Au moment où, à l'orée de l'an 2000, le projet d'un film sur Lincoln a commencé à prendre forme, Liam Neeson était pressenti pour incarner le 16e président des États-Unis. Le film ne parvenant jamais à se mettre sur les rails, Steven Spielberg et l'acteur, célèbre interprète d'Oskar Schindler, ont convenu d'abandonner. Ce n'est que des années plus tard, au moment où un scénario plus précis a émergé, que le cinéaste s'est mis à rêver à Daniel Day-Lewis. Au point où il affirme aujourd'hui que s'il avait refusé, il aurait préféré renoncer au film plutôt que de faire appel à un autre acteur.

Reconnu pour ses compositions marquantes (et rares!), l'acteur britannique a pourtant beaucoup hésité avant d'accepter la proposition du réalisateur de Schindler's List.

«Comment peux-tu approcher la vie d'un personnage aussi mythique en lui donnant des accents de vérité? s'interroge Daniel Day-Lewis. Au départ, j'étais convaincu que Steven avait eu une mauvaise idée en faisant appel à moi. À part son image iconique, je ne connaissais strictement rien de Lincoln!»

Le cinéaste confirme la difficulté qu'il a eue à convaincre l'acteur lauréat de deux Oscars (My Left Foot en 1990 et There Will Be Blood en 2008) de se glisser dans la peau du président abolitionniste.

«J'ai surtout misé sur la force du scénario que Tony Kuchner a écrit, raconte le cinéaste. Ce fut l'élément qui, dans un premier temps, a permis de croire qu'il serait possible de travailler ensemble sur ce projet, Daniel et moi. Cela dit, je ne voulais pas lui mettre de pression inutile sur les épaules non plus. C'est la raison pour laquelle je ne lui ai jamais dit que le film n'existerait tout simplement pas s'il avait décliné mon invitation!»

De son côté, l'acteur a pu enfin entrevoir la possibilité d'incarner le personnage au fil de ses recherches.

«Quand on aborde un personnage ayant marqué l'histoire d'un pays, il faut en savoir le plus possible sur lui, fait-il remarquer. Au gré de mes lectures, j'ai découvert un homme très accessible. Il m'a même réservé de délicieuses surprises, à vrai dire. Notamment sur le plan de l'humour, très fin, très sincère. Dont il pouvait parfois se servir à des fins politiques. L'ouvrage de l'historienne Doris Kearns Goodwin m'a aussi été très utile, car ce livre révèle l'être humain derrière le mythe.»

À part quelques rôles contemporains (My Beautiful Laundrette, Nine), Daniel Day-Lewis semble s'être fait une spécialité des personnages historiques.

«Parfois, j'ai vraiment le sentiment d'avoir passé plus de temps aux XVIIe, XVIIIe ou XIXe siècles que dans l'époque actuelle!»