Une campagne électorale, c’est long, fait de moments forts et d’autres à oublier. Alors que les chefs franchissent le fil d’arrivée, voici leurs bons et moins bons moments.

Coalition avenir Québec

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

François Legault, chef de la Coalition avenir Québec

Associer immigration et violence

À quelques reprises durant cette campagne, François Legault a dû s’excuser. L’une de ses controverses les plus marquantes aura été quand il a associé immigration et violence, en affirmant au sujet de l’intégration des nouveaux arrivants que « les Québécois sont pacifiques, ils n’aiment pas la chicane, ils n’aiment pas les extrémistes, ils n’aiment pas la violence, donc il faut s’assurer qu’on garde ça comme c’est là ». Sur son compte Twitter, devant la controverse que ses propos avaient suscitée, M. Legault s’est ensuite rétracté. « L’immigration est une richesse pour le Québec. L’intégration sera toujours un défi pour une nation francophone en Amérique du Nord. Je n’ai pas voulu associer l’immigration à la violence. Je suis désolé si mes propos ont porté à confusion. Ma volonté c’est de rassembler », a-t-il écrit. En fin de campagne, beaucoup l’ont aussi critiqué pour avoir affirmé qu’il serait « suicidaire » d’augmenter les seuils d’immigration au-delà de 50 000 immigrants par an.

En homme d’État aux Îles-de-la-Madeleine

Quand l’ouragan Fiona est passé aux Îles-de-la-Madeleine, François Legault a pris une brève pause de sa campagne pour aller constater les dégâts. La visite aux Îles était prévue depuis plusieurs jours dans le cadre de ses activités de campagne. C’était avant que Fiona n’apparaisse sur le radar et change l’objet de la visite. Il a notamment promis 100 millions de dollars supplémentaires pour aider les municipalités à lutter contre l’érosion des berges, en plus d’assurer aux Madelinots que le gouvernement offrirait un dédommagement pour les maisons qui n’étaient pas assurées. Ce passage a été l’occasion pour le chef caquiste de se montrer en homme d’État, qui assume ses responsabilités, après des débats des chefs qui avaient été somme toute difficiles pour lui, étant attaqué de tous les côtés par ses opposants.

Problème « réglé » à l’hôpital Joliette

Lors d’un échange sur le racisme systémique avec Dominique Anglade, le chef de la CAQ a par ailleurs déclaré que « le problème qui est arrivé avec Mme Joyce [Echaquan] à l’hôpital de Joliette, il est maintenant réglé ». Sa sortie a provoqué frustration et indignation dans la Nation atikamekw, mais aussi chez le conjoint de la défunte, Carol Dubé, que M. Legault avait cité en affirmant que le problème était réglé. « Il a profité de mon silence. Ce silence-là, j’en avais besoin pour me guérir, pour guérir mes enfants et ma communauté », a expliqué M. Dubé à la chroniqueuse de La Presse Isabelle Hachey, le 20 septembre dernier. Le jour même, le premier ministre sortant présentait ses « excuses sincères » au conjoint de Joyce Echaquan.

Le « bouclier contre l’inflation » a bien passé

Plafonnement des tarifs gouvernementaux, aide directe aux contribuables, baisses d’impôt ; quoi qu’on pense des mesures du « bouclier contre l’inflation » de François Legault, ce dernier s’est avéré une mesure payante politiquement pour la Coalition avenir Québec (CAQ), qui s’est imposée comme le parti qui redonnerait de l’argent à la population. Les caquistes ont d’ailleurs établi dès le départ que la question de l’urne serait l’inflation et la crise du coût de la vie. Ça s’est notamment senti dans les entrevues locales dans les circonscriptions, avec chacun des candidats, qui ramenaient cette priorité au premier plan chaque fois qu’ils en avaient l’occasion.

Parti libéral du Québec

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

Dominique Anglade, cheffe du Parti libéral du Québec

Anglade talonne Legault sur l’immigration

À plusieurs reprises, lors de cette campagne, la cheffe libérale Dominique Anglade est parvenue à se poser comme la figure d’opposition à François Legault en immigration. Si beaucoup d’autres l’ont aussi fait, Mme Anglade est régulièrement revenue sur le sujet, en laissant notamment entendre que le premier ministre sortant veut « diviser les Québécois ». Seule femme en lice contre quatre hommes et première Québécoise issue d’une minorité racisée à aspirer à la fonction de premier ministre, Mme Anglade a aussi accusé son adversaire caquiste de tenir des propos « minables », voire de réduire les nouveaux arrivants à une vision « simpliste », en n’hésitant pas à parler de sa vie personnelle pour mettre l’enjeu de l’inclusion québécoise au premier plan, notamment lors des débats des chefs.

