Christophe Barratier s’est donné les moyens de ses ambitions. Après le succès des Choristes, l’auteur cinéaste affiche sans retenue son amour du grand cinéma à vocation populaire. Il propose ici un conte à saveur musicale dans lequel de véritables préoccupations sociales sont mises en exergue.

Dans Faubourg 36, Barratier revendique l’esprit du cinéma d’avant-guerre en évoquant le «réalisme poétique» cher à Marcel Carné. Les enjeux dramatiques sont campés dans un contexte précis, élaboré dans un décor reconstruit de toutes pièces (travail remarquable du chef décorateur Jean Rabasse). Comme un univers sublimé duquel se dégagerait la nostalgie d’un monde – et d’un cinéma – qui n’existe plus.

1936, c’est l’époque du Front populaire. Les ouvriers d’un théâtre mis en chômage tentent de reprendre leur destin en main en investissant un lieu voué aux sombres manigances d’un nouveau propriétaire. On sent bien poindre à l’horizon les préoccupations sociales et les dangers qui y sont associés: pertes d’emplois, xénophobie ambiante, émergence de partis extrémistes. Les protagonistes de cette histoire seront tous, à leur façon, confrontés à ces écueils. À ces thèmes plus larges s’ajoutent bien évidemment les déchirures personnelles. À cet égard, le dernier acte est particulièrement touchant. Du coup, les préoccupations d’hier deviennent aussi celles d’aujourd’hui. Et trouvent particulièrement écho dans un contexte où les difficultés économiques peuvent donner lieu à des dérapages en tous genres.

Barratier, qui fait sienne cette maxime selon laquelle les histoires au cinéma se doivent d’être plus belles que la vie, oppose à ces thèmes plus sombres une approche profondément ludique. Les destins exemplaires des héros de son histoire sont d’ailleurs magnifiés en chansons et en numéros de production.

À cet égard, il convient de souligner la qualité d’interprétation des acteurs. Gérard Jugnot est touchant dans la peau d’un modeste machino cocu à qui est retirée la garde de son fils. Clovis Cornillac se pose en digne représentant de l’aristocratie ouvrière (un peu comme le faisait Gabin à l’époque). Kad Merad est magnifique en amuseur désespéré aux allégeances flexibles, et Nora Arnezeder, la révélation du film, s’impose d’emblée dans le rôle de Douce, cette chanteuse débutante dont la présence sera cruciale.

De facture classique, Faubourg 36 assume ainsi pleinement ses influences, d’autant plus que rien n’est ici laissé au hasard sur le plan de la mise en scène. L’ensemble, se révèle donc un brin prévisible, et l’émotion est parfois un peu appuyée, surtout dans la dernière partie.
 
Faubourg 36 reste quand même un film de grande qualité, qui devrait en principe ravir tous ceux qui ont déjà fait des Choristes un triomphe.

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***1/2
FAUBOURG 36
Comédie dramatique réalisée par Christophe Barratier. Avec Gérard Jugnot, Clovis Cornillac, Kad Merad, Nora Arnezeder, Pierre Richard. 2h.

Dans un faubourg populaire du nord de Paris en 1936, trois ouvriers du spectacle au chômage tentent de reprendre le music hall où ils travaillaient.

Un film spectaculaire aux influences bien assumées.