Synopsis : De vraies jumelles qui refusent de communiquer avec leur entourage s’isolent dans l’art et finissent par commettre des méfaits.

Adaptée d’un livre de Marjorie Wallace, cette enrageante histoire vraie aurait très bien pu être un banal téléfilm, retraçant comment le système britannique a fini par ostraciser deux femmes noires jugées « différentes ». Tout était en place pour un long métrage à teneur social et politique. Surtout que les lourdeurs ne sont pas rares et la conclusion étonnamment kitsch.

Le scénario d’Andrea Seigel (Laggies) privilégie plutôt ses personnages, les suivant sans les juger, en prenant soin de ne pas verser dans la psychologie à deux sous. Une part de mystère plane sur June et Jennifer Gibbons, des êtres fusionnels qui tentent de résister au monde qui les entoure. Leurs interprètes Letitia Wright (Black Panther) et Tamara Lawrance (Kindred) les défendent avec une conviction qui les honore, devenant le cœur et l’âme de l’entreprise.

Les frangines s’échappent de leur quotidien ennuyeux, sombre et solitaire par le pouvoir de leur imagination, en échangeant l’une avec l’autre sans que quiconque les entende ou les comprenne. Une évasion qui passe par l’art salvateur et libérateur, tant celui de la musique que celui de l’écriture. Soudainement, des animations accaparent l’écran, séduisant par leur mélancolie lancinante. Puis les images brillent de couleurs foisonnantes. Le procédé n’est pas nouveau – Lars von Trier l’avait utilisé sur Dancer in the Dark –, mais il est toujours efficace.

Révélée avec The Lure, une relecture ahurissante de The Little Mermaid qui mélangeait horreur, fantastique et comédie musicale, la cinéaste polonaise Agnieszka Smoczynska pouvait paraître un choix surprenant pour ce récit d’apprentissage beaucoup plus conventionnel. Comme son précédent et audacieux Fugue, elle module sa réalisation selon le sujet, se l’appropriant en misant sur sa singularité à capter l’esprit humain. Déjà que le scénario réunissait toutes ses obsessions : des héroïnes fortes qui doivent se reconstruire dans une société dont elles ignorent les repères en se forgeant leur propre réalité.

Ode à la différence et à la liberté, The Silent Twins n’est pas sans errance ou temps mort, se révélant néanmoins courageux et nécessaire quand vient le moment de faire revivre la destinée incroyable de deux femmes qui aspiraient seulement au silence.

The Silent Twins est présenté en version originale anglaise.

The Silent Twins

Drame biographique

The Silent Twins

Agnieszka Smoczynska

Avec Letitia Wright, Tamara Lawrance, Nadine Marshall

1 h 53
En salle

6,5/10