Deux ans après La La Land, qui lui a valu l'Oscar de la meilleure réalisation, Damien Chazelle nous plonge cette fois à l'époque de la course à l'espace, quand la NASA a mis tous les efforts requis pour atteindre le but ultime que le président Kennedy avait fixé: envoyer un homme sur la Lune avant la fin des années 60.

En portant à l'écran le scénario qu'a écrit Josh Singer (Spotlight, The Post), qui s'est inspiré d'une biographie de Neil Armstrong rédigée par James R. Hansen, le cinéaste met ainsi au centre de son récit l'homme qui, le 21 juillet 1969, a posé sa botte sur le sol lunaire en y allant de l'une des phrases les plus célèbres de l'histoire du monde: «Un petit pas pour l'homme, un grand pas pour l'humanité.»

Au récit héroïque pompeux à la gloire du savoir-faire américain, Chazelle préfère une autre approche, celle du portrait intime. Et c'est bien tant mieux. Il colle ainsi davantage à la personnalité de celui qui, sans le chercher, a inscrit son nom dans l'histoire du monde contemporain. À cet égard, Ryan Gosling, qui incarne un Neil Armstrong très subtilement habité, transcrit parfaitement la nature de l'homme en se glissant dans la peau d'un héros très discret.

En commençant en 1961, à une époque où les Américains se faisaient battre à plate couture en ce domaine par les Soviétiques, le récit défile chronologiquement en relatant les grandes étapes des programmes Gemini et Apollo. Se tenant toujours très près de ses personnages, Chazelle nous fait vivre les expériences de l'intérieur, en privilégiant toujours l'aspect sensoriel plutôt que technique. On ne peut faire autrement que de vibrer - dans tous les sens du terme - à ces expériences, dont quelques-unes se sont d'ailleurs soldées par des drames. Visuellement, le film est grandiose. Il l'est tout autant sur le plan sonore, alors que les silences se révèlent aussi assourdissants que les cliquetis d'enfer entendus dans les boîtes de tôle utilisées pour les missions spatiales de l'époque.

En parallèle, le récit s'immisce aussi dans la vie privée d'un homme dont l'espace intérieur est évidemment occupé par ses missions, mais aussi par un drame survenu dans sa famille. Si le personnage de l'épouse, magnifiquement interprété par Claire Foy, semble un peu faire tapisserie au départ, il prend sa véritable ampleur au fil du récit, notamment au cours d'une scène, très forte, où elle doit ramener son mari - déjà ailleurs - à son monde.

Sans triomphalisme

Le point culminant de ce très beau film reste cependant la fameuse mission de juillet 1969 et le passage de l'équipage d'Apollo 11 sur la Lune. Aucun triomphalisme, mais plutôt, un vaste contraste - ou parallèle, c'est selon - entre un paysage constitué de poussières grises et un aspect très réel - et triste - de la condition humaine. Chazelle illustre d'ailleurs ce trait en montrant souvent l'environnement à travers le reflet du casque de l'astronaute. 

Le retour sur Terre, empreint de sobriété, est d'ailleurs à l'image de ce film construit autour d'un personnage modeste, dont l'exaltante aventure s'est aussi jumelée à une quête existentielle.

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First Man (V.F.: Le premier homme). Drame biographique de Damien Chazelle. Avec Ryan Gosling, Claire Foy, Jon Bernthal. 2 h 21.

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IMAGE FOURNIE PAR UNIVERSAL PICTURES

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