Le film mexicain Heli, projeté jeudi en compétition à Cannes, est une oeuvre radicale sur le destin d'une famille confrontée à la violence de narcotrafiquants, une façon de «faire réfléchir» à «ce qui ne va pas» dans ce pays, selon son réalisateur Amat Escalante.

Plongée au coeur de la corruption, des cartels mafieux et leurs trafiquants de drogue, Heli est le troisième long métrage d'Amat Escalante, 34 ans, après Sangre, présenté à Cannes en 2005 dans la section Un certain regard, et Los Bastardos (2008).

L'auteur, proche du réalisateur Carlos Reygadas, explore dans ce nouveau film l'histoire d'Estela, 12 ans, de son frère aîné Heli et de leurs proches, une famille modeste prise dans un engrenage qui les dépasse.

Estela, son père et Heli, ouvrier dans l'usine automobile de la ville, vivent dans une maison avec la jeune épouse d'Heli et leur bébé. Mais quand Estela tombe amoureuse de Beto, 17 ans, un policier impliqué dans un détournement de drogue, toute la famille est soudain entraînée dans un tourbillon de violence.

Dépouillé comme les paysages arides qu'il montre, tranchant et très dur, avec des scènes de violence physique frontales dont une difficilement supportable - qui a fait fuir certains spectateurs cannois de la salle -, Heli fait partager au public la tension que vivent les personnages, installés dans un climat de peur et de brutalité.

«Je pense que d'un point de vue moral, notre responsabilité consiste à montrer la violence telle qu'elle doit être, c'est-à-dire triste, sale», a expliqué Amat Escalante lors d'une conférence de presse.

«Montrer la violence pour la violence, ce n'est pas ce qui m'intéresse. Ce que j'ai souhaité, c'est plutôt trouver une sorte de fil conducteur qui permette de placer cette violence dans son contexte» social, a ajouté le réalisateur, estimant que «la réalité du Mexique est encore pire que ce qui est montré dans le film».

«Je pense que nous avons eu raison dans ce film de montrer la violence d'une façon qui fasse réfléchir les gens et les amène à conclure que ça ne va pas», a-t-il jugé.

Heli est le seul film latino-américain en compétition officielle à Cannes. Mais le Mexique est aussi présent dans la section Un certain regard avec La Jaula de oro (La cage dorée) de Diego Quemada-Diez, qui raconte le destin de jeunes gens cherchant à gagner les États-Unis.