Au départ, il y a eu cette phrase très simple qui surgissait inopinément dans son esprit : «Boy meets Boy». Pour son second long métrage en tant que réalisatrice, Zabou Breitman a eu envie d’explorer le sentiment amoureux – et les surprises qui en émanent – en sortant des conventions habituelles.

Rencontrée au Festival de Toronto l’an dernier, où L’homme de sa vie était présenté en première mondiale, l’auteure cinéaste expliquait son choix de conjuguer cette histoire au masculin.

«Je voulais avant tout une histoire d’amour et de passion, indiquait-elle. Or, le fait qu’un sentiment plus inattendu naisse entre deux hommes rend cette histoire plus viscérale parce qu’elle remet aussi en cause l’identité des individus.»

La quête identitaire des deux protagonistes figure d’ailleurs au coeur du récit. Frédéric, qu’incarne Bernard Campan, est un homme de clan qui croit filer le parfait bonheur auprès de sa femme et de sa famille. Hugo, qu’interprète Charles Berling, est un célibataire homosexuel qui multiplie les conquêtes en ne tombant amoureux que le temps d’un rapport intime. Ces deux personnalités on ne peut plus différentes permettaient ainsi à Zabou d’aller creuser encore plus loin dans la psychologie masculine.

«Hugo le dit bien à Frédéric au cours de la conversation qu’ils ont au petit matin : tu es le fils de, le père de, le mari de, le patron de… mais toi, tu es qui? rappelle celle qui, d’abord révélée comme actrice, se consacre désormais plutôt à la réalisation et à la mise en scène au théâtre. J’avais envie d’aborder ces thèmes car les hommes me fascinent. Ils demeurent pour moi un grand mystère. Les femmes, elles, parlent généralement beaucoup et partagent très facilement entre elles des choses très intimes. Elles ont, un peu comme si cela relevait de l’évidence, une reconnaissance tacite de leur rôle sur Terre. En revanche, les hommes ont une telle fragilité intérieure par rapport à leur identité qu’ils en perdent parfois l’usage de la parole. Cela me bouleverse, m’émeut au plus haut point.»

En contrepoint de la complexité des sentiments exprimés dans son film, et de la douleur qui en découle, Zabou a tenu à camper son récit dans une atmosphère champêtre et conviviale.

«Cette atmosphère relève du romantisme à la Rousseau, indique l’auteure cinéaste. L’homme et son identité, face à la nature. Je tenais à ce que les éléments occupent une place essentielle dans ce film afin d’en exacerber la sensualité. C’était une manière de traduire le bouleversement intérieur que vivent des personnages dont les sens, tout à coup, s’éveillent.»