Au Rizen, ferme biologique de Frelighsburg, Stéphanie Wang cultive 26 variétés de légumes, surtout asiatiques. En la suivant sous un soleil de plomb dans ses cinq acres de terre, on croque les végétaux qu’elle nous tend, tous d’une extrême fraîcheur.
Il y a le gai lan, hybride entre le bok choy et le brocoli. « C’est ce qu’on sert au dim sum », explique Stéphanie Wang, en faisant référence aux repas de petites bouchées qu’on peut manger dans certains restaurants cantonais. Puis le choy sum et ses petites fleurs jaunes. Le tatsoy au petit goût citronné. Le chrysanthème comestible, que la maraîchère ajoute à ses smoothies. Et ça continue...
Stéphanie Wang est née à Montréal ; ses parents sont des Cantonais d’origine qui ont grandi à Madagascar. Après une maîtrise en sociologie de l’agriculture, la jeune femme a fait un stage aux célèbres Jardins de la Grelinette, modèle de ferme biologique rentable sur petite surface. « J’ai aussi fait du wwoofing [bénévolat dans des fermes contre le gîte et le couvert] dans différents pays, précise la maraîchère. Je me suis formée par essais et erreurs. »
Reconnexion
C’est sa cinquième saison de culture à Frelighsburg, sur des parcelles qu’elle loue à ses beaux-parents. « Chaque année, elle m’arrive avec des affaires que je ne connais pas », témoigne Stanislas Pettigrew, son conjoint, agriculteur lui aussi.
Pourquoi se spécialiser dans les légumes asiatiques ? « C’est une façon de me reconnecter à ma culture, de lui rendre hommage et de l’entretenir », répond-elle. Quand Stéphanie Wang était petite, sa mère préparait des plats asiatiques, « mais elle faisait aussi des recettes de Coup de pouce », s’exclame-t-elle.
La maraîchère vend ses beaux légumes tous les samedis au marché de Sutton, ainsi qu’à l’épicerie Tradition de Frelighsburg et en ligne, via la coopérative Le terroir solidaire. Le Rizen propose aussi du kimchi, de la vinaigrette asiatique et du pesto de mizuna dans des boutiques, comme chez Conserva à Montréal. « Il y a vraiment une grande ouverture des gens, assure Stéphanie Wang. Ils sont super contents de manger quelque chose de nouveau. »
Sauté asiatique de la ferme Le Rizen
« Repas simple, santé et savoureux ! », dit Catherine Morin, employée de la ferme Le Rizen.
Pour deux portions
Ingrédients
• 1 gousse d’ail
• 1 grosse poitrine de poulet, coupée en bouchées
• 10 champignons en tranches
• 2 tiges de céleri tranchées
• 2 bok choy tranchés
• 3 tiges de choy sum
• 2 oignons verts tranchés
• 3 c. à soupe (45 ml) de sauce soya
• 1 c. à soupe (15 ml) de sirop d’érable
• 2 c. à soupe (30 ml) d’huile de cuisson (au choix : canola, olive, tournesol, coco)
• 1 c. à soupe (15 ml) d’huile de sésame
• 1 pincée de graines de sésame noires et blanches en garniture
• Vermicelles de riz pour 2 personnes
Préparation
1. Faire cuire les vermicelles selon les indications du fabricant et réserver.
2. Dans un poêlon, chauffer 1 c. à soupe d’huile de cuisson à feu moyen. Faire revenir le poulet jusqu’à ce qu’il soit cuit. Réserver.
3. Ajouter 1 c. à soupe d’huile de cuisson. Faire revenir les légumes de 3 à 5 minutes, en remuant régulièrement. Incorporer le poulet, la sauce soya, l’huile de sésame et le sirop d’érable. Bien mélanger.
4. Servir sur les vermicelles et garnir de graines de sésame.
Un vrai jardin d’Edem
Au Jardin d’Edem, c’est une ferme biologique d’East Farnham où l’on trouve des classiques, comme fraises, courgettes et tomates. Mais aussi des végétaux plus originaux pour qui n’a jamais mis le pied (ni la langue !) en Afrique : le gboma (épinard africain), le gombo (ou l’okra), la corète potagère, le brède mafane, etc.
Edem Amegbo, du bien nommé Jardin d’Edem, a émigré du Togo au Québec pour y être technicien en électronique. Au bout de quelque temps, changement de cap : il a fait un certificat en horticulture à l’Université Laval, avant de travailler à la ferme Samson, à Farnham.
Il a désormais sa propre ferme, sur quatre acres en location. Avec son équipe, il cultive une trentaine de légumes — on peut suivre leurs aventures sur la page Facebook du Jardin d’Edem, qui vaut le détour.
Été trop court
Les légumes africains représentent environ le tiers de la production. « La demande est là », témoigne Edem Amegbo, qui a adopté les expressions de sa terre d’accueil. « Je me fais achaler tout le temps ! » Sa clientèle d’origine africaine est friande de végétaux frais, bien meilleurs que les variétés importées ou congelées dont ils doivent souvent se contenter. « Il y a aussi des clients québécois qui sont curieux et qui veulent les essayer », assure le maraîcher.
