Après avoir abordé des thèmes de nature politique, George Clooney a eu envie d'un peu de légèreté. Leatherheads, son troisième film en tant que réalisateur, est une comédie romantique directement inspirée d'un cinéma d'une autre époque. Il s'y est enfin donné le premier rôle.

Il est la quintessence même de l'idée qu'on se fait de la star hollywoodienne. George Clooney le sait très bien. Et il joue magnifiquement de son personnage. Accessible sans être familier; toujours élégant dans le discours, souvent drôle, l'acteur-cinéaste se révèle rien de moins que brillant dans ce drôle d'exercice que constitue, parfois, une rencontre de presse. Apparemment, il est tout aussi habile auprès de ses partenaires de jeu.

«George est mon héros! lance d'emblée Renée Zellweger, la seule vedette féminine de Leatherheads, une comédie romantique réalisée par Clooney lui-même. J'aimerais un jour apprendre comment évoluer avec autant de grâce que lui dans cette profession.»

«George est dans une classe à part», remarque de son côté John Krasinski (The Office), jeune vedette montante qui, dans Leatherheads, prête ses traits à un joueur étoile de football dans les années 20. «Il est aussi respecté que vénéré, ajoute l'acteur. Ce qu'il accomplit est d'autant plus remarquable que son statut ne provient pas uniquement des résultats qu'obtiennent ses films au box-office. Tout le monde l'adore!»

Le héros en question aurait bien sûr pu pontifier devant les journalistes. Il aurait aussi pu la jouer plus grave en parlant de ses actions humanitaires, de son engagement dans la cause du Darfour, de sa vision de la politique américaine. Il a préféré mettre plutôt en valeur son sens de la répartie en se collant à l'esprit du nouveau film qu'il propose. Leatherheads, sa troisième réalisation, est en effet une comédie romantique directement inspirée de celles qu'offraient Preston Sturgess ou Billy Wilder à une époque considérée aujourd'hui comme un âge d'or.

«À 46 ans, c'était maintenant ou jamais! déclare Clooney. Nous devions faire ce film il y a déjà plus de 10 ans mais le projet ne s'est finalement jamais concrétisé. Or, il y a dans cette histoire un rôle que je mourais d'envie de camper parce qu'il m'allait comme un gant. Mais à l'âge que j'ai aujourd'hui, je ne pouvais toutefois plus me permettre d'attendre!»

Un hommage

Dans Leatherheads (Double jeu en version française), l'interprète de Danny Ocean se glisse dans la peau du capitaine d'une équipe de football à une époque où le plus populaire des sports américains était relégué à une activité de seconde zone. Pour faire mousser la notoriété de son équipe, Dodge Connelly (Clooney) attire dans son camp Carter Rutherford (John Krasinski), un joueur talentueux, vétéran de la Première Guerre mondiale. L'enjeu du récit tourne autour de la rivalité qui s'installe entre les deux hommes le jour où une séduisante journaliste (Renée Zellweger) vient sur le terrain afin de faire la lumière sur le soi-disant passé glorieux du joueur étoile.

«Ce film emprunte le rythme des screwball comedies, précise Clooney. À cet égard, il constitue une espèce d'hommage aux grands films du genre produits dans les années 40. Je me suis aussi inspiré de The Hudsucker Proxy, même si j'ai évidemment fait attention de ne pas tomber dans le piège de l'imitation. En ce sens, vous pouvez aussi dire qu'il s'agit d'un hommage aux frères Coen. Un autre!» dit celui qui vient justement de terminer le tournage de Burn After Reading sous la direction du célèbre tandem de frangins.

S'il fut au départ question que Steven Soderbergh assure la réalisation de Leatherheads, Clooney a repris le film en main - il en était déjà la tête d'affiche - lorsque son ancien associé s'est tourné vers d'autres projets.

«Syriana et Good Night, and Good Luck ayant pris l'affiche la même année, j'avais aussi vraiment envie, pour mon troisième long métrage en tant que réalisateur, de m'attaquer à quelque chose de complètement différent, explique-t-il. On ne me faisait pourtant plus parvenir que des scénarios à teneur politique dans lesquels étaient abordés des thèmes très sérieux. Or, je ne veux pas d'étiquette. Un peu de légèreté ne pouvait être que bénéfique dans les circonstances. J'avais toutefois oublié qu'il me fallait jouer au football pour camper ce personnage!»

En effet, le rôle était assez exigeant sur le plan physique. «Quand un costaud âgé d'à peine 21 ans te fonce dessus, ce n'est pas toi qui gagnes, ça c'est certain!»

Élément de narcissisme

Contrairement aussi à ce qui s'était passé lors des tournages de ses deux films précédents, Confessions of a Dangerous Mind et Good Night, and Good Luck, George Clooney devait cette fois se diriger lui-même dans un rôle principal.

«Cela n'est pas vraiment souhaitable, dit l'acteur-cinéaste. Il y a en effet un élément de narcissisme qui doit alors entrer en ligne de compte. Cela nous place aussi dans une position où l'on se doit d'évaluer les performances de ses partenaires de jeu. Et leur demander de faire les ajustements nécessaires. Cela n'est pas toujours évident. C'est pourquoi il faut bien établir les règles du jeu dès le départ. Mes collègues l'ont parfaitement compris. En revanche, je dirais que mon propre travail en tant qu'acteur est plus facile car je sais exactement ce dont j'ai besoin en tant que metteur en scène!»

Clooney a aussi pris plaisir à plonger dans l'atmosphère de l'époque décrite dans un récit imaginé par Duncan Brantley et Rick Reilly, deux anciens journalistes du Sports Illustrated.

«Comme le film se déroule en 1925, nous ne pouvions pas utiliser les techniques contemporaines pour dynamiser artificiellement le récit, explique Clooney. Cela aurait tout simplement trahi l'histoire. Aussi a-t-il fallu trouver autre chose, notamment sur le plan des dialogues et de la mise en scène.

«Et puis, tient-il à préciser, la boue sur le terrain n'avait rien de factice. Nous avons même dû effectuer des tests avec d'importants écarts de températures. Au début, tout le monde trouvait ça amusant. Au bout d'une semaine, c'était vraiment insupportable!»