« Le journalisme, c’est de l’enseignement » se plait à dire Pierre Gingras. Au fil de ses 50 ans de carrière à La Presse, à la radio et à la télé, il a su piquer votre curiosité et élargir vos connaissances sur les oiseaux, la chasse, la pêche et les fleurs. À la retraite depuis 2009, il écrit toujours une chronique sur les plantes dans nos écrans.

Il nous a accueillis dans sa demeure de Boucherville, une maison de ferme soigneusement entretenue et mise à niveau avec sa compagne, Martha Gagnon. Après nous avoir donné la chance de contempler les clématites, les azalées, les hortensias, les délicats pavots couleur corail, l’anemonella et autres sabots de la vierge jaunes, il a généreusement accepté de dévoiler les souvenirs les plus marquants de sa carrière à La Presse.

L’amour éclot au travail

Nous n’étions pas les seuls visiteurs chez les Gagnon-Gingras par ce chaud matin de juillet. Pendant notre discussion, Martha est discrètement entrée chercher un peu de pain pour contenter les corneilles qui rôdaient aux alentours, preuve que le couple est réellement à l’écoute de son environnement.

Leur vaste terrain s’est beaucoup transformé dans les 40 dernières années. Pierre et Martha ont planté chaque arbre, chaque plante, et les entretiennent consciencieusement. Lui est plus investi dans la sélection des végétaux, et elle optimise l’harmonie et l’esthétique de leur oasis colorée, un savoir-faire que Pierre admire chez sa conjointe.

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Une sculpture d’autruche venue directement du Zimbabwe apporte une touche ludique au jardin de Pierre et Martha 

Cette complémentarité, ils l’ont développée dès leur rencontre à La Presse, et l’ont mise à profit en copilotant le programme de stages des aspirants journalistes pendant trois étés. Pierre arrivait tôt le matin pour s’affairer à la gestion logistique et aux affectations, et Martha prenait le relai en fin de journée pour la mise en page, la formulation des textes et la correction. Marc Cassivi, Isabelle Ducas, Louise Leduc, Marc Thibodeau, Yan Pineau, Yvon Laprade, Vincent Marissal (député de Rosemont), Marie-Andrée Chouinard (rédactrice en chef au Devoir) et Pasquale Turbide (Radio-Canada), entre autres, ont eu Pierre et Martha comme mentors.

La rencontre d’Alex, le perroquet surdoué

Pierre se définit comme un expert des oiseaux. Il est d’ailleurs particulièrement fier de son livre Secrets d’oiseaux paru en 1995. Cet intérêt est toutefois arrivé tardivement dans son parcours.

En 2001, Pierre s’est rendu à Boston pour observer Alex, un perroquet gris d’Afrique considéré comme un phénomène dans le monde animal. L’oiseau avait des connaissances s’apparentant à celles d’un enfant âgé de 5 à 7 ans, et avait atteint un niveau de communication jusqu’alors jugé impossible chez un animal. L’article de Pierre s’est retrouvé en une de La Presse le 9 avril 2001.

C’est après cette rencontre que Pierre a adopté Gri-Gri, son fidèle compagnon à plumes. « Gri-Gri est omniprésent dans notre vie. On l’a depuis plus de 20 ans. On ne peut pas s’éloigner 24 h sans qu’il aille à la garderie. » Contrairement à Alex, Gri-Gri ne « parle » pas. En revanche, il aime bien se faire bécoter dans le cou et grignoter ses friandises de prédilection : quelques pennes crus et des noix de cajou.

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Pierre Gingras et son compagnon ailé Gri-Gri, un perroquet gris d’Afrique

La chronique chasse et pêche comme bougie d’allumage

Adolescent, Pierre lisait déjà la chronique chasse et pêche qu’il alimenterait à son tour pendant 20 ans.

