(Mississauga) Le chef libéral Justin Trudeau prétend que l’entente conclue avec Québec de 6 milliards sur cinq ans servira à créer les 37 000 places manquantes au Québec. Pourtant, ce n’est pas le cas, réplique le gouvernement Legault.

« L’affirmation de M. Trudeau n’est pas exacte. Le 6 milliards est lié à une entente sans condition et ne servira pas automatiquement à la création de places en garderie. C’est une somme qui s’en va dans les coffres du gouvernement du Québec et c’est le gouvernement du Québec, seul, qui va décider comment il sera dépensé », a déclaré Ewan Sauves, attaché de presse du premier ministre François Legault.

M. Trudeau a tenu une conférence de presse avec M. Legault le 5 août dernier pour annoncer la conclusion de cette entente faite dans le cadre du programme de garderies à 10 $ par jour que souhaitent implanter les libéraux fédéraux. Comme le Québec a déjà mis sur pied son propre réseau dans les années 90, il a obtenu une pleine compensation financière du gouvernement fédéral.

À ce moment-là, M. Legault avait été questionné à quelques reprises par les journalistes pour savoir quelle proportion irait à la création de nouvelles places ou à l’amélioration des conditions des éducatrices en garderies. « Ce qui est important, c’est que dans l’entente, c’est Québec qui va choisir de l’utilisation de ces sommes-là », avait répondu le premier ministre du Québec.

Il n’avait toutefois pas révélé quelle portion de la somme de 6 milliards serait bel et bien dédiée au réseau des garderies québécoises et s’il choisissait d’en utiliser une partie pour d’autres dépenses de l’État. « Pour l’instant, notre estimé, c’est 37 000 places qui manquent au Québec. […] Donc on va mettre en place le nombre de places qui est nécessaire », avait-il dit.

À une autre journaliste qui insistait pour connaître la proportion accordée aux nouvelles places, il avait répondu : « On n’a pas toutes les données pour être capable de répondre de façon précise à votre question ». Il a promis plus de précisions à l’automne.

Et la semaine dernière, alors que M. Legault annonçait sa liste d’épicerie aux chefs de partis politiques fédéraux, il a réitéré que l’entente fédérale était sans condition. « On n’est même pas obligés d’investir l’argent dans les garderies », avait-il précisé.

Depuis le début de la campagne électorale, M. Trudeau répète que l’entente de 6 milliards va créer les 37 000 places manquantes dans la province. Appelé à s’expliquer, vendredi, le chef libéral a déclaré que « c’est exactement ce que François Legault a dit quand il était à côté de (lui) » lors de cette conférence de presse, début août.

« M. Legault propose d’utiliser une partie de ces 6 milliards pour créer 37 000 places en garderies et je trouve que c’est une très bonne idée. Alors je l’appuie pleinement. C’est tout à fait dans sa juridiction, il n’a pas besoin de mon appui et je suis tout à fait d’accord avec lui qu’il fasse ça », a soutenu M. Trudeau, qui était de passage à Mississauga, en Ontario.

« C’est de l’argent du fédéral qui va permettre la création de ces 37 000 places. On voit et on sait que de créer plus de places en garderies, d’offrir des places en garderies abordables et de qualité à travers le pays, c’est la bonne chose pour les familles, c’est la bonne chose pour l’économie. On le sait, parce que ça a été démontré depuis 25 ans au Québec », a-t-il poursuivi.

Au bureau de M. Legault, on convient qu’une partie de cette somme servira probablement à financer la création de places.

« Mais il est faux de dire que c’est grâce au fédéral que le gouvernement complétera son réseau de places en garderies, la preuve étant que le ministre de la Famille, Mathieu Lacombe, avait déjà annoncé en mai dernier que le réseau allait être complété avant même de savoir qu’on aurait ce 6 milliards », a argué M. Sauves dans une déclaration transmise à La Presse Canadienne.

« Le gouvernement du Québec se réjouit d’être compensé sans condition par le gouvernement fédéral, mais rappelons que jamais le gouvernement fédéral n’a créé ou ne créera de places en garderies au Québec. Il s’agit d’une compétence exclusive du Québec », a-t-il ajouté.

En mai dernier, Québec annonçait que pour compléter son réseau, il lui fallait encore créer 22 000 places, en plus des 15 000 places qui sont déjà en appel de projets. Actuellement, on compte plus de 50 000 enfants sur la liste d’attente pour obtenir une place.