Rue Bélanger, dans le quartier Rosemont, un homme dans la trentaine et un garçon de dix ans marchent d'un pas rapide sur le trottoir gelé, tournent au sud sur la 26e Avenue et s'engouffrent dans un édifice d'appartements modestes. Yann et Slimane sont à la recherche de Nadia, mère du garçon et compagne de Yann. Partie fauchée de la France, Nadia a trouvé refuge au Canada où elle cherche Une vie meilleure.

Voilà le titre du nouveau film du réalisateur français Cédric Kahn (Roberto Succo, Les regrets) mettant en vedette l'acteur bien connu Guillaume Canet (L'affaire Farewell, Ne le dis à personne) et la jeune comédienne Leïla Bekhti, récente lauréate du César du meilleur espoir.

Arrivée au Canada à la fin de février, la petite équipe française est en tournage au Québec et en Ontario pour une semaine. Pour des raisons scénaristiques, mais aussi parce que la boîte de production Cinémaginaire a une participation minoritaire dans le projet.

Signé également par Cédric Kahn, le scénario raconte l'histoire de Yann et Nadia qui, remplis d'espoir et d'énergie, ouvrent un restaurant à la campagne, dans la grande région parisienne. Mais leur vie, leurs avoirs et leur couple sont en train de sombrer dans un montage bancaire qui se resserre comme un carcan. Nadia quitte la France pour le Canada, laissant à Yann le soin de prendre soin de son fils Slimane. Yann va tout tenter pour sauver son couple et sa famille.

«Ce que je veux montrer est que lorsqu'on est pauvre, on paie tout plus cher. Mais ce n'est jamais dit comme ça. Le système saigne les pauvres», souligne le réalisateur en entrevue à La Presse. «C'est la première fois que je fais un film aussi social, aussi actuel. Je ressentais ce besoin d'être témoin de dire les choses que je ressens.»

Selon lui, la France fait moins de films sociaux que d'autres pays européens, telles l'Angleterre ou la Belgique. «Le gros bataillon des films français, ce sont des histoires sentimentales. Le sujet principal, le grand sujet, c'est l'adultère», poursuit le réalisateur.

Mais les choses changent graduellement, ajoute-t-il. «On ne peut pas uniquement, éternellement parler de nos états d'âme.»

Guillaume Canet, de son côté, apprécie également l'approche «sociale» préconisée par le scénario. C'est la première fois qu'il tourne ici.

«C'est un très beau rôle. Le personnage tombe dans un engrenage et s'enfonce dans la précarité. Parce qu'on ne prête qu'aux riches! s'exclame-t-il. Il s'agit de mon tout premier tournage à Montréal. Je suis ici pour une semaine, mais comme je viens d'arriver, je n'ai pas pu vraiment prendre le pouls de la ville encore. Mais jusqu'à maintenant, tout se passe très bien.»

L'acteur profite de son passage à Montréal pour parler de son plus récent long métrage en tant que réalisateur, Les petits mouchoirs, qui devrait prendre l'affiche dans les prochaines semaines.

Le fantasme canadien

Ce n'est pas fortuit dans cette histoire si Leïla tente de se renflouer en s'installant au Canada. C'est que dans l'esprit de nombreux Français, le pays de Jacques Cartier est encore aujourd'hui synonyme de réussite. L'eldorado américain, version Molière, disons.

«En France, pour les gens pauvres et notamment d'origine étrangère, il y a toujours un fantasme avec le Canada, fait Cédric Kahn. C'était vrai il y a 20 ou 30 ans et ça perdure aujourd'hui. Il y a cette idée qu'on peut y trouver assez facilement du travail.»

Il convient, lorsqu'on lui en fait la remarque, que tout n'est pas si simple. Mais bon, nous sommes au cinéma...

Dans sa réalité bien personnelle, Cédric Kahn est venu plusieurs fois à Montréal, notamment pour présenter ses films en festival. Il en est cependant à sa première expérience de tournage ici. L'équipe a mis en boîte des séquences, intérieures et extérieures, à North Bay, Ottawa et Montréal.

Une vie meilleure sortira en France à la fin de 2011 ou au début de 2012 et devrait sortir au Canada l'an prochain.