Il y a quand même un petit moment qu'elle avait honoré Montréal de sa présence. La dernière production tournée chez nous dans laquelle Catherine Deneuve a joué était Les liaisons dangereuses, minisérie réalisée par Josée Dayan en 2003. L'année précédente, elle avait donné la réplique à William Hurt dans Au plus près du paradis de Tonie Marshall. Au début des années 80, elle a tourné ici Paroles et musique d'Elie Chouraqui. Auparavant, elle aura vécu la rigueur de l'hiver québécois à la faveur du tournage d'À nous deux de Claude Lelouch. Celui-là même qui, vendredi, a dit éprouver une «petite tristesse» parce qu'il aurait aimé faire avec Catherine Deneuve le meilleur film de l'actrice.

La star française s'est d'ailleurs montrée un peu surprise quand les propos du réalisateur lui ont été rapportés au cours d'une rencontre avec quelques journalistes. «Ah bon? Dans Si c'était à refaire, j'avais pourtant un rôle vraiment intéressant à jouer, commente-t-elle. Claude voit peut-être les choses avec un peu de nostalgie maintenant, mais il est vrai que le courant n'a pas passé entre Jacques Dutronc et moi pour À nous deux. On ne sait jamais à quoi cela tient, d'ailleurs. Il y a beaucoup d'inconnu quand on fait un film. Et heureusement! Je ne vois pratiquement jamais Gérard Depardieu ailleurs que sur les plateaux et nous partageons pourtant une complicité immédiate. C'est comme ça. Cela ne s'explique pas.»

Tiède face aux honneurs

Cette fois-ci, la présence de Catherine Deneuve dans la métropole québécoise tenait non pas à un tournage, mais bien à une distinction que tenait à lui remettre le Festival des films du monde pour souligner sa contribution exceptionnelle à l'art cinématographique.

L'icône du cinéma français ne s'accroche pourtant pas du tout aux honneurs. En conférence de presse samedi, elle disait être touchée par cette reconnaissance, sans être «particulièrement transportée» par ce genre d'hommage. «Je n'ai pas l'impression d'avoir une couronne sur la tête quand même!»

Plus tard en entrevue, elle a concédé que les prix et distinctions se révèlent beaucoup plus significatifs au début d'une carrière.

«Il vaut toujours mieux avoir les choses tôt, dit-elle. La vie est trop courte! Mais ça fait plaisir, voilà.»

Visiblement, elle ne tient pas non plus à rejoindre les rangs de ceux qu'on honore pour une carrière passée. Depuis 50 ans, Catherine Deneuve est d'ailleurs l'une des rares actrices à n'avoir jamais connu de période creuse. Encore aujourd'hui, elle est sans contredit l'une des vedettes les plus sollicitées du cinéma français. Et fait rêver les cinéastes de toutes générations.

Au cours des deux dernières années, elle a notamment mis son talent au service de Julie Lopes-Curval (Mères et filles), François Ozon (Potiche), Éric Lartigau (L'homme qui voulait vivre sa vie, à l'affiche au Québec cet automne), Christophe Honoré (Les bien-aimés, film de clôture à Cannes), sans oublier Thierry Klifa (Les yeux de sa mère, film plutôt raté, présenté en clôture du FFM hier soir). L'actrice a en outre participé tout récemment au tournage d'Astérix et Obélix: Au service de Sa Majesté (Laurent Tirard), où elle incarne une reine d'Angleterre «qui parle français avec un accent anglais».

«Quand un film comme Potiche obtient du succès, qu'il est très apprécié du public, c'est beaucoup plus satisfaisant qu'une distinction», fait-elle remarquer.

Curiosité naturelle

Quant à la qualité de son parcours et à la longévité de sa carrière, Catherine Deneuve les attribue d'abord à la chance.

«Ma curiosité naturelle m'a aussi toujours très bien servie, ajoute-t-elle. Je suis cinéphile. J'aime voir des films. Et je peux partager mon enthousiasme auprès d'un ou d'une cinéaste en tant que simple cinéphile, sans arrière-pensée. Une fois, j'ai écrit à Lars von Trier pour lui dire à quel point j'avais apprécié Breaking the Waves, et lui laisser savoir que j'étais intéressée à travailler avec lui à un projet dont le tournage devait se dérouler dans plusieurs pays d'Europe, dont la France. Il m'a répondu que ce projet était abandonné, mais qu'il préparait en revanche Dancer in the Dark avec Björk. Le tournage fut assez compliqué. C'est un film difficile, mais qui se mérite!»

Ambassadrice à l'UNESCO pour la préservation du patrimoine cinématographique mondial depuis 1994, a rappelé hier la ministre Christine St-Pierre en lui remettant un Grand Prix spécial des Amériques, Catherine Deneuve tient à accompagner ses films dans les différents festivals à l'étranger.

«J'aime beaucoup rencontrer des gens issus de différentes cultures, de différents pays, conclut-elle. C'est un vrai plaisir.»