Le gouvernement du Québec a annoncé la semaine dernière la mise sur pied de formations accélérées pour former 1000 auxiliaires en santé et services sociaux afin de renforcer le soutien à domicile.

Une tendance se dessine : les formations accélérées semblent être devenues la solution privilégiée par le gouvernement pour corriger ses erreurs du passé. On l’a vu avec les formations accélérées pour les préposés et préposées aux bénéficiaires en CHSLD, il y a quelques mois avec les formations accélérées dans l’industrie de la construction et aujourd’hui avec les formations accélérées pour les soins à domicile.

Une autre tendance que nous observons : le gouvernement agit seul, sans consulter la société civile et les intervenants du milieu.

Le gouvernement agit comme s’il était le seul à savoir comment résoudre les problèmes du Québec, mais doit rétropédaler par la suite pour corriger les problèmes générés par ses solutions.

Lors d’une rencontre avec le premier ministre en début d’année 2023, il nous a informés de son intention de procéder à une phase 2 pour la formation accélérée des préposés aux bénéficiaires visant les CHSLD, mais aussi les maisons des aînés, une promesse qu’il peinait à livrer. À cette proposition, j’ai répondu à M. Legault que cela pourrait bien être une fausse bonne idée. Je me suis permis alors de lui expliquer pourquoi.

Vases communicants

Certes, former rapidement des préposés aux bénéficiaires pourrait sembler une solution immédiate pour pallier le manque criant de personnel dans les CHSLD. Cette décision prise une première fois en gestion de crise pendant les temps forts de la pandémie peut, en ces circonstances particulières, s’expliquer et se justifier.

Il faut cependant garder à l’esprit que cette démarche a eu pour conséquence de vider les ressources déjà précaires dans le reste du réseau, notamment dans les organismes qui travaillent dans les soins à domicile. Ces organismes, souvent issus de l’économie sociale et des organismes à but non lucratif, peinent déjà à maintenir leurs activités à flot, souffrant d’un faible financement récurrent, et sont incapables de donner des conditions de travail à la hauteur de l’importance de leurs rôles.

En déplaçant la main-d’œuvre vers les CHSLD, le gouvernement prenait le risque de délaisser un secteur tout aussi essentiel que les soins à domicile, ce qui pourrait l’obliger à injecter des sommes additionnelles afin de réparer les effets des décisions antérieures.

C’est exactement ce que nous constatons aujourd’hui. En janvier dernier, dans son rapport Bien vieillir chez soi, tome 4, la commissaire à la santé et au bien-être a sonné l’alarme sur la question des soins à domicile. Alors que les CHSLD répondent à 98,9 % du besoin en nombre d’heures requises, les ressources intermédiaires et ressources de type familial (RI-RTF) n’y répondent qu’à 68,8 % et ce pourcentage chute à 10,7 % pour les soins à domicile.

Il est crucial de comprendre que notre système de santé ne fonctionne pas en compartiments isolés, mais plutôt comme un écosystème. En privilégiant des solutions ponctuelles et hâtives, répondant à des enjeux à court terme, le gouvernement risque de créer des déséquilibres qui auront des répercussions à long terme sur l’ensemble du système de santé. Nous devons apprendre des erreurs passées, où des décisions précipitées ont souvent mené à des ajustements ultérieurs coûteux, tant sur le plan financier que sur le plan humain.

Depuis 2020, la CSD plaide pour la tenue d’états généraux sur l’hébergement et le soutien aux aînés et aux personnes vulnérables de notre société. Nous croyons fermement qu’une telle démarche permettrait de réunir l’ensemble des acteurs concernés, du terrain jusqu’aux décideurs politiques, afin de construire ensemble des solutions durables et adaptées aux besoins réels de la population.

Il est temps que le gouvernement fasse preuve d’humilité, qu’il cesse de prendre seul des décisions qui concernent la société tout entière et qui méritent une plus grande participation collective. Le gouvernement doit s’engager dans un dialogue sincère avec la société civile et les professionnels du terrain. Seul un tel échange pourra nous permettre de construire un système de santé solide, équitable et pérenne pour les générations à venir.

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