Dans la veine de ses courts métrages, où elle explorait la sexualité féminine et la marginalité, Ariane Louis-Seize livre un premier long métrage au charme singulier où elle flirte joliment avec l’horreur, le récit initiatique et la comédie sentimentale.

Dès son premier court métrage, La peau sauvage (2016), où Marilyn Castonguay incarnait une mutique femme-serpent au regard pénétrant, Ariane Louis-Seize a su imposer sa signature. Couronné du prix de la meilleure réalisation de la section Venice Days à la dernière Mostra, l’équivalent de la Quinzaine des cinéastes à Cannes, Vampire humaniste cherche suicidaire consentant confirme que la diplômée de l’INIS possède un don pour créer des univers décalés et aborder de manière originale les premiers émois amoureux.

Jeune vampire de 68 ans, Sasha (Sara Montpetit) est le mouton noir de sa famille. Ne pouvant se résoudre à mordre des humains à cause de son empathie, ce qui empêche ses canines de pousser, elle doit se contenter de boire à la paille les pochettes de sang que lui rapporte sa mère Georgette (Sophie Cadieux). Or, la matriarche, peu soutenue par son mari Aurélien (Steve Laplante), n’en peut plus de chasser pour toute la famille.

Afin qu’elle puisse embrasser sa vraie nature, Sasha devra aller vivre chez sa cousine Denise (Noémie O’Farrell), féroce prédatrice de douchebags et fille de l’austère tante Victorine (Marie Brassard). Une nuit, Sasha surprend Paul (Félix-Antoine Bénard), victime d’intimidation, qui s’apprête à se jeter du haut d’un salon de quilles. Peu après, la farouche créature nocturne et le garçon timide se sentent mutuellement attirés.

Que les détracteurs de Twilight soient rassurés : hormis la tenue vestimentaire et la flamboyante chevelure léonine de Denise, lesquelles évoquent la vilaine Victoria, rien dans Vampire humaniste cherche suicidaire consentant ne rappelle la mièvre franchise relatant les amours tumultueuses d’Edward et Bella. En fait, c’est plutôt du côté du cinéma indépendant que la réalisatrice gatinoise puise son inspiration.

Avec sa banlieue industrielle fantôme, ses intérieurs rétro plongés dans la pénombre et son héroïne atypique, tendre croisement entre la Billie de Cœur de slush et Wednesday Addams, ce premier long métrage d’Ariane Louis-Seize partage des airs de famille avec ce qui s’est fait de mieux dans le genre au cours des dernières années.

PHOTO FOURNIE PAR H264

Sara Montpetit dans Vampire humaniste cherche suicidaire consentant

Ainsi retrouve-t-on avec bonheur des réminiscences d’Only Lovers Left Alive, de Jim Jarmusch, A Girl Walks Home Alone at Night, d’Ana Lily Amirpour, et Let the Right One In, de Thomas Alfredson. À la différence près que la cinéaste préfère l’humour à l’hémoglobine, les cocasses affrontements familiaux aux parties de chasse sanglantes, les timides et maladroits rapprochements aux ébats torrides.

Écrit avec Christine Doyon, également formée à l’INIS, ce charmant film de vampires – genre exploité chez nous en mode parodique par Gabriel Pelletier (Karmina et Karmina 2 : l’enfer de Chabot) et de manière réaliste par Daniel Roby (La peau blanche) – repose, hélas, sur un scénario un peu trop mince, voire anecdotique. Certes, la réalisatrice et sa coscénariste jonglent joyeusement avec les codes de l’horreur, du récit initiatique et des comédies sentimentales. Qui plus est, elles traitent avec esprit et délicatesse du spleen adolescent, de la dépression et du suicide. Avec le même humour fin, elles effleurent la charge mentale et l’aide à mourir.

Cependant, elles négligent de développer les personnages secondaires, dont les hilarants parents et la tante de Sasha, d’étoffer la situation familiale de Paul et sa mère (Madeleine Péloquin) et de peaufiner la surprenante conclusion. En résulte une comédie d’horreur d’un gothique mignon qui, bien qu’elle revisite avec une certaine audace un genre exploré jusqu’à plus soif depuis l’époque du muet, manque un peu de croquant.

Vampire humaniste cherche suicidaire consentant

Comédie d’horreur

Vampire humaniste cherche suicidaire consentant

Ariane Louis-Seize

Avec Sara Montpetit, Félix-Antoine Bénard, Sophie Cadieux

1 h 30
En salle

6/10

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