Vous souvenez-vous de votre premier amour ? Vos premiers papillons ? Et vos premières déceptions ? Emballez le tout dans un décor bonbon, saupoudrez de quelques larmes bien placées, et deux ou trois gorgées de slush (à la framboise bleue, quoi d’autre), et vous voilà avec un joyeux film d’été léger, juste assez sucré.

Léger, bien sûr, comme on peut l’être à 16 ans, quand on travaille aux glissades d’eau, et que notre seul souci, hormis les coups de soleil, est de découvrir enfin l’amour, ou plutôt non : ces fameux et légendaires papillons dans le bas du ventre, plus exactement. Vous avez bien compris : quand on veut à tout prix vivre sa sacro-sainte « première fois ».

Certes, la trame narrative de Cœur de slush, le très attendu film de Mariloup Wolfe inspiré du roman du même nom (écrit par Sarah-Maude Beauchesne qui signe ici le scénario), est un peu mince. Prévisible, on s’entend. Mais pas maigre pour autant.

En résumé : Billie (incarnée par une rayonnante et très juste Liliane Skelly, aperçue dans District 31, dont on ne peut que saluer ce premier rôle au cinéma), grande échalote tout sauf précoce, flashe un jour pour un champion de cyclisme du coin. Joseph Delorey (Mutants) incarne le personnage de Pierre Forest, la coqueluche de l’heure, avec la belle gueule et le sourire charmeur du parfait petit briseur de cœurs... qu’il est. Pour mettre un peu de piment, sachez que la grande sœur Annette, la parfaite (pétillante Camille Felton), en pince pour le même tombeur. Cela vous donne une idée de l’essence du topo, de ses fous rires et de ses frenches maladroits, on n’y échappe pas.

PHOTO ERIC MYRE, FOURNIE PAR LES FILMS OPALE

Salma Serraji, Vivi-Anne Riel et Liliane Skelly dans Cœur de slush

Mention spéciale à la trame sonore (si essentielle dans un film du genre) et aux ralentis bien sentis (parfois cucul, sans être gratuits), sans oublier la métaphore de l’eau pour illustrer le vertige amoureux, qui donnent une touche de poésie au récit. Les amateurs reconnaîtront d’ailleurs la plume sensible et vraie de l’autrice de Lèche-vitrines et de Maxime, les deux tomes suivants de la trilogie (chez Hurtubise). Saluons également l’esthétisme très léché et coloré, de la maison fleurie jusqu’aux vaches parfaites dans le champ en passant par le tacot jaune pétant, qui donne des airs de carte postale à l’histoire.

Cela étant dit, là où le livre (véritable succès en librairie, vendu à plus de 30 000 exemplaires) débordait de justesse dans la complexité des émotions et les réflexions intimes sur le désir de grandir – un peu, beaucoup, ou finalement pas du tout –, le film tombe dans le piège des raccourcis.

Forcément, le récit est du coup moins intéressant, les personnages également. Quoique pas inintéressants non plus.

Il faut dire que les échanges sonnent toujours vrai, avec un soupçon de féminisme et de « wokisme » ici et là bien placés. La chimie entre les amies (Salma Serraji et Vivi-Anne Riel) est aussi contagieuse. Et que dire de la morale sur l’importance de l’amitié, et de la sororité, qu’on serait tous bien fous d’ignorer.

On s’en voudrait de passer sous silence cette fameuse et tant attendue première fois, jouée ici avec une justesse inédite, osant la plate vérité. En gros : oubliez les frissons, mettons.

Un mot, enfin, sur le rôle du père, et non le moindre, joué par le très attachant François Létourneau, aussi maladroit qu’aimant, discret mais présent. C’est un fait : après toutes ces émotions trop sucrées, son sage mot de la fin se prend plutôt bien.

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Cœur de slush

Comédie dramatique

Cœur de slush

Mariloup Wolfe

Avec Liliane Skelly, Camille Felton, Joseph Delorey, François Létourneau, Salma Serraji et Vivi-Anne Riel

1 h 56

7/10