Réunis en assemblée générale extraordinaire, hier, les membres de la Cinémathèque québécoise ont exigé que le conseil d'administration protège «son existence, son autonomie, son statut légal et sa structure de gouvernance» dans tous ses pourparlers avec le gouvernement du Québec, afin de trouver une solution à la crise budgétaire de l'organisme.

Depuis des mois, le ministère de la Culture mène avec Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ) et la Cinémathèque une étude concernant l'intégration partielle ou totale des deux institutions. Ces discussions, où d'autres scénarios sont aussi envisagés, se termineront en juin prochain avec le dépôt d'un rapport à la ministre Hélène David.

Devant une salle pleine à craquer à la Cinémathèque, dans le Quartier latin de Montréal, le C.A. a répété hier que l'organisme à but non lucratif composait avec un manque à gagner annuel d'environ 600 000 $, afin de boucler son budget d'exploitation. En fin de soirée, après plusieurs heures de débats houleux, les membres ont finalement adopté une résolution, sans obtenir un consensus de l'assemblée, qui rappelle qu'il faut préserver son indépendance à tout prix.

Un débat difficile

Les échanges, certains ponctués d'envolées virulentes, ne se sont pas déroulés sans heurt, hier. Au passage, une personne qui siège au C.A. a même menacé de démissionner si l'assemblée adoptait une résolution restreignant sa capacité à étudier toutes les options, y compris l'hypothèse d'une intégration à BAnQ.

«Je vous entends parler de vos tractations, et je vous sens très nerveux. En vous écoutant, je deviens aussi très nerveux», a affirmé le réalisateur Claude Fournier, pointant du doigt le président du C.A., Louis-Philippe Rochon. 

«J'ai l'impression que vous couchez dans le même lit que le gouvernement et que vos conclusions sont déjà faites.»

«Une chose est certaine: oui, on cherche des pistes de solution. On est passés du gouvernement Charest, libéral, au gouvernement Marois, péquiste, puis nous sommes de retour avec un gouvernement libéral. Et peu importe le parti, quand on leur demande si notre subvention peut être augmentée, la réponse est la même. C'est non», a répondu M. Rochon, martelant qu'il travaillait pour assurer la survie de la Cinémathèque.

Plusieurs scénarios envisagés

Alors que se déroulait l'assemblée générale extraordinaire à l'intérieur de la Cinémathèque, une centaine de manifestants se sont massés à l'extérieur, boulevard De Maisonneuve, afin de soutenir l'organisme qui a pour mission la préservation et la promotion du patrimoine audiovisuel québécois.

Pour la première fois depuis le début de cette crise, le C.A. a présenté à ses membres les différents plans à l'étude, en plus de l'intégration partielle ou totale de l'organisme à BAnQ. Ils étudient entre autres la possibilité de vendre certains immeubles, mais aussi de réclamer aux producteurs une part du crédit d'impôt qu'ils reçoivent afin de financer les activités de la Cinémathèque.

«Faire cela, c'est quelque chose de pervers. Les crédits d'impôt sont là pour assurer la production. Si on se met à prendre de l'argent aux producteurs, qui ont déjà de la difficulté à se financer, c'est assez hypocrite. Ça ne les incitera pas à devenir membres et à faire des dons», a toutefois répondu Marie-Josée Raymond, instigatrice et gestionnaire du projet Éléphant, qui restaure et numérise le patrimoine cinématographique québécois.

De nouvelles discussions avec le ministère de la Culture sont prévues le 15 avril prochain. Par la suite, une deuxième assemblée générale spéciale sera organisée à la fin de mai, a promis le C.A., afin de présenter les différents scénarios chiffrés.

Au final, c'est l'assemblée générale de la Cinémathèque, qui ne relève pas du gouvernement, qui fera un choix par vote, a rappelé hier le président de l'organisme, Louis-Philippe Rochon.