Mammuth, seul film français inscrit à la compétition de la 60e Berlinale, annonçait les retrouvailles de Gérard Depardieu et Isabelle Adjani au grand écran.

C'est en partie vrai. L'interprète de La journée de la jupe n'a en effet ici qu'un petit rôle, celui d'un premier amour revenant hanter l'esprit d'un homme tel un fantôme. La formidable Yolande Moreau est plutôt celle qui, dans cette comédie déjantée et inclassable, forme le «vrai» couple avec Gégé. Dans l'univers très particulier de Benoît Delépine et Gustave de Kervern, à qui l'on doit déjà Louise Michel, cette rencontre relève de la plus pure évidence.

Depardieu s'abandonne


Un homme part à la retraite. Le système bureaucratique force ce dernier à recueillir des documents auprès des employeurs ayant jalonné son parcours professionnel. Sur sa vieille moto, l'homme sillonne les routes et sympathise avec des personnages tous plus étranges les uns que les autres. Et débordant d'humanité. Sur un ton toujours décalé, avec un humour singulier, les auteurs-cinéastes proposent au spectateur une aventure unique, menée par un Depardieu s'abandonnant sans réserve. Gros, bedonnant, portant ses cheveux très longs et très gras, le «monstre sacré du cinéma français» s'efface complètement au service de cet être modeste à qui l'on découvre de belles qualités de coeur. Qu'en fera le jury?

Les gros noms déçoivent

Maintenant que les 20 films de la compétition ont été présentés, bien malin celui qui pourrait prédire la teneur du palmarès qu'établira le jury présidé par Werner Herzog. À part Roman Polanski (The Ghost Writer) et, peut-être, Michael Winterbottom (The Killer Inside Me), les «gros noms» n'ont rien offert de mémorable. Il ne serait pas étonnant que le jury décide - comme l'avait fait celui de l'an dernier en couronnant Fausta - La teta ausustada - d'aller vers des productions réalisées par des cinéastes moins connus.

Parmi les films présentés dans le dernier droit, Na Putu (On the Path) s'est distingué avantageusement. La réalisatrice bosniaque Jasmila Zbanic, déjà lauréate de l'Ours d'or il y a quatre ans grâce au superbe Grbavica, s'attarde cette fois à décrire la dérive d'un jeune couple musulman. Dont la stabilité vacille le jour où les convictions religieuses de l'homme se radicalisent à la faveur d'une rencontre avec un ancien compagnon d'armes. Ce portrait nuancé et sensible, foncièrement actuel, est d'une très belle justesse.

The Killer Inside Me, un film que Michael Winterbottom a tiré d'un roman noir de Jim Thompson, a par ailleurs été hué.

Il est vrai que la violence sordide du film - de surcroît dirigée envers les femmes - est dure à prendre. Le jury risque toutefois d'être sensible aux qualités de réalisation de ce western très sombre, tout autant qu'à la performance troublante de Casey Affleck. Mais si jamais prix il y a, il sera contesté.