Les microdistilleries du Québec ne manquent pas d’originalité. Dans Charlevoix, la famille Dufour vient de lancer un alcool élaboré avec un produit encore plus inusité : le lactosérum. Connue pour son fromage Migneron, elle est la première fromagerie québécoise à valoriser ainsi le petit-lait.
Au pied des collines de Baie-Saint-Paul, les brebis de la famille Dufour profitent de l’été pour sortir en troupeau. Les bêtes ne se doutent pas qu’à proximité du champ, leur lait est transformé de multiples façons : en fromage, en crème glacée et, depuis peu, en alcool.
« Il faut que je donne le crédit à mon père Maurice, dit d’emblée Madeleine Dufour. Il a eu cette idée il y a 15 ans. Comme toutes les fromageries, on doit se débarrasser de manière propre du petit-lait après la production de fromage. On cherchait à le faire de manière novatrice. »
Chez les Dufour, ce liquide résiduel s’accumule par milliers de litres. Légèrement sucré, le petit-lait est souvent utilisé pour nourrir des animaux. La Famille Migneron de Charlevoix, l’entreprise familiale, a toutefois trouvé le moyen de rendre ce résidu de la production de fromage plus rentable : le transformer en alcool.
Sur la bouteille, l’étiquette affiche l’échelle de production : il faut une vache ou neuf brebis pour produire 25 L de lait. Ce volume est nécessaire pour fabriquer une meule de fromage et engendre 18 L de lactosérum. Cette quantité de petit-lait permet de produire une bouteille de 750 ml d’eau-de-vie.
Presque neutre
Le liquide incolore et fluide ressemble à première vue à la vodka. Ses odeurs lactées et herbacées démarquent cependant le produit.
« Pour ma part, le côté végétal me fait penser à la tequila, analyse Madeleine Dufour, responsable de la distillation. Même si ça ne provient pas d’une plante. »
Il a fallu deux années de recherche et d’essais avant que les premières bouteilles d’eau-de-vie de petit-lait arrivent à la SAQ. La jeune femme élaborait déjà du gin avec le marc de raisin du vignoble familial, mais la distillation du petit-lait s’est avérée plus complexe et peu documentée.
Ailleurs dans le monde, quelques rares entreprises distillent le lactosérum. C’est le cas de Black Cow en Angleterre, de Gimet en France et de Vermont Spirits aux États-Unis. Elles présentent toutes leur boisson comme de la vodka.
Au restaurant Les Faux Bergers, adossé à la Maison d’Affinage des Dufour, l’eau-de-vie de petit-lait est servie sur glace ou en cocktail.
« On joue sur les saveurs lactées qu’on n’a pas dans les autres alcools, ajoute Madeleine Dufour. On le mélange avec du blanc d’œuf ou de la crème. »
De nouveaux arômes viendront bientôt s’ajouter dans le shaker, car Mme Dufour travaille sur un nouveau produit pour mettre en valeur le lactosérum : un gin de petit-lait. Cet alcool devrait être mis en vente dans les prochains mois.
Charlevoyou Eau-de-Vie de Petit Lait, 48 $, 14409915.
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