Si les légumes africains poussent bien dans le chaud été québécois, il est toutefois trop court à leur goût (on les comprend). « C’est un défi, parce qu’ils ont souvent besoin de deux ou trois mois pour être prêts, indique Edem Amegbo. Il faut les planter tôt. Mais si on les plante trop tôt, on peut se faire pogner par le gel… Si je m’écoutais, je ferais beaucoup de légumes africains. Mais ce n’est pas réaliste. »
Envie d’y goûter ? Il sera bientôt possible d’acheter à la ferme de l’épinard africain, tandis que l’okra et l’aubergine africaine devraient être prêts en août.
> Consultez la page du Jardin d’Edem
Gombos d’Edem
Pour un souper entre amis, Edem Amegbo propose ce riz accompagné d’une sauce à base d’épinards africains et d’okras. « Un régal », assure le maraîcher.
Ingrédients
• 500 g de gombos, ou d’okras, finement coupés
• 2 tasses d’épinard africain
• 1 1/2 tasse de poivrons rouges
• 10 g de gingembre
• 2 gousses d’ail
• 300 g de crevettes
• 1 poisson fumé
• 1 oignon
Garniture
• 1 tasse d’aubergine africaine
• Gombos, ou okras, au goût
Préparation
1. Laver les gombos et les hacher finement.
2. Écraser ensemble l’ail, l’oignon et le gingembre (c’est le n’tutu).
3. Décortiquer les crevettes.
4. Porter un verre d’eau à ébullition dans une grande casserole avec un petit morceau d’akam (kanwa) ou une pincée de bicarbonate de soude.
5. Ajouter l’épinard africain, cuire trois minutes, puis incorporer les gombos et mélanger.
6. Ajouter le n’tutu, laisser bouillir 5 minutes, puis ajouter les crevettes.
7. Saler et poivrer au goût (ou utiliser un cube de bouillon de crevettes).
Garniture
1. Dans une casserole d’eau bouillante, cuire les aubergines africaines et les okras quelques minutes (ils ne doivent pas être trop mous). Couper les aubergines en quartiers.
2. Servir avec du fufu (plat africain à base d’igname), de la pâte de maïs ou tout simplement du riz.
Précieuses herbes sud-américaines
Peu après son immigration de la Bolivie, en 2007, Sylvia Meriles a été étonnée de voir des compatriotes s’échanger des semences de fines herbes. « Les gens gardaient précieusement les plantes dans les pots, décrit-elle. On ne comprenait pas pourquoi, parce qu’en Bolivie, ce sont les fines herbes qu’on trouve dans tous les jardins. »
Ces herbes rares au Québec, ce sont la quilquiña (ou coriandre bolivienne) et le huacatay. « On se sert des feuilles de quilquiña pour garnir les soupes, les pizzas et les salades », énumère Sylvia Meriles. Quant au huacatay, dont la saveur rappelle la menthe, ses feuilles sont utilisées dans les mojitos et les tisanes.
Agronome de formation, Sylvia Meriles a eu l’idée d’en cultiver au Québec. À sa ferme biologique Les Jardins Épicés, à L’Île-Bizard, elle fait pousser à la fois des légumes plus traditionnels et des spécialités sud-américaines. « Je suis très fière de ce qu’on a fait cette année », dit la maraîchère, en faisant visiter le demi-hectare de terre qu’elle loue.
Tomatilles pour salsa verde
Dans la serre luxuriante poussent notamment des tomatilles, qui ressemblent à de petites tomates vertes, utilisées dans la salsa verde. En plus des incontournables quilquiña et huacatay, on trouve en champs des haricots haba (sorte de gourgane) et du caigua (ou cyclanthère). « Le caigua donne un fruit vide, qu’on farcit, explique Sylvia Meriles. Son goût est entre le concombre et le poivron. » Des piments forts, dont le rocoto du Pérou, sont aussi cultivés aux Jardins Épicés.
Mange-t-on tout ça en Bolivie ? « Là-bas, le maïs et la patate, c’est tout ce qu’on mange, lance-t-elle avec humour. En fait, les Boliviens consomment aussi des tomates, de la laitue, des oignons et des herbes, mais c’est moins varié qu’ici. »
Sylvia Meriles vend cette année ses végétaux au nouveau marché que ses collègues fermiers et elle ouvrent les samedis, à L’Île-Bizard. Avec un peu de chance, on pourra y goûter la quilquiña et le huacatay, voire acheter de précieuses semences. « Je fais la promotion de mes herbes, dit-elle, et ça me surprend : il y a des gens qui y goûtent pour la première fois et qui en achètent. »
> Consultez la page des Jardins épicés
Recette
Sylvia Meriles suggère de simplement parsemer des feuilles de quilquiña hachées sur une pizza ou dans une salade.