L'écran fait 26 mètres de largeur par 14 de hauteur. À ses pieds, 8000 chaises noires et jaunes reproduisant le pelage du léopard qui est le symbole du Festival du film de Locarno. Autour de cette «salle» géante à ciel ouvert, des restos, des bistros. Et quand 21 h 30 sonnent à l'église voisine, les lumières s'éteignent. Le silence se fait. Place au cinéma format démesure et magie. Le cinéma tel qu'il se vit sur la Piazza Grande, coeur de cet événement durant lequel, cette année, deux films produits par micro_cospe ont eu droit à leur première mondiale: le court métrage La ronde de Sophie Goyette et le long métrage Monsieur Lazhar de Philippe Falardeau.

Monsieur Lazhar qui a obtenu, lundi, ce traitement de roi - qu'ont partagé ou partageront Super 8 de J.J. Abrams et Cowboys&Aliens de Jon Favreau, mais aussi Le havre d'Aki Kaurismäki ou encore An American in Paris de Vincente Minnelli.

Éclectique, la programmation de cette place? Autant que son public. «La Piazza n'est pas facile à programmer: le public se compose de cinéphiles avertis et d'amateurs d'oeuvres plus populaires. Il faut trouver des films d'auteur qui plairont aux seconds et des films grand public que les premiers aimeront», explique Nadia Dresti, déléguée à la direction artistique et directrice du marché du film du Festival, pour qui l'endroit est visiblement très précieux: «L'acoustique y est exceptionnelle. L'écran est, je crois, le plus grand au monde. Et nous augmentons tous les ans le niveau technique de la projection, qui se fait en numérique bien sûr.»

Le public en a pour son argent. Même si le ciel lui tombe sur la tête. «Nous projetons quand même le film sur la Piazza Grande, mais aussi dans une de nos salles, qui peut recevoir 3200 personnes. Mais bien des gens restent sous la pluie.» Nadia Dresti ne ment pas. Vu: Philippe Falardeau, Sophie Goyette et la productrice Élaine Hébert, sous des imperméables et le déluge, à regarder L'art d'aimer d'Emmanuel Mouret. Ils n'avaient pas l'air très loin du septième ciel. Et Philippe Falardeau l'a frôlé de plus près encore le lendemain, lors de la projection de Monsieur Lazhar - après l'avoir présenté aux 7000 personnes et plus présentes.

«Les gens réalisent l'ampleur de la Piazza quand ils en foulent la scène. Jon Favreau a poussé un Oh! estomaqué en arrivant-là. Et quand Bryan Singer est venu présenter X-Men, il s'est exclamé: Je me sens comme dans un concert rock!», conclut Nadia Dresti après avoir évoqué la présence, au cours des jours précédents, de Magali Noël chantant l'air d'Amarcord, d'Abel Ferrara grattant la guitare sous la pluie; et du couple mythique de Loulou, Gérard Depardieu et Isabelle Hupert, rendant hommage à Maurice Pialat.

Éclectique, la Piazza Grande. Et magique.

Les frais de voyage ont été payés par Les Films Séville/Entertainment One