L'affaire Weinstein et le mouvement #metoo ont provoqué une série de changements dans l'industrie du cinéma. En voici six qui risquent de transformer Hollywood en profondeur.

L'effet Ava DuVernay

Sur scène, lors de la conférence de presse d'A Wrinkle in Time, le plus récent film de Disney réalisé par Ava DuVernay, il n'y avait que trois hommes blancs, dont un adolescent de 15 ans. À leurs côtés : trois femmes blanches et cinq femmes de couleur. C'est l'illustration parfaite de ce qu'évoquent ceux qui réclament une plus grande diversité à Hollywood. « Nous avons placé la barre là, espérons que d'autres nous imiteront », a souligné la productrice du film, Catherine Hand, en entrevue. « Ava a embauché une majorité de femmes sur sa série Queen Sugar, note pour sa part Josh Welsh, président de l'organisme Independent Film. Elle ne se contente pas de parler, elle accomplit des choses. »

Règles antiharcèlement

Au début de l'année, la puissante Guilde des producteurs a adopté une série de règles qui visent à empêcher le harcèlement sexuel sur les plateaux de tournage. Parmi les nouvelles mesures mises de l'avant : une formation antiharcèlement qui devra être offerte par une personne qualifiée à toute l'équipe (acteurs et techniciens) au début de chaque production. On demande aussi aux producteurs de nommer sur chaque équipe un homme et une femme à qui des victimes ou témoins potentiels de harcèlement sexuel pourront se référer.

>> Lisez le document de la Guilde (en anglais)

Le succès de Black Panther

« On sort tout juste du week-end de Black Panther et c'est l'illustration parfaite du changement qui s'opère à Hollywood, observe Abdi Nazemian, producteur associé du film Call Me By Your Name, en entrevue avec La Presse. L'industrie est à l'écoute de l'auditoire. Or, ce que dit le public - avec ses dollars et lorsqu'il s'exprime dans les réseaux sociaux -, c'est : "Nous voulons de la diversité, nous voulons des femmes réalisatrices." Je crois que lorsque l'auditoire veut quelque chose et qu'il l'exprime, il l'obtient. Si Hollywood veut prospérer et survivre, il doit être à l'écoute et changer. »

Les studios cherchent des femmes

« Je suis une réalisatrice d'expérience, je suis une femme, et je suis d'origine latine, donc issue de la diversité, affirme la réalisatrice Patricia Chica qui partage son temps entre Montréal et Los Angeles depuis 2014. Disons que je me sens à une très bonne place actuellement. Tous les studios veulent des femmes. » Son plus récent court métrage, Morning After, vient tout juste d'être projeté aux Rendez-vous Québec Cinéma après avoir été présenté dans plusieurs festivals. La maison de production Shoreline Entertainment, dont le siège social est à Beverly Hills, financera Montréal Girls, prochain long métrage de la cinéaste diplômée de l'Université Concordia.

Le Bonnie Award

Une bourse de 50 000 $US sera remise ce soir lors de la 33édition des Film Independent Spirit Awards, les prix qui récompensent le meilleur du cinéma indépendant aux États-Unis. Le Bonnie Award, créé cette année, a été nommé en hommage à Bonnie Tiburzi Caputo, première femme pilote dans une ligne aérienne commerciale. Elle avait été embauchée en 1973, à l'âge de 24 ans, par American Airlines, qui commandite le prix. Avec cette bourse, on veut encourager les femmes cinéastes en milieu de carrière. Le premier Bonnie Award de l'histoire sera attribué à la réalisatrice Chloé Zhao.

Faire respecter la loi

« Pour que les choses changent, il faut faire respecter les lois », observe Josh Welsh, président de l'organisme Film Independent. M. Welsh fait référence à la plainte déposée en 2015 par l'American Civil Liberties Union (ACLU) à l'endroit des principaux studios hollywoodiens pour pratiques d'embauche illégales et discrimination systémique à l'endroit des femmes. Cette plainte a entraîné une enquête de l'U.S. Equal Employment Opportunity Commission (EEOC). « Il faut l'intervention du gouvernement, accompagnée de sanctions économiques et d'amendes, croit Josh Welsh. Il est clair que les pratiques d'embauche sont illégales à Hollywood. Regardez les statistiques sur la présence des femmes : ça ne reflète pas un processus juste et équitable. »

PHOTO DAMIAN DOVARGANES, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Une formation antiharcèlement devra dorénavant être offerte par une personne qualifiée à toute l'équipe (acteurs et techniciens) au début de chaque production.

Photo Chris Aluka Berry, Reuters

Des jeunes applaudissent à la fin de la présentation du film Black Panther.