Le ministère suisse de la Justice a annoncé mardi qu'il était opposé à une libération provisoire de Roman Polanski et a recommandé au Tribunal pénal fédéral de Bellinzone, chargé de statuer, de rejeter le recours du cinéaste détenu en Suisse depuis dix jours.

«Nous avons demandé hier (lundi) au Tribunal pénal fédéral de Bellinzone de rejeter le recours de M. Polanski», a expliqué à l'AFP un porte-parole du ministère, Folco Galli.

«L'argument principal est que nous sommes persuadés qu'il existe un grand danger de fuite» en dehors du territoire suisse, a ajouté M. Galli, insistant sur le fait que, «même avec une liberté sous caution, il n'est pas garanti que M. Polanski restera dans la Confédération».

Les avocats de Roman Polanski, 76 ans, arrêté le 26 septembre à son arrivée en Suisse sur mandat d'arrêt américain, ont déposé le 29 septembre un premier recours auprès du Tribunal de Bellinzone sur le «mandat d'arrêt en vue d'extradition», assorti d'une demande de mise en liberté provisoire.

Le même jour, ils ont déposé un deuxième recours auprès du ministère de la Justice, lui demandant de «reconsidérer l'arrestation» elle-même, a précisé M. Galli.

Étant donné que les deux recours sont motivés par les mêmes arguments, le ministère suisse a estimé «inutile» de statuer sur la demande déposée auprès de ses services, a-t-il souligné.

Le Tribunal tessinois est donc désormais la seule instance à devoir se prononcer sur le recours de M. Polanski, recherché par la justice américaine à la suite d'une procédure ouverte en 1977 pour des «relations sexuelles illégales» avec une mineure âgée de 13 ans.

Récemment interrogée par l'AFP, la secrétaire générale du Tribunal de Bellinzone, Mascia Gregori Al-Barafi, est restée vague quant au délai qui s'écoulera avant que les juges ne rendent leur décision.

«Cela peut aller très vite, voire 10 jours. Mais cela dépend des cas», a-t-elle expliqué.
Une fois la décision connue, M. Polanski pourra faire appel.

Réagissant à la recommandation du ministère suisse, les avocats français de Roman Polanski ont rejeté l'argument selon lequel le cinéaste récompensé par l'Oscar du meilleur réalisateur (2003) et la Palme d'Or à Cannes (2002) pour Le Pianiste, ne resterait pas en Suisse si la liberté provisoire lui était accordée dans l'attente d'une décision sur son extradition aux États-Unis.

«M. Polanski s'engage à ne pas quitter le territoire suisse durant toute la procédure d'extradition et à respecter toutes les obligations qui pourraient lui être imposées pour garantir cet engagement», ont répété maîtres Hervé Temime et Georges Kiejman, dans un communiqué.

Ils ont précisé que l'avocat suisse de Roman Polanski ferait «connaître ses observations pour permettre au Tribunal de Bellinzone de prendre sa décision en toute connaissance de cause».

Bien que le réalisateur possède un chalet en Suisse à Gstaad où il pourrait demeurer au cours de la procédure, Berne a d'ores et déjà prévenu la semaine dernière qu'une liberté provisoire était «exceptionnelle» dans la Confédération.