Après un peu plus de 50 ans de cinéma, André Forcier pourra enfin mettre la main sur un trophée Iris, et pas le moindre. Lors du prochain Gala Québec Cinéma (anciennement la soirée des Jutra), qui se tiendra le 3 juin, celui que l'on a surnommé «l'enfant terrible du cinéma québécois» sera la personnalité du milieu du cinéma à qui l'on rendra hommage.

«Je m'y attendais un peu! lance en riant l'intéressé quand on lui demande quelle a été sa première réaction en apprenant la nouvelle. Je pense que j'étais dû! Cet hommage me fait évidemment très plaisir. Quand j'ai commencé à réaliser Chroniques labradoriennes, le 26 novembre 1966, je n'aurais jamais pu imaginer que ma carrière serait aussi longue. Les motivations qui me poussent à faire des films n'ont jamais changé, cependant. J'aime faire passer des idées par des émotions. C'est ce qui m'a toujours guidé.»

Une rare reconnaissance

Aussi étrange que cela puisse paraître, André Forcier n'a encore jamais obtenu de prix dans les galas consacrés au cinéma canadien et québécois. Mis à part deux sélections à la Quinzaine des réalisateurs du Festival de Cannes (L'eau chaude, l'eau frette en 1976 et Une histoire inventée en 1991), ses films n'ont guère voyagé non plus.

«Il y a des circonstances sur lesquelles on n'a pas de contrôle, dit-il. En 1994, Le vent du Wyoming a pratiquement été sélectionné dans la compétition officielle à Cannes. Il était bien soutenu par Gilles Jacob [délégué général du festival à l'époque] et, à ce que m'a dit un des membres, par l'ensemble du comité de sélection. Or, Gilles Jacob s'était déjà commis envers Atom Egoyan [pour Exotica].» 

«C'est sûr que s'il avait été lancé à Cannes, le film aurait eu une autre carrière. Ce n'est pas un regret, mais j'en garde quand même un brin d'amertume.»

André Forcier précisera qu'avec Je me souviens, Le vent du Wyoming reste son film favori.

«Le vent du Wyoming témoigne bien de l'atmosphère qui régnait à l'époque. J'aime le style du film, son écriture, les dialogues. Quant à Je me souviens, j'aimais beaucoup cette idée d'une petite fille isolée par le manque d'amour de sa mère, qui va se faire entendre grâce à l'apprentissage du gaélique, une langue en voie de disparition. Cette métaphore se prête bien au Québec, je trouve.»

Actuellement, André Forcier attend la décision des institutions avant de se lancer dans son 13e long métrage. Si tout va bien, le tournage de La beauté du monde devrait commencer l'été prochain. Mettant en vedette Roy Dupuis et Yves Jacques, ce long métrage à teneur écologique relate le parcours d'un apiculteur bien résolu à perpétuer la mémoire du botaniste Marie-Victorin. Ce dernier revient d'ailleurs sur terre en 2019 parce que, semble-t-il, l'au-delà est trop «ennuyant».

Du Forcier pur jus en perspective. Et c'est tant mieux.

Le Gala Québec Cinéma aura lieu le 3 juin.