Alors qu’on entre dans une nouvelle semaine de grève dans le secteur public, nous répondons aux questions de quatre lecteurs sur les négos.

Nous avons deux syndicats de profs. Comment ça fonctionne pour boucler les négociations ? Y a-t-il une seule entente ? Les deux syndicats acceptent-ils la même offre ?

Félix B. Laflamme, Sainte-Martine

Réponse : Le processus de négos est complexe, mais on peut le résumer ainsi : en pratique, il y a une seule grande entente et toutes les enseignantes ont les mêmes conditions de travail. Qu’elles fassent partie de la Fédération autonome de l’enseignement (FAE) ou de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ).

Pour les questions importantes (par exemple salaires, régime de retraite, assurances, ratios d’élèves par classe, services aux élèves), le gouvernement signe deux conventions collectives distinctes avec la FAE et la CSQ. Sauf que ces conventions ont habituellement des clauses de parité, aussi appelées « clauses remorques ». Résultat : toutes les enseignantes bénéficient en pratique de la meilleure entente négociée par les deux syndicats.

Elles ont donc les mêmes conditions de travail, peu importe leur syndicat. Heureusement. On ne voudrait pas des ratios d’élèves par prof différents selon les syndicats ou les régions. (Il y a des différences entre les conventions de la FAE et de la CSQ, mais elles sont mineures.)

La dernière fois, la FAE a signé avant la CSQ, mais avec une clause de parité. Quand la CSQ a signé sa convention, la clause de parité s’est appliquée et toutes les enseignantes (celles de la FAE comme de la CSQ) ont obtenu les mêmes hausses de salaire (6 % sur trois ans).

La FAE représente 65 000 enseignantes, la CSQ, 95 000 enseignantes et 45 000 professionnels et membres du personnel de soutien.

Les aides à la classe proposées par le gouvernement offriront-elles de l’aide pédagogique aux élèves ou feront-elles d’autres tâches comme l’aide à l’habillage des enfants et le classement du matériel en classe ?

Hélène Auclair, Gatineau

Réponse : Les aides à la classe, principalement des employées du service de garde, n’enseigneront pas en classe (c’est la tâche des profs) et ne feront pas d’interventions auprès d’élèves en difficulté (c’est la tâche des techniciennes en éducation spécialisée, ou TES).

Elles peuvent faire tout le reste : assurer la discipline et le calme dans la classe, donner un coup de pouce aux élèves pour se mettre au travail, répondre aux questions pendant les travaux, prendre les présences, épauler les élèves qui se préparent pour aller à l’extérieur.

Dans le cadre d’un projet pilote, 100 écoles ont testé la présence d’aides à la classe. Les résultats ont été très encourageants. « Ça a changé ma vie », a dit une enseignante à Radio-Canada⁠1.

Québec aimerait ajouter des aides dans 15 000 classes du primaire. Pour ce faire, il doit s’entendre avec les syndicats et modifier les conventions collectives.

1. Lisez l’article « L’arrivée d’aides à la classe a “changé la vie” d’enseignantes » de Radio-Canada

Est-ce vrai que la clause remorque va avantager tous les fonctionnaires (et les députés) si les syndiqués obtiennent des hausses salariales ?

Catherine Lamarre, Granby

Réponse : On ne peut pas prédire l’avenir, mais oui, les fonctionnaires devraient obtenir les mêmes hausses salariales que les syndiqués de l’éducation et de la santé. C’est ce qui est toujours arrivé par le passé. Les 60 000 fonctionnaires sont représentés par deux syndicats qui ne font pas partie du Front commun. Ils sont moins avancés dans leurs négos que les syndicats de l’éducation et de la santé. Les fonctionnaires pourraient faire la grève, mais seulement en 2024.

Les cadres de la fonction publique obtiendront aussi les mêmes hausses salariales. Les députés de l’Assemblée nationale y ont aussi droit (ils ont les mêmes hausses que les cadres), mais le gouvernement Legault a décidé que les députés ne toucheront pas cette hausse en 2023. Les députés se sont déjà voté au printemps une hausse salariale de 30 %.

Les hausses salariales liées à la hausse du coût de la vie qui sont demandées par le Front commun pourraient-elles entraîner le Québec dans une autre spirale inflationniste ?

Yves Brasseur, Saint-Adolphe-d’Howard

Réponse : Non. Soyez rassurés : même si Québec accordait des hausses salariales couvrant l’inflation (17,7 % sur cinq ans) ⁠2, ça ne ferait presque pas bouger l’inflation. Comme on n’a pas les chiffres, on ne peut pas faire de calculs avec précision, mais ça générerait une hausse très faible de l’inflation, probablement inférieure à 0,1 %.

« Ce serait minime [comme hausse de l’inflation], rien de majeur », indique l’économiste Stephen Gordon, professeur à l’Université Laval.

Le ministère des Finances prévoit au Québec une inflation de 4,6 % en 2023, 2,7 % en 2024, 2,1 % en 2025, puis 2,0 % en 2026 et en 2027.

Certes, les hausses salariales augmentent le salaire disponible des employés du secteur public, qui peuvent dépenser cet argent et contribuer (de façon minime) à l’inflation. Au moins, ces hausses ne sont pas refilées dans les prix, comme c’est le cas dans le secteur privé. « Les services publics ne deviendront pas plus chers », dit M. Gordon. Par contre, il pourrait y avoir un effet d’entraînement sur les hausses salariales du secteur privé qui, elles, peuvent éventuellement se refléter dans les prix.

2. Lisez la chronique « Négos : à 18,7 %, on a une entente ? »

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