Marwah Rizqy en demande plus pour la sécurité

Lorsqu’elle a annoncé avoir été menacée de mort à plusieurs reprises par un citoyen, la députée libérale Marwah Rizqy n’a pas fait que dénoncer la situation ; elle a aussi lancé un débat public autour du renforcement des mesures de sécurité pour les élus de l’Assemblée nationale, reconnaissant « qu’il y a quand même une certaine tension sociale ». Elle a notamment réclamé que l’Assemblée nationale se dote d’un « bouton panique » pour les élus. « Notre rôle, ce n’est pas d’alimenter cette colère, c’est de calmer le jeu, de trouver des solutions, de parler avec eux », a-t-elle dit, reprochant toutefois peu après à Éric Duhaime de « canaliser la haine ».

Un cadre financier corrigé… deux fois

Le chroniqueur de La Presse Francis Vailles a révélé à la mi-septembre que le cadre financier du Parti libéral du Québec (PLQ), qui se présente comme « le parti de l’économie », contenait une erreur importante, qui avait pour effet de sous-estimer la dette du Québec de 12 milliards. Le responsable des finances du parti, l’ancien ministre Carlos Leitão, a alors corrigé cette première erreur. « Le calcul de la dette est complexe et probablement que ç’a été fait un peu trop vite. Je le concède. Mais nous ne sommes pas les seuls à faire des ajustements », a-t-il alors reconnu. Plus tard, une autre erreur a été relevée. Le cadre financier surestimait notamment de 506 millions de dollars sur cinq ans les revenus d’une taxe sur les géants du numérique (GAFAM) et les fruits de la lutte contre les paradis fiscaux.

Une campagne manquant d’éclat

Selon plusieurs observateurs, la campagne qu’a menée Dominique Anglade ne s’est pas démarquée par rapport à celle des autres chefs. Un récent sondage Léger pour les médias de Québecor plaçait d’ailleurs la cheffe libérale au dernier rang pour la meilleure campagne, avec seulement 7 % des répondants allant en ce sens. Ses performances aux débats des chefs ont aussi été moins appréciées que celles de ses adversaires. Dans les derniers jours de la campagne, le changement de ton de la cheffe s’est d’ailleurs clairement fait sentir : Mme Anglade a tenté d’être beaucoup plus personnelle, en parlant de « la vraie Dominique », de sa vie personnelle, de son parcours, le tout afin d’apparaître plus sympathique et « accessible » aux yeux du grand public en vue du jour du scrutin.

Québec solidaire

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Gabriel Nadeau-Dubois, co-porte-parole de Quebec solidaire

La performance de Gabriel Nadeau-Dubois aux débats

De manière générale, Gabriel Nadeau-Dubois a reçu un traitement médiatique et une critique plutôt favorables lors des deux débats des chefs, du moins davantage que certains de ses autres adversaires. Le deuxième débat a d’ailleurs été marqué par des attaques répétées de son adversaire caquiste François Legault, qui l’a pris pour cible à de nombreuses reprises à propos de ce qu’il appelle ses « taxes orange », en référence aux hausses d’impôt qu’il veut percevoir sur les revenus plus élevés.

Un plan chiffré en environnement

Cela a été souligné sur toutes les tribunes : Québec solidaire est l’un des seuls partis à avoir présenté un plan environnemental s’attaquant à la crise du climat qui est chiffré, modélisé, dans le droit fil des recommandations des rapports du GIEC et, surtout, approuvé par des experts indépendants. « On a approché plusieurs scientifiques avec des expertises complémentaires », a notamment expliqué en entrevue à La Presse Jérôme Dupras, professeur à l’Université du Québec en Outaouais, qui a été sondé par le parti. « Nous avons eu accès, sous embargo, aux approches de modélisations, projections, budgets, etc., du parti. Nous avons eu des présentations, on a répondu à nos questions. »

Le feuilleton du dépliant volé

Québec solidaire a dû gérer toute une crise quand sa candidate dans la circonscription de Camille-Laurin, Marie-Eve Rancourt, a été filmée par la caméra de sécurité d’une maison alors qu’elle retirait d’une boîte aux lettres un dépliant du Parti québécois (PQ), pour le remplacer par le sien. Elle a d’abord présenté ses excuses, avant de finalement retirer sa candidature. Signe qu’il s’agissait d’une patate chaude pour Gabriel Nadeau-Dubois, celui-ci a mis des heures à s’exprimer sur le sujet à ce moment, alors qu’il rendait visite à la mairesse Valérie Plante à l’hôtel de ville de Montréal.

Recul et exemption pour les agriculteurs

Début septembre, tous les partis ont durement attaqué la proposition de Québec solidaire (QS) d’instaurer un impôt sur les actifs nets de plus de 1 million de dollars et les grandes successions, en plaidant que la mesure nuirait au secteur agricole. Gabriel Nadeau-Dubois a finalement reculé en annonçant peu après qu’il exempterait les terres agricoles. Le chef parlementaire solidaire devait alors, dans les heures suivantes, tenir une rencontre avec les agriculteurs de l’Union des producteurs agricoles (UPA).

