Conscient que ses propos aient pu être mal interprétés, le grand patron de la Société de développement des entreprises culturelles (SODEC) met les pendules à l'heure en précisant qu'il n'avait nullement l'intention d'opposer le cinéma d'auteur au cinéma commercial.

«Je ne voulais pas enlever le titre d'auteur à Denys Arcand, Denis Villeneuve ou Gilles Carle dont les films ont eu le malheur ou le bonheur de connaître un succès commercial. Je réaffirme aujourd'hui devant vous que le cinéma d'auteur continuera à bénéficier d'une approche favorable à la SODEC», a déclaré hier le président et chef de direction de la SODEC, François Macerola, à l'occasion d'un discours prononcé lors du congrès de l'Association des producteurs de films et de télévision du Québec (APFTQ).

Rappelons que la semaine dernière, plus d'une cinquantaine de réalisateurs - dont Denis Villeneuve, Bernard Émond et Xavier Dolan - ont signé une lettre publique pour dénoncer les propos de M. Macerola. Celui-ci avait laissé entendre qu'il était temps pour la Société de développement de se défaire de son étiquette de bailleur de fonds du cinéma d'auteur. L'histoire a fait couler beaucoup d'encre. Le président de l'organisme, qui semblait vouloir mettre un terme à toute cette grogne hier, a par ailleurs annoncé qu'il rencontrerait au cours du mois de mai les représentants du collectif de cinéastes qui s'inquiètent d'un éventuel virage commercial à la SODEC.

«Pour moi, ce qui est important, c'est de dire que tous les styles et les genres sont bienvenus à la SODEC, a-t-il ajouté au cours d'un entretien avec La Presse, à l'issue de son discours. C'est clair que la majorité de nos cinéastes font du cinéma d'auteur. Ce que je voulais éviter, c'est que la SODEC se donne une identification qui est cinéma d'auteur. Pour moi, on n'est pas cinéma d'auteur, on est cinéma de qualité. Je pense qu'on doit être capable d'investir dans De père en flic tout comme on peut investir dans le prochain Bernard Émond.»

Présent lors du congrès, le producteur de C.RA.Z.Y. et Nitro, Pierre Even, croit que depuis le début de toute cette histoire - qui a pris, selon lui, des proportions démesurées -, les propos de M. Macerola «ont été mal interprétés». «Ce qu'il a affirmé, soutient M. Even, c'est un fait: la SODEC finance du cinéma, point.»

Enveloppes à la performance

Par ailleurs, M. Macerola a également profité de son passage devant les membres de l'APFTQ pour aborder l'épineuse question des enveloppes à la performance, ces sommes d'argent remises par Téléfilm Canada à des producteurs dont le film a eu du succès au box-office. Ceux-ci peuvent ensuite utiliser cette somme pour financer le projet de leur choix qui, dans la plupart des cas, ne parvient pas à obtenir l'aval des institutions.

En questionnant ouvertement la pertinence de ces enveloppes, M. Macerola a visiblement voulu donner suite aux propos tenus par le réalisateur de La donation, Bernard Émond - l'un des signataires de la fameuse lettre -, qui a profité d'une assemblée publique cette semaine pour critiquer ce système qui, selon lui, crée deux catégories de films. «C'est un système qui était peut-être valable il y a 10 ans, maintenant ce n'est pas nécessairement le système à mettre sur pied à la SODEC, a mentionné M. Macerola, précisant du même souffle que ces enveloppes - créées lorsque lui-même travaillait à Téléfilm Canada - ont tout de même permis de financer plusieurs films de qualité comme Les sept jours du talion.