de son abri, des ouvertures vitrées sur celle-ci, ainsi qu'avec une utilisation du bois à l'extérieur comme à l'intérieur. Éclairage en quatre points.

Murs en merisier

Le côté industriel, un peu froid, de la façade de tôle et l'architecture minimaliste du chalet sont équilibrés grâce à un usage du bois pour l'intérieur. On retrouve celui-ci sur les murs, les plafonds et les escaliers grâce à un placage en merisier et des lattes de peuplier. «L'idée était de créer une ambiance semblable à celle du couvert végétal», explique Robert Lavoie. Le paysage forestier qui apparaît à travers les grandes fenêtres prend ainsi des airs de tableaux, et constitue l'unique «décoration murale des lieux».

Brut c. blanc

Le bois du mur de l'étage de repos côté salon a été peint en blanc, tout comme l'îlot de la cuisine, afin de marquer un contraste avec le rez-de-chaussée et de souligner la forme de la construction qui s'inscrit dans le paysage local. L'utilisation du blanc pour le rez-de-chaussée et d'un placage de merisier pour l'étage a été envisagée au début du projet, mais finalement abandonnée par crainte d'un effet «éblouissant» dû à l'abondante lumière lors des journées ensoleillées.

Trottoir en cèdre

Les espaces extérieurs du chalet ont été pris en considération dès l'arrivée sur le site. Un stationnement a été aménagé légèrement en retrait, ce qui permet de s'approcher du chalet à travers les arbres. Le sentier aboutit à un trottoir «flottant» en cèdre menant au chalet et à l'abri où sont rangés outils et équipement d'extérieur. Comme pour la maison boréale, qui a fortement inspiré ce projet, cette initiative doit permettre à la végétation des bois, dans laquelle on retrouve des fougères, de reprendre sa place, et aux propriétaires de vivre en harmonie avec elle.

Palette naturelle

À côté du mobilier intégré proposé par Appareil architecture, Diane et Jean-François se sont cantonnés au bois pour les autres éléments souhaités. Des tronçons de bouleaux de la forêt servent de tables de nuit, et une souche d'érable récupérée dans la grange du frère de Diane et montée sur roulettes fait office de table de salon. Vue de la chambre de couple, celle-ci forme un trait d'union entre l'intérieur et l'extérieur. Pour la décoration du lieu fraîchement investi, seules des teintes naturelles ont été retenues.

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

Le paysage forestier qui apparaît à travers les grandes fenêtres prend des airs de tableaux.