Alors qu’il enseignait la biologie et l’écologie dans une école secondaire, il rédige sa première chronique de chasse et pêche à La Presse, le 24 avril 1973. Ce passage naturel vers l’écriture lui a donné la piqure du journalisme. « Ma job, c’est journaliste. Je dois trouver des nouvelles, j’essaie toujours d’avoir quelque chose de nouveau. » Contrairement aux aspects plus techniques qui se trouvaient dans les magazines spécialisés, Pierre proposait un angle différent. « Je n’ai jamais dit aux gens comment tuer un chevreuil ni comment attraper un brochet. Ce qui m’intéressait, c’était l’aspect biologique, le comportement du gibier. » Cette chronique, il l’a maintenue tout au long de sa carrière, en parallèle de son emploi comme journaliste aux actualités générales et chef de division.

Des déplacements marquants pour couvrir l’actualité

Quand Pierre repense à ses reportages marquants hors Québec, son passage à Hong Kong arrive en tête. En octobre 1984, il s’y est rendu comme envoyé spécial pour couvrir le legs au Jardin botanique de Montréal d’une collection de 30 bonsaïs provenant d’un banquier chinois. Pierre Bourque, directeur du Jardin à ce moment, était au rendez-vous. Au même moment, René Lévesque était en pleine tournée asiatique, en compagnie de personnalités du monde des affaires. Monsieur Lévesque avait invectivé Pierre sur le fait que La Presse couvrait le don de bonsaïs plutôt que sa tournée.

Pierre cite aussi la couverture de l’assassinat de John Lennon en 1980 à New York et son arrivée à Isla Margarita et Caracas, au Venezuela, pour couvrir l’une des premières révolutions dans le pays.

L’impact incontesté de ses chroniques

Certains signes ne mentent pas lorsqu’on mesure l’impact de son travail. Pierre se souvient très bien de son article présentant Le temps des cerises, une ceriseraie de griottes située à Charrette, en Mauricie. Le week-end suivant la publication de l’article, près de 12 000 visiteurs s’y sont rués. « Je trouvais ça fort, ça m’avait fait un petit velours ! », confie-t-il. Le trafic monstre avait même obligé les autorités à intervenir vu l’affluence hors de l’ordinaire.

Cet intérêt a également été ressenti au milieu des années 1980 lorsque Pierre publiait un carnet d’observation sur les oiseaux. Contrairement à aujourd’hui, les commentaires des lecteurs se faisaient très rares. Mais « À tire-d’aile » était à ce point populaire que Pierre recevait chaque semaine de nombreuses lettres, une preuve tangible de l’ampleur de son lectorat et de l’intérêt pour ses chroniques.

La qualité de son travail a aussi été reconnue en 2014, alors qu’il a été nommé membre honoraire de l’Association des biologistes du Québec pour sa contribution comme vulgarisateur scientifique, une marque de reconnaissance dont il est particulièrement fier.

L'importance de continuer de soutenir La Presse

Pierre est fier de soutenir la mission de La Presse avec des dons. « La Presse est le meilleur journal qu’il n’y a pas », affirme-t-il. « Le mouvement qu’a fait La Presse est exceptionnel. Amasser 7 millions de dollars annuellement, c’est énorme. Ça démontre à quel point au Québec, les gens sont conscients de la qualité de l’information. C’est extraordinaire que ça perdure. » Il souligne au passage l’excellence du travail de ses collègues journalistes qui produisent des textes peaufinés chaque jour et rendent la lecture des nouvelles intéressante.

Quelle fleur aime-t-il offrir ?

À voir l’abondante sélection de photos de fleurs dans le téléphone de Pierre Gingras, on devine que répondre à cette question relève presque de l’impossible. « Jamais de roses, c’est beaucoup trop ordinaire ! », dit-il à la blague. Il préfère offrir des mimosas, dont il aime particulièrement le parfum. Il apprécie également la Martha Bulloch, une variété de pivoine d’un beau rose vif qu’on retrouve dans son jardin. Un hasard ?

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À réécouter

Dans une rencontre numérique, il vous a donné ses meilleurs trucs pour démarrer vos pousses et profiter de la belle saison au maximum.

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