Jugeant que la pandémie devrait être la priorité à court terme, le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, a déploré dimanche que le déclenchement de la campagne risquait d’évacuer les enjeux les plus importants en pleine quatrième vague, à un moment où la transmission augmentera inévitablement, selon lui.

« Dans une campagne électorale qui aurait suivi la crise, on aurait pu parler de comment on va prévenir une autre possible pandémie, plus ou moins différente de celle-ci », a-t-il soutenu, citant au passage le modèle agricole québécois, la production de pétrole, les réalités des aînés, l’économie des régions ou encore la production de vaccins comme autant d’enjeux qui risquent d’être mis de côté ou négligés dans la foulée des élections fédérales.

Mais au lieu de parler de tout ça, « on va chaque jour analyser les chiffres du jour : combien de nouveaux cas, combien de nouvelles hospitalisations et, dramatiquement, combien de décès », a martelé M. Blanchet.

On va se demander chaque jour quelle organisation de campagne va être la première à avoir une éclosion de COVID-19. Autrement dit, on va être rivés sur le quotidien, plutôt que d’être portés vers une vision d’avenir.

Yves-François Blanchet, chef du Bloc québécois

Position « très irresponsable »

Pour l’ancien ministre péquiste, le scrutin fédéral n’en est pas un « sur la sortie de la pandémie, mais bien sur un premier ministre qui refuse le mandat des électeurs confié en 2019 ». « On a un premier ministre qui veut une majorité alors que les Québécoises et les Québécois ont laissé comprendre assez clairement qu’ils ne veulent pas d’une majorité libérale à la Chambre des communes », a-t-il soutenu.

M. Blanchet a aussi fait un parallèle avec l’imposition de la vaccination obligatoire chez les fonctionnaires fédéraux, affirmant que la situation est à ce point « sérieuse » qu’il est probablement « trop dangereux d’aller aussi en campagne électorale ».

Pendant cette campagne, le bloquiste compte aussi « demander des comptes à celles ou ceux qui se sont permis, au cours des deux dernières années, de se faire un fonds de commerce de l’habitude de traiter le Québec et les Québécois de racistes ».

Ainsi, le déclenchement d’élections fédérales, alors qu’il restait encore deux ans au mandat minoritaire des libéraux, est « très irresponsable », selon le chef du Bloc. La décision a d’ailleurs été généralement dénoncée par tous les partis de l’opposition à la Chambre des communes dans les derniers jours. Des experts en santé publique ont aussi soulevé plusieurs questions sur les risques que pose une telle campagne, alors que le variant Delta gagne du terrain dans plusieurs provinces.

« La santé publique a perdu »

À Toronto, la leader du Parti vert du Canada (PVC) a, elle aussi, dressé une liste de raisons pour ne pas tenir d’élections, allant des incendies en Colombie-Britannique à la quatrième vague de la pandémie.

« La santé publique a perdu au profit de l’ambition politique », a lancé Annamie Paul d’un trait. « Ils avaient raison », a-t-elle ajouté en parlant de ses propres enfants, qui étaient persuadés que des élections seraient déclenchées malgré la pandémie.

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La cheffe du Parti vert, Annamie Paul

« Nous sommes ici parce que les libéraux ont décidé qu’ils veulent tout le pouvoir, qu’ils veulent une majorité et ils pensent que c’est maintenant le meilleur moment pour l’obtenir », a insisté la femme de 48 ans, depuis la circonscription de Toronto-Centre, où elle tentera pour la troisième fois de remporter un siège aux Communes cet automne.

Sur Twitter, la cheffe du Parti vert a persisté et insisté sur le fait que « ce n’est pas le moment d’organiser des élections », alors que « nous sommes toujours en pleine pandémie et que la quatrième vague est ici ». « La population canadienne doit choisir. Les verts se battront pour s’attaquer à la crise climatique et compléter notre filet de sécurité sociale », a-t-elle promis au passage.

Mme Paul a aussi fait un lien avec les incendies de forêt dans l’ouest du pays et les nombreuses évacuations qu’ils provoquent, en plus des vagues de chaleur qui atteignent les 40 degrés Celsius dans certains secteurs, affirmant que ces phénomènes préoccupants devraient être la priorité absolue du gouvernement.

« Le PVC incarne ce changement positif. Construisons un meilleur avenir », a-t-elle dit.

Dans les prochaines semaines, les électeurs pourront assister à deux débats organisés par la Commission des débats des chefs. Le 8 septembre, ce sera en français et le 9 septembre, en anglais. D’autres débats pourraient aussi être tenus. Reste à voir quels chefs y seront invités et lesquels accepteront les invitations.