Tous les quatre ans, Pierre Hébert vit la même situation fâcheuse. En période électorale, il reçoit à son domicile des cartes d’électeurs… destinées à des personnes décédées.

M. Hébert habite dans une ancienne résidence pour personnes âgées. Il l’a transformée en ressource d’hébergement intermédiaire et y demeure depuis juillet 2000.

Au mois de novembre de la même année, il a commencé à recevoir plusieurs cartes d’électeurs. Sur les sept cartons parvenus à son domicile portant le nom d’anciens résidants, quatre concernaient des personnes qui avaient rendu l’âme depuis un certain temps.

Le scénario s’est répété quatre ans plus tard, aux élections fédérales de 2004. À la grande surprise de M. Hébert, une des cartes portait le nom d’une personne dont il avait signalé le décès au bureau de scrutin. Encore une fois, M. Hébert a pris le temps de signaler l’erreur. « J’ai fait mon devoir de citoyen en les informant de la situation, mais je n’ai jamais eu de réponse », relate-t-il.

Il y a quelques jours, le résidant de Sainte-Élizabeth-de-Warwick recevait non sans surprise d’autres cartes électorales. Cette fois-ci, elles étaient adressées à des gens décédés en 2013 et 2016.

Le fait qu’il continue de recevoir ces documents le sidère.

En tant que contribuable, je m’interroge sur notre système et son organisation. Il me semble qu’on investit beaucoup pour que les deux ordres de gouvernement communiquent entre eux.

Pierre Hébert, propriétaire d’une ancienne résidence pour personnes âgées

L’homme s’inquiète également que de telles cartes électorales se retrouvent entre les mains de gens mal intentionnés. « On parle beaucoup de protection des renseignements personnels et de vols d’identité. Elle est où, la protection ? », se demande-t-il.

Élections Canada indique sur son site officiel que 14 % des renseignements du Registre national des électeurs changent chaque année, en raison du retrait des électeurs décédés et de la modification d’adresse de ceux qui déménagent.

Il est difficile de déterminer si le cas de Pierre Hébert est isolé. « Ce n’est pas vraiment un enjeu soulevé par nos membres », a dit la porte-parole du Regroupement québécois des résidences pour aînés (RQRA) Marie-Claude Dion, perplexe.

Un outil de vérification

Élections Canada se base sur le Registre électoral existant et compile les informations reçues depuis la dernière campagne électorale. Des sources diverses permettent la mise à jour du Registre national des électeurs, comme l’Agence du revenu du Canada ou encore les bureaux de l’état civil des provinces et territoires.

Quelque 27 millions de cartes sont envoyées aux électeurs avant le jour du vote. Des erreurs peuvent se glisser dans cet envoi massif, selon Pierre Pilon, conseiller régional médiatique pour Élections Canada.

On déplore ces situations et on s’en remet à la collaboration du public pour nous les signaler. On a des cas où la famille ou les proches d’une personne ne signalent pas son décès. ».

Pierre Pilon, d’Élections Canada

Les cartes d’information ont pour but de s’assurer de l’identification des personnes inscrites au Registre électoral. La majorité des erreurs sont dues à des informations non communiquées, comme un changement d’adresse. Il incombe à l’électeur d’appeler Élections Canada pour y remédier.

Une fois l’information erronée signalée au bureau de scrutin, les corrections sont faites.

Une carte d’électeur ne garantit pas que son détenteur pourra voter. Il s’agit simplement d’un outil de vérification qui sert aussi à informer les électeurs de la tenue du vote. Ils doivent par ailleurs fournir une pièce d’identité avant d’exercer leur devoir de citoyen. Aucun risque dans ce cas de fausser les résultats ou de s’en servir à mauvais escient, rassure M. Pilon.