(Orford ) Après Jean Chrétien, c’était au tour de Brian Mulroney de faire une première apparition dans cette campagne, mercredi. Devant les militants conservateurs, il s’est dit assuré que le prochain gouvernement sera formé par Erin O’Toole. S’il est élu, ce dernier a d’ailleurs promis d’envoyer l’homme d’affaires Vincent Duhamel, candidat dans Brome-Missisquoi, « à la table des décisions ».

« J’ai besoin d’une importante délégation de députés québécois dans un gouvernement conservateur. Les Québécois doivent faire partie du conseil des ministres. Je vous demande d’envoyer Vincent Duhamel à la table des décisions. J’ai besoin de Vincent pour assurer une reprise économique dans chaque secteur et dans toutes les régions de notre pays », a martelé M. O’Toole devant une salle comble.

C’est d’ailleurs M. Duhamel – qui est pressenti pour devenir ministre des Finances sous un éventuel gouvernement conservateur – qui avait ouvert la cérémonie en affirmant voir le « potentiel d’une deuxième vague bleue » se pointer au Canada. « On est plus que quatre jours avant le changement », a-t-il dit.

Plus tôt, Brian Mulroney s’était montré très confiant en vue du scrutin. « Je suis devenu chef, Erin aussi. Je suis devenu leader de l’opposition officielle, Erin aussi. Je suis devenu premier ministre du Canada et la semaine prochaine, Erin le sera aussi », a lancé l’homme de 82 ans, qui a été chaudement ovationné dès le départ. « Quand j’ai un accueil aussi généreux, il y a une pensée qui me vient en tête : est-ce que c’est trop tard pour un come-back ? », a-t-il d’ailleurs ironisé.

Sur une note plus sérieuse, M. Mulroney a vanté « la vision et le courage » d’Erin O’Toole, qu’il juge capable « de prendre les décisions nécessaires afin de régler les grands défis auxquels le Canada est confronté », dont la sortie de la pandémie.

PHOTO ADRIAN WYLD, LA PRESSE CANADIENNE

Le chef du Parti conservateur du Canada, Erin O’Toole

« Que cherche Erin O’Toole d’abord et avant tout comme premier ministre ? Deux choses fondamentales : l’unité nationale et une prospérité soutenue et constante pour les Canadiens. La déclaration du premier ministre Legault à son égard est d’ailleurs très révélatrice », a renchéri M. Mulroney, en décrivant M. O’Toole comme quelqu’un de « dur et juste ». « C’est un homme de bon jugement. […] Il fera honneur au poste de premier ministre. Il suscitera l’admiration et la fierté », a-t-il insisté.

Tous les dirigeants politiques canadiens ont manifestement du courage, et sont bien intentionnés. Je ne suis donc pas là ce soir pour attaquer qui que ce soit. Je suis ici pour une seule raison : aider à élire Erin O’Toole comme prochain premier ministre.

Brian Mulroney, ancien premier ministre conservateur

M. O’Toole a aussi lancé dans son allocution « que cette élection est aussi un choix sur la confiance ». « On est très différents, Justin Trudeau et moi. Je suis né au Québec et j’ai grandi en Ontario, dans une famille de la classe moyenne. Justin a tout eu dans sa vie. Et moi, je travaillais très fort pour les avoir », a-t-il dit, accusant le chef libéral de « tenir les Québécois pour acquis, comme son père avant lui ».

Une sortie qui contraste

Sur le plan politique, la sortie de l’ancien premier ministre conservateur marque un fort contraste avec les dernières années. Si M. Mulroney s’était fait plutôt discret lors de la dernière élection – alors qu’Andrew Scheer était le chef des conservateurs – il avait ouvertement critiqué Stephen Harper en 2014, lui reprochant notamment de diminuer le pouvoir canadien sur la scène internationale en entretenant des relations tendues avec Washington et les Nations unies, notamment.

Pour des sources à l’interne au Parti conservateur, la mentalité « progressiste » de Brian Mulroney coïncide bien avec l’image « renouvelée » que veut offrir Erin O’Toole, en dépit du règne assez lointain de l’homme de 82 ans, dont le mandat comme premier ministre remonte au siècle dernier, entre 1984 et 1993.

Mardi, l’ex-premier ministre libéral, Jean Chrétien, aujourd’hui âgé de 87 ans, avait livré un discours devant environ 400 partisans, regroupés dans une salle de réception, sans distanciation sociale, où il a livré ses pensées sur l’élection en cours, tout en prenant soin de lancer des attaques aux adversaires des libéraux.

« Quand je regarde le chef de l’opposition, vous savez, il fait quelque chose que je ne peux pas faire. Sur les garderies, sur le contrôle des armes à feu, sur l’avortement, sur les changements climatiques, […] il parle des deux côtés de la bouche ! » a fustigé M. Chrétien, en blâmant aussi le chef bloquiste Yves-François Blanchet pour son conflit avec la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick (SANB). « Il a prétendu qu’il a parlé au nom des Acadiens. Et les Acadiens ont dit : mêle-toi de tes affaires. »