Après les violentes critiques du producteur et distributeur Vincent Maraval contre le financement du cinéma français et la polémique qui s'en est suivie, le CNC a contre-attaqué jeudi, son président défendant un système qui permet selon lui l'éclosion de nouveaux talents.

Dans une tribune publiée le 28 décembre par Le Monde, qui lui a valu soutiens et critiques, M. Maraval met notamment en cause le salaire trop élevé de plusieurs vedettes (Dany Boon, Vincent Cassel, Audrey Tautou, Gad Elmaleh...), même quand leurs films sont des échecs, et les compare aux émoluments plus modestes d'acteurs américains.

À l'heure où Gérard Depardieu quitte la France pour raisons fiscales (notre Obélix national, qui affirme avoir «rendu» son passeport, s'est vu décerner, jeudi, la nationalité russe sur ordre de Poutine), Vincent Maraval, co-fondateur de Wild Bunch, avait l'assurance d'être entendu.

«Il n'est pas faux de dire que certains cachets sont trop élevés et que les budgets de certains films sont déraisonnables», a affirmé à l'AFP Eric Garandeau, président du centre national du cinéma et de l'image animée (CNC).

Mais «Maraval prend les plus hauts salaires français et les compare au plus bas salaires américains, sans évoquer les cachets d'un Di Caprio ou d'une Julia Roberts, qui peuvent aller de 10 à 20 millions de dollars», regrette-t-il.

«C'est le propre d'une économie privée: concentrer l'argent sur les stars. Maraval parle de cinq personnes. En France, une vingtaine d'artistes vivent très bien mais des milliers végètent. De plus, la notoriété est fugace. Cette année, on parle beaucoup d'Omar Sy. Avant, on parlait de Michael Youn. Clovis Cornillac aussi a eu sa notoriété», fait valoir M. Garandeau.

Ce dernier reproche également au responsable de Wild Bunch d'avoir qualifié l'année 2012 de «désastre» pour le cinéma français.

Dons d'internautes

«Faux», rétorque-t-il, rappelant les chiffres publiés mercredi par le CNC: plus de 204 millions d'entrées au cinéma en France, malgré un recul de près de 6%, après un cru 2011 «exceptionnel» tiré par deux locomotives, The Artist et Intouchables.

L'évocation par Vincent Maraval d'un cinéma français qui «repose sur une économie de plus en plus subventionnée et de son «fameux système d'aide (qui) ne profite qu'à une minorité», fait également bondir le président du CNC.

«L'argent public est là pour éviter les excès. Le CNC récupère de l'argent sur les entrées (10,7% du prix du ticket), qu'il redistribue aux producteurs de manière dégressive», assure-t-il.

«On récompense les succès et on mutualise les risques. C'est un système qui a permis l'émergence de nouveaux talents, comme Maïwenn (Polisse), Valérie Donzelli (La guerre est déclarée, Main dans la main) ou Michel Hazanavicius (The Artist), a-t-il ajouté.

Si Jérôme Clément, ancien président du CNC et d'Arte renchérit dans Le Monde du 3 janvier en écrivant que «non, le cinéma français ne repose pas sur une économie de plus en plus subventionnée», de jeunes réalisateurs, qui peinent à boucler leur budget, sont plus dubitatifs.

«Le cachet des acteurs, c'est un faux problème. La vraie question, c'est: où va l'argent du CNC?», s'interroge l'un d'entre eux, Boris Baum, qui vient de terminer son premier long-métrage, Une braise sur la neige.

Devant la «difficulté» d'obtenir des fonds du CNC, il a financé son film (budget de 5000 euros) grâce à des dons d'internautes, par l'intermédiaire de la plate-forme internet Ulule, par le mécénat (Poly Son pour la post production, Vecteur M pour le matériel) et par le volontariat (le chef opérateur par exemple).

«De plus en plus de jeunes réalisateurs font comme moi», confie à l'AFP M. Baum.