Près de 300 films seront présentés dans les prochains jours à l’occasion du FNC, qui se tient jusqu’au 16 octobre. Comme à l’habitude, le festival projette plusieurs longs métrages qui se sont distingués dans les grands festivals ces derniers mois. Voici les films à ne pas manquer, selon nos journalistes qui les ont vus à Cannes, Venise ou Toronto.

Le Coyote, de Katherine Jerkovic

Le deuxième long métrage de la Québécoise Katherine Jerkovic (Les routes en février), Le Coyote, raconte l’histoire d’un Montréalais dans la cinquantaine, d’origine mexicaine, qui souhaite retrouver du travail comme chef après avoir dû fermer son restaurant. Il paie son loyer en faisant de l’entretien ménager la nuit dans des entreprises, puis envoie des CV. On devine peu à peu les raisons de ses déboires lorsque sa fille, avec qui il a rompu les liens, lui présente son jeune fils, qu’elle aimerait lui confier. Jorge Martinez Colorado, que l’on a vu dans la série télé Le temps des framboises, incarne avec justesse cet immigrant déchiré entre son avenir professionnel et ses nouvelles responsabilités de grand-père. C’est un portrait poignant et sensible de l’immigration québécoise que propose Katherine Jerkovic. Un film qui puise son inspiration dans la réalité montréalaise, en présentant des personnages que l’on voit encore trop peu dans le cinéma québécois. (M. C.)

Women Talking, de Sarah Polley

PHOTO FOURNIE PAR LE TIFF

Une scène du film Women Talking

Women Talking, adaptation du roman homonyme de la Canadienne Miriam Toews, à propos d’agressions sexuelles dans une communauté religieuse mennonite (dont est issue la romancière manitobaine), est le premier long métrage de Sarah Polley en près d’une décennie. Il s’agit d’une charge à fond de train contre le patriarcat, bien au-delà des carcans religieux. Une dizaine de femmes, victimes de viols et de violences dans leur communauté, se demandent si elles doivent rester ou partir, ne rien faire ou réagir. La profonde injustice qu’elles subissent, l’état d’esclavage, d’ignorance dans lequel on les maintient – elles sont illettrées – sont révoltants. On se croirait au Moyen Âge, alors que le récit est campé en 2010. Ce film percutant, le plus abouti de la carrière de Sarah Polley, compte sur une distribution épatante : Frances McDormand, Jessie Buckley, Rooney Mara, Ben Whishaw et Claire Foy. (M. C.)

EO, de Jerzy Skolimowski

PHOTO FOURNIE PAR LE FNC

Pendant son étrange épopée, EO s’évade plusieurs fois en espérant retrouver l’artiste de cirque qui s’occupait si bien de lui.

Le vétéran cinéaste polonais Jerzy Skolimowski, 84 ans, propose dans EO un hommage, 56 ans plus tard, au classique Au hasard Balthazar, de Robert Bresson, en version hallucinée. C’est-à-dire que l’on suit les tribulations d’un âne (qui se nomme EO ; à prononcer « hi-han »), d’un cirque en Pologne jusque dans un élevage de bovidés en passant par un match de soccer amateur et un séjour dans une villa bourgeoise en Italie, où une femme (Isabelle Huppert, à l’écran cinq minutes) casse des assiettes de porcelaine sur un plancher de céramique. Pendant son étrange épopée, EO s’évade plusieurs fois en espérant retrouver l’artiste de cirque qui s’occupait si bien de lui. Cette fable, poétique et mélancolique, est aussi originale que charmante. (M. C.)

The Banshees of Inisherin, de Martin McDonagh

PHOTO JONATHAN HESSION POUR SEARCHLIGHT PICTURES

Colin Farrell a obtenu le prix du meilleur acteur à la Mostra de Venise grâce à sa performance dans The Banshees of Inisherin, un film de Martin McDonagh.

Quatorze ans après In Bruges, Brendan Gleeson et Colin Farrell retrouvent le cinéaste Martin McDonagh (Three Billboards Outside Ebbing, Missouri) de très réjouissante façon dans The Banshees of Inisherin. En utilisant son talent de dialoguiste, en privilégiant un type d’humour aussi singulier qu’efficace, McDonagh explore un thème rarement exploité : la fin d’une amitié. Dans une petite île de la côte ouest d’Irlande, où, en ces années 1920, vivent à peine une poignée d’habitants et où le sens communautaire est très important, Colm (Brendan Gleeson) annonce sans crier gare à Pádraic (Colin Farrell), qu’il connaît depuis toujours, que leur amitié n’existe plus. Lauréat de deux récompenses à la Mostra de Venise (prix du meilleur scénario et Colin Farrell sacré meilleur acteur), The Banshees of Inisherin est un film drôle, touchant et original. Il faut avoir l’oreille bien exercée à l’accent irlandais, mais on nous promet des sous-titres. Tant mieux. (M.-A. L.)

No Bears, de Jafar Panahi

PHOTO FOURNIE PAR CELLULOID DREAMS

Jafar Panahi au volant de sa voiture dans No Bears, un film qu’il a tourné clandestinement.

Comme tous les plus récents longs métrages du réalisateur de Taxi Téhéran, No Bears a été tourné clandestinement. Le ton se fait cependant beaucoup plus grave cette fois. Tenant son propre rôle, Jafar Panahi, qui purge depuis le mois de juillet une peine de six ans de prison en Iran, raconte deux histoires parallèles, la principale étant celle qui le met lui-même en scène avec une petite équipe de tournage. Ne pouvant sortir du pays, il se rend dans un petit village tout près de la frontière turque, où le conflit entre les urbains de Téhéran et les ruraux du village – entre modernité et tradition – se fait assez intense. Parallèlement, les désirs d’immigration du couple iranien que Panahi est en train de filmer sont confrontés à la bureaucratie. Lauréat d’un prix spécial du jury à la Mostra de Venise, No Bears n’a rien dans sa tonalité de l’espèce de bonhomie qu’on retrouve habituellement dans les films de Jafar Panahi. (M.-A. L.)

La fièvre de Petrov, de Kirill Serebrennikov

PHOTO FOURNIE PAR BAC FILMS

Semyon Serzin dans La fièvre de Petrov, un film de Kirill Serebrennikov

Réalisateur du remarquable Leto, Kirill Serebrennikov est un cinéaste russe ayant souvent eu maille à partir avec le régime de Vladimir Poutine. La fièvre de Petrov, en lice pour la Palme d’or au Festival de Cannes l’an dernier, est un long délire hallucinatoire découlant d’une forte fièvre dont est atteint un auteur de bande dessinée. Quand on voit ce fameux Petrov (Semyon Serzin), très grippé, descendre d’un bus et être immédiatement entraîné vers un peloton d’exécution improvisé, on comprend que Serebrennikov n’a pas envie de faire dans la dentelle. Tout n’est pas d’égale valeur dans ce cocktail explosif aux accents trash, mais la charge est très forte. Notons que le FNC met aussi à l’affiche La femme de Tchaikovski. Le plus récent film du cinéaste, de facture plus classique, a été présenté au Festival de Cannes plus tôt cette année. (M.-A. L.)

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