Parti québécois

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Paul St-Pierre Plamondon, chef du Parti québécois

Une campagne positive

Les électeurs québécois ne s’entendent pas sur grand-chose, mais la plupart d’entre eux sont d’accord sur un point : le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, a mené une bonne campagne électorale. Ils lui ont d’ailleurs attribué la meilleure performance lors du deuxième débat des chefs et « la meilleure campagne », selon un coup de sonde de la firme Léger publié le 27 septembre. Après la défaite historique du PQ en 2018, le chef ne pouvait que causer la surprise.

Une attaque « trop spontanée » contre la reine

Au moment où toute la planète est ébranlée par la mort d’Élisabeth II et que tous les politiciens québécois offrent leurs condoléances à la famille royale, le chef du Parti québécois décide de jeter un pavé dans la mare. « Bien que j’offre aussi mes condoléances à la famille, je m’oppose à ce que la nation québécoise mette son drapeau en berne », lance-t-il sur Twitter. La déclaration choque la population et lui vaudra d’être accusé par le premier ministre, François Legault, de faire de la « petite politique » sur le dos de la reine. Paul St-Pierre Plamondon finira par reconnaître qu’il a réagi trop rapidement.

À la défense d’une candidate dans l’embarras

Un article du Courrier Laval révèle que la candidate du PQ dans Laval-des-Rapides, Andréanne Fiola, a participé à un court film pornographique en 2021. La femme de 22 ans n’est pas reconnaissable dans la vidéo, mais ses tatouages permettent de l’identifier. Émotif, Paul St-Pierre Plamondon se porte à la défense de sa candidate en condamnant « l’injustice et l’hypocrisie » derrière ce qu’il qualifie de campagne de salissage. « Que la personne qui n’a jamais consommé de pornographie ici et dans la société jette la première pierre », déclare-t-il.

Une timide tournée de la Gaspésie

Les sondages en ce début de campagne prédisent une défaite historique au Parti québécois, même en Gaspésie, où il pourrait être rayé de la carte. Pourtant, le chef péquiste n’y tient aucun grand rassemblement militant lors de sa tournée de la région. Paul St-Pierre Plamondon se défend de ne pas attirer les foules et affirme avoir choisi de s’arrêter dans « des villes moins grandes » en assumant que les évènements seraient plus modestes.

Parti conservateur du Québec

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Éric Duhaime, chef du Parti conservateur du Québec

Les taxes impayées d’Éric Duhaime

Assez tôt dans la campagne, plusieurs histoires de taxes impayées rattrapent le chef conservateur. D’abord, Le Journal de Montréal révèle que ses taxes municipales sont en souffrance, puis La Presse fait état de la taxe scolaire impayée du chef, un dossier auquel a dû se mêler un huissier. Éric Duhaime tente de se défendre en révélant qu’il laisse un ami habiter la demeure pour l’aider et que celui-ci devait payer les taxes foncière et scolaire en contrepartie, mais qu’il a finalement dû s’acquitter de ces factures.

Le « méga-rassemblement » au Centre Vidéotron

L’idée est partie d’une boutade lancée par la candidate Anne Casabonne, lors du lancement de la campagne du parti, lorsqu’elle avait blagué qu’il faudrait louer le Centre Vidéotron pour accueillir les nombreux partisans de la formation politique. L’idée se concrétise le 16 septembre lorsque le Parti conservateur du Québec tient son plus grand rassemblement de la campagne électorale. Plus de 2000 personnes se massent dans le hall de l’amphithéâtre et des centaines d’autres doivent regarder le discours d’Éric Duhaime sur un écran géant installé dans le stationnement.

Le mur et Donald Trump

La campagne électorale tire à sa fin lorsqu’Éric Duhaime propose la construction d’un mur à la frontière entre le Québec et les États-Unis en réaction à un reportage de Radio-Canada au sujet de la somme d’un demi-milliard dépensée par le gouvernement fédéral pour accueillir les demandeurs d’asile empruntant le chemin Roxham. Or, le chef conservateur s’indigne de s’être fait comparer à l’ex-président américain par son adversaire caquiste, François Legault, et considère toujours l’analogie comme boiteuse.

Duhaime talonne Legault sur le troisième lien

À la recherche du maximum de votes dans la région de Québec, où il tente lui-même de se faire élire, Éric Duhaime talonne le premier ministre afin qu’il dévoile les études menées sur son précédent projet de troisième lien entre Québec et Lévis à l’est, via l’île d’Orléans. Lors des deux débats des chefs et à Tout le monde en parle, Éric Duhaime remet sans relâche le sujet sur le tapis. Le chef conservateur va même jusqu’à se rendre aux bureaux du ministère des Transports, à Québec, pour y déposer une demande d’accès à l’information afin d’obtenir